Le Parlement européen adopte la directive controversée sur le "secret des affaires"

Sur les 652 eurodéputés présents à Strasbourg, 503 se sont prononcés en faveur de cette directive.
Sur les 652 eurodéputés présents à Strasbourg, 503 se sont prononcés en faveur de cette directive. © AFP
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avec AFP , modifié à
Cette directive vise à instaurer un socle juridique européen pour lutter notamment contre l'espionnage industriel et protéger l'innovation.

La directive européenne sur la protection du "secret des affaires" a été adoptée à une large majorité jeudi par le Parlement européen, au grand dam de journalistes, de lanceurs d'alerte, d'ONG et de syndicalistes, échaudés par le scandale des "Panama Papers". Lancée fin 2013 par le commissaire européen au Marché intérieur, le Français Michel Barnier, cette directive vise à instaurer un socle juridique européen pour lutter notamment contre l'espionnage industriel et protéger l'innovation. Mais elle a provoqué une levée de boucliers de nombreuses organisations syndicales et ONG européennes, inquiètes pour le respect des libertés fondamentales.

"Un texte équilibré". Sur les 652 eurodéputés présents à Strasbourg, 503 se sont prononcés en faveur de cette directive, 131 contre et 18 se sont abstenus. Selon Constance Le Grip, ce texte "équilibré (...) protège à la fois le savoir-faire professionnels, le patrimoine immatériel des entreprises, mais aussi les libertés fondamentales et l'exercice du métier de journaliste et des activités des lanceurs d'alertes".

"Un signal erroné". Mais les eurodéputés Verts étaient farouchement opposés à ce texte et ont réclamé en vain au moins le report du vote. "C'est un signal complètement erroné de la part de cette assemblée d'adopter dix jours après les révélations des "Panama Papers" un texte qui de facto va rendre plus difficile la tâche des lanceurs d'alerte et des journaux", s'est emporté Philippe Lamberts, coprésident du groupe Verts-ALE juste avant le vote.

Principal reproche des détracteurs : la directive européenne "fait porter la charge de la preuve sur les lanceurs d'alerte et pas sur les entreprises", selon Philippe Lamberts. Plusieurs pétitions ont circulé au niveau européen ces derniers jours contre cette directive.

LuxLeaks. Son adoption survient quinze jours avant l'ouverture du procès, le 26 avril à Luxembourg, du lanceur d'alerte Antoine Deltour, à l'origine des révélations "LuxLeaks". Antoine Deltour et deux autres hommes, dont le journaliste français Edouard Perrin, sont inculpés pour avoir divulgué des centaines de documents confidentiels sur le traitement fiscal des multinationales installées au Luxembourg. Ces documents concernaient des rescrits fiscaux accordés par l'administration et négociés par la firme PwC pour le compte de ses clients.