L'artiste C215 est notamment connu pour ses portraits de Simone Veil. 7:57
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Lucie de Perthuis
Christian Guémy, alias C215, est un street-artist français. Il intervient en prison depuis 2014, dans une quinzaine d'établissements. Alors que le centre pénitentiaire de Réau a organisé une exposition comptant notamment six toiles de Picasso, Christian Guémy raconte sur Europe 1 les dessous de cette démarche artistique et citoyenne.
INTERVIEW

C215, de son vrai nom Christian Guémy, est un street-artist que l'on connait notamment pour ses portraits de Simone Veil sur des boîtes aux lettres parisiennes. Il intervient depuis 2014 dans des prisons en tant qu'artiste et bénévole. Alors que le centre pénitentiaire de Réau, en Seine-et-Marne s'est fait prêter, entre autres, six œuvres de Picasso pour une exposition organisée par et pour les détenus, Christian Guémy raconte au micro d'Europe 1 son rôle en tant qu'artiste intervenant en prison. 

Une démarche qu'il qualifie "d'artistique et citoyenne". "Je viens dans les prisons rencontrer les détenus et le personnel, et je leur propose de peindre des œuvres d'art", explique Christian Guémy. Des œuvres adaptées à un contexte, "dans la forme et dans le sens à l'univers carcéral", précise l'artiste. Il rappelle qu'il n'est pas animateur ou professeur, mais vient proposer de l'art pour que chacun, des surveillants aux détenus en passant par le personnel médical et les avocats, soient confrontés de la même manière à des œuvres.

"S'évader, se décontracter"

Le sens de sa démarche ? "Que les œuvres fassent patrimoine pour tous, qu'elles restent alors que nous passeront", répond C215. "J'interviens dans les lieux communs, notamment dans les salles d'accueil des familles. Une oeuvre d'art, c'est une manière extrêmement pacifique, positive pour chacun de s'évader, et de se décontracter. Les prions sont des lieux de confinement avec beaucoup de tension, pas seulement pour les détenus : pour tout le monde", poursuit Christian Guémy. "L'idée c'est que les œuvres leur permettent de vivre ensemble", poursuit-il. 

"Je ne suis pas magistrat"

"On est dans une société qui aime bien juger à tort et à travers. Moi je ne suis pas magistrat, je suis artiste et je viens proposer des œuvres à des êtres humains", soutient C215. "L'avantage, c'est que l'oeuvre renvoie chacun à son émotion. Que l'on soit surveillant ou détenu, on a le même cœur, les mêmes émotions. C'est ça qui m'intéresse : rappeler ce qu'ils ont en commun, ce qui leur permet de vivre ensemble dans ce qui est avant tout un lieu de vie", poursuit Christian Guémy.  

"La démarche est aussi d'apporter quelque chose de positif de mon métier, qui consiste à faire des choix, à se projeter, à établir des projets. Et ça, ça leur parle d'eux, et de leur capacité à faire des choix, et à imaginer quelle pourrait être leur vision, leur anticipation, et comment ils pourraient se reconstruire", assure C215, convaincu des effets positifs que peut avoir l'art en prison. 

Un artiste engagé

L'artiste, dans son expérience carcérale, est lié à la chanteuse Barbara, qui avait donné plusieurs concerts à la prison de Fresnes. L'accueil de la chanteuse avait été tel qu'elle y avait laissé son piano. "Cela m'a beaucoup touché, c'est pourquoi j'ai peint son portrait au-dessus de son piano", explique Christian Guémy. "J'ai également peint le portrait de Robert Badinter à Fresnes", raconte C215, qui a rendu hommage au ministre de la Justice qui avait défendu le projet d'abolition de la peine de mort en 1981.