"On s'est fait notre place" : en 1968, les Pionnières de Reims lançaient le foot féminin

Les Pionnières ont remporté 5 championnats de France.
Les Pionnières ont remporté 5 championnats de France. © Photo d'archive.
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Martin Feneau, édité par Antoine Terrel , modifié à
Il y a plus de 50 ans, les joueuses des Pionnières de Reims formaient l'une des premières équipes de football féminin en France. Bien loin de l'enthousiasme actuel pour les Bleues, elles ont dû, à l'époque, faire face au mépris des instances et aux moqueries des hommes. 

Pour le football féminin français, c'est le grand jour. Ce vendredi, les joueuses de l'équipe de France donneront le coup d'envoi du Mondial disputé à domicile, face à la Corée du sud. Mais si les Bleues ont désormais le vent en poupe, et que le public se prend à rêver que les joueuses de Corinne Diacre imitent leurs homologues masculins et soulèvent le trophée, le football féminin n'a pas toujours suscité le même enthousiasme. Et les premières équipes constituées de femmes ont dû affronter l'indifférence des instances et les moqueries du public. C'est le cas des Pionnières de Reims, dont Europe 1 a rencontré d'anciennes joueuses. 

C'est donc à Reims que l'histoire du foot féminin en France a commencé, il y a un peu plus de 50 ans. À l'époque, il n'avait aucune existence officielle. Mais en 1968, l'organisateur d'une kermesse invite Ghislaine et d'autres jeunes filles à chausser les crampons, mais plutôt pour amuser l'assistance. "Il s'est dit 'tiens, si on faisait jouer des filles au foot'", se souvient Ghislaine qui, ça tombe bien, était une inconditionnelle du ballon rond. "Je jouais tous les jours avec mes frères sur un terrain à coté de chez moi. C'était une chance de pouvoir pratiquer avec des filles". "On savait que c'était un sport essentiellement masculin, mais on s'est fait notre place", raconte encore l'ancienne joueuse. 

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Les remarques sexistes des "gros lourdingues" 

Le chemin a effectivement été long, et il a fallu deux ans pour que la Fédération les prenne au sérieux, puis reconnaisse le football féminin, alors qu'il y avait de plus en plus d'équipes en France. Mais le plus dur, raconte Isabelle, qui portait le numéro 10, c'était les remarques sexistes dans le public et les médias. "Les filles, on veut bien les voir, mais dans le vestiaire ou dans la douche", raillaient "des gros lourdingues" dans le public, décrit-elle. "C'est triste, mais c'était la banalité de l'époque. On se disait : 'ça doit quand même leur poser un sacré problème'". 

"Mais on parlait de nous et c'était important de faire le buzz de l'époque", dit encore Isabelle. Et en effet, le buzz était mérité, les Pionnières remportant 5 titres de championnes de France. Désormais, Isabelle et Ghislaine ne rêvent que d'une chose : voir les Bleues soulever la coupe le 17 juillet prochain. "C'est bien ce qui leur arrive, et que notre sport soit arrivé à gravir tant de marches en 50 ans", s'enthousiasme Ghislaine. Mais, rappelle-t-elle, "la plus haute reste à gravir : être championne du monde". En 1971, les Pionnières avaient déjà eu la chance de participer à un Mondial, au Mexique, mais la compétition n'était pas officielle. Elles avaient terminé 5e.