ÉDITO - Tribune contre les abus sexuels dans le sport : "Le grand ménage a commencé"

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Virginie Phulpin
De nombreux sportifs français publient une tribune mercredi matin dans "Le Parisien-Aujourd'hui en France". Ils veulent donner de la voix contre les violences sexuelles, et proposer des solutions. Pour notre éditorialiste sport Virginie Phulpin, cet engagement prouve que rien n’arrêtera l’effet domino.
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>> 54 athlètes français de haut niveau ont appelé mardi dans une tribune à "donner de la voix" à la suite des révélations sur les abus sexuels dans le milieu du patinage français. Parmi les signataires, tous membres de la Commission des athlètes de haut niveau du CNOSF (le Comité olympique français), Teddy Riner, Ophélie David ou Nathalie Péchalat. Un engagement qui fait dire à notre éditorialiste Virginie Phulpin que "le monde du sport va changer".

"Nous ne pouvons plus nous taire. Il est temps d’agir collectivement et de prendre conscience que briser le silence, c’est aussi servir le sport". Pour moi c’est une des phrases clés de la tribune publiée dans Le Parisien par les athlètes français. Est-ce que vous vous rendez compte de ce changement total qu’on est en train de vivre ? Briser le silence, c’est défendre le sport et les sportifs.

Jusque-là, parler, dénoncer les agressions sexuelles, faire part de ses suspicions, ou soutenir les victimes, c’était vu comme une façon d’écorner l’image du sport. Et très peu d’athlètes osaient le faire. Parce qu’il y avait une chape de plomb générale sur le sujet. De l’Etat aux fédérations jusque dans les clubs. Et pour les sportifs, parler, c’était risquer son avenir, mettre sa carrière en danger. Dans leur tribune, les signataires disent qu’ils se sentent responsables maintenant que les témoignages se multiplient. Mais non, ils faisaient partie d’un système où tout était fait pour que personne ne prenne la parole. Chut, on ne dit rien, et le sport ne s’en portera que mieux.

Entendu sur europe1 :
"Parler, témoigner, soutenir les victimes, c’est ça, servir le sport"

Aujourd'hui, enfin, on a déplacé le curseur. Parler, témoigner, soutenir les victimes, c’est ça, servir le sport. Il y a eu un effet domino. Les enquêtes et les témoignages se sont multipliés ces dernières semaines, puis la ministre des sports a pris ses responsabilités, et maintenant les sportifs s’engagent. Cette tribune, pour moi, prouve qu’on ne reviendra plus en arrière. Et moi je suis fière ce matin. Fière de ce réveil général, fière de la réaction des sportifs. Fière et optimiste. Les athlètes savent ce que c’est que de s’engager corps et âme pour atteindre leurs objectifs. Ils passent leur vie, leur carrière à relever des défis. Et leur tribune me fait espérer des lendemains qui chantent, quand on aura pansé nos blessures.

"Ces sportifs ont des idées, ce sont eux les premiers concernés"

Ces sportifs proposent aussi des solutions : la création d’une cellule d’écoute des victimes indépendante des fédérations, une cellule qui pourrait saisir le ministère pour lancer des enquêtes, la vérification systématique des antécédents judiciaires des bénévoles, l’interdiction à vie d’exercer au contact de la jeunesse pour tous les agresseurs sexuels avérés… Oui, ces sportifs ont des idées, ce sont eux les premiers concernés, ils connaissent par cœur le fonctionnement des clubs et des fédérations sportives.

Alors si on peut les écouter aujourd'hui, le monde du sport va changer. Et comme la ministre a pris le problème a bras le corps, j’ai tendance à lui faire confiance, elle va travailler avec ces athlètes engagés. Et de toute façon, on sera assez nombreux à vérifier l’avancement des travaux. Alors, oui, ce matin je suis optimiste, le grand ménage a commencé. Et les non-dits, c’est fini. Personne ne peut arrêter l’effet domino."