ARCHIVES – «Yannick est à genoux !» : retour sur la victoire de Noah à Roland-Garros, le 5 juin 1983

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Gauthier Delomez / Crédits photo : AFP
Il y a 40 ans jour pour jour, Yannick Noah, âgé alors de 23 ans, remportait le tournoi de Roland-Garros face au Suédois Mats Wilander. C’est aujourd’hui encore la dernière victoire d’un Français en Grand Chelem. Europe 1, radio officielle du tournoi, revient sur ce moment historique du sport tricolore en archives.

C’est une image que beaucoup de Français ont encore en mémoire. Yannick Noah, tenue blanche et jaune, s’agenouillant sur la terre battue du court central et célébrant sa victoire en finale de Roland-Garros. "Il a gagné ! Oh quel moment !", s’exclame alors le journaliste Jean-René Godart, aux commentaires pour Europe 1 le dimanche 5 juin 1983. "Yannick qui est à genoux au centre du court ! Il a 23 ans, Yannick Noah", rappelle-t-il, mesurant l’exploit du jeune tennisman tricolore classé alors à la 6e place mondiale. Le natif de Sedan, qui a grandi au Cameroun, à Yaoundé, vient de remporter la célèbre Coupe des Mousquetaires face au Suédois Mats Wilander, en trois sets (6-2, 7-5, 7-6), devenant ainsi le premier Français à s’imposer porte d'Auteuil depuis Marcel Bernard en 1946.

 

Dans le jeu décisif de la troisième manche, Yannick Noah se procure quatre balles de match, mais manque la première sur un lob gagnant de son adversaire. Au service ensuite, le jeune Français n’hésite pas à remonter au filet, et sert côté coup droit de Mats Wilander. Le retour du Suédois, 5e mondial, s’envole derrière la ligne de fond de court, scellant le sort de la rencontre disputée sous une chaleur étouffante, et après 2h24 de jeu. Sous les cris de joie et les applaudissements du public, Yannick Noah lève les bras en l’air, serre brièvement la main de son adversaire et vient prendre son père Zacharie dans ses bras, alors que des spectateurs envahissent le terrain. Un moment d’anthologie pour le sport français.

"Je ne veux pas arriver en finale, je veux gagner"

La veille de cette finale historique, des places se sont vendues au marché noir pour plus de 4.000 francs (plus de 600 euros aujourd'hui, NDLR). Et à la télévision, plus de 11 millions de téléspectateurs suivent l'exploit du Franco-camerounais. En réalité, la France entière comptait sur son champion. "Yannick Noah, finalement, avait toute la pression sur les épaules. Il avait, depuis le début de ce tournoi, un pays entier derrière lui, qui l'encourageait, qui voulait qu'il gagne", note d'ailleurs Patrice Dominguez, ancien joueur de haut niveau et consultant pour Europe 1, décédé en 2015.

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"Et finalement, il était devenu le favori parce que ce (dimanche) matin, tout le monde et les auditeurs d'Europe 1, le donnaient vainqueur à 85%. Et c'est difficile lorsqu'on atteint pour la première fois à 23 ans, une finale d'un tournoi du Grand Chelem, contre le tenant du titre", expose-t-il. Pourtant, à quelques jours du match, Yannick Noah démontre son moral d'acier en interview : "Je veux gagner. Je ne veux pas arriver en finale, je veux gagner. Mon rêve, c'est de gagner Roland-Garros. J'ai tout fait pour arriver dans les meilleures conditions pour gagner, et maintenant ce serait un peu idiot de m'arrêter là. Donc dimanche, je mettrai tout".

La victoire de tout un clan

Cette assurance le porte jusqu'à la victoire ce dimanche 5 juin 1983. Une victoire non sans émotions, car elle fut celle d'un clan. "Je n'ai pas gagné tout seul. J'ai gagné parce que j'ai été aidé par des gens qui étaient proches de moi, mon père, ma famille bien sûr, Patrice Hagelauer (son entraîneur, NDLR)... Ils font partie de cette victoire. Ils m'ont aidé, ils ont travaillé avec moi, ils ont souffert avec moi", confie le jeune champion au micro d'Europe 1, avant de s'arrêter sur son père. "A chaque Roland-Garros, à chaque grande occasion, il repart au Cameroun avec plein de cheveux blancs. Là, j'espère que ça ira", sourit Yannick Noah.

Le sacre entériné sur le court central, le nouveau héros du tennis français savoure son exploit sportif : "J'avais toujours rêvé de cette victoire. Maintenant, c'est fait. On s'aperçoit que c'est beaucoup plus de travail. Une vie qui est complètement changée, mais quand on réussit, ça vaut vraiment le coup. Je viens de gagner Roland-Garros, tant mieux, maintenant je pars en vacances". 40 ans ont passé et après l'élimination de tous les tennismen tricolores en cette édition 2023, difficile de dire qui pourra devenir le successeur de Yannick Noah.