Tamgho, le contrat de défiance

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avec agences et Corinne Boulloud , modifié à
ATHLE - Asics a rompu son partenariat avec l'athlète. Mais la fédé française d'athlé le soutient.

"Un esprit sain dans un corps sain". Visiblement, la marque Asics a estimé que Teddy Tamgho ne correspondait plus à sa devise. L'équipementier japonais a annoncé, jeudi, dans un communiqué, qu'il mettait fin à son partenariat avec le jeune athlète français, qui durait depuis 2007. "Après avoir considéré attentivement l'ensemble des circonstances actuelles, Asics a le regret d'annoncer la rupture du contrat de sponsoring qui lie la marque au triple sauteur français Teddy Tamgho", déclare la direction d'Asics. "Cette résiliation entraîne un arrêt immédiat du partenariat entre l'athlète et la société."

Les "circonstances actuelles" auxquelles Asics fait référence dans son communiqué renvoient à la suspension de six mois prononcée par la Fédération française d'athlétisme (FFA) à l'encontre de Tamgho le 20 décembre dernier. La FFA reproche à Tamgho son comportement violent lors d'une altercation qui l'a opposé le 16 octobre à une jeune athlète, au Creps de Boulouris, dans le Var. Le triple sauteur tricolore, recordman du monde de la spécialité en salle, s'en serait pris à cette connaissance parce qu'elle aurait alimenté des rumeurs sur une prétendue relation amoureuse. La jeune femme, qui s'est exprimée dans la presse depuis, décrit un homme plein de rage au moment des faits, évoquant un début d'étranglement, des coups de genou dans la tête, des coups de poing et des coups de pied.

Comme Bryant ou Woods

Tamgho n'est pas le premier athlète à perdre des contrats après avoir vu son image entachée par une affaire extra-sportive. En 2003, McDonald's et Nutella "lâchèrent" le basketteur Kobe Bryant, accusé de viol par l'employée d'un hôtel dans le Colorado. Fin 2009, après la révélation de ses infidélités, le golfeur Tiger Woods vit une grande partie de ses sponsors prendre leurs distances un à un : Gillette, TAG Heuer, AT&T, General Motors... Mais Tamgho n'est ni Bryant ni Woods. Et son écart de conduite, avéré par la décision prise par la Fédération, il va le payer plus cher. Car, en athlétisme, le revenu provenant des sponsors pèse un certain poids. Et ils ne sont pas faciles à aller chercher...

Teddy Tamgho, avec sa médaille d'or (930x620)

Selon le président de la FFA, Bernard Amsalem, Tamgho n'aurait pourtant pas de souci à se faire. "Vu sa personnalité, les équipementiers vont se précipiter", a-il déclaré, jeudi, lors de la présentation de ses voeux à la presse. Pas si sûr, si l'on en croit les bruits de couloir entendus par le journaliste de L'Equipe présent sur place...Cette personnalité atypique dont parle Bernard Amsalem, c'est celle d'un jeune homme âgé de 22 ans, pas toujours en phase avec le monde parfois policé de l'athlé. Après son titre mondial en salle, en 2010, à Paris, il avait été brocardé pour avoir porté une casquette des New York Yankees sur le podium, pendant la Marseillaise.

Une réponse par le rap

Refusant de répondre aux journalistes jeudi soir, après l'annonce d'Asics, Tamgho a préféré une webradio, GenerationFM, pour livrer ses sentiments. Se dédouanant de tout acte violent, il n'a pas affiché de remords particulier : "après ça (son altercation), mon nombre de fans sur Facebook a augmenté de 700, je remercie la fille." Ces déclarations sont dans la lignée de celles qu'il avait faites après le début de l'"affaire". Non pas aux micros, mais dans le micro. Fan de rap, il avait mis en ligne une petite création personnelle, dans laquelle il exprimait une belle confiance : "Ceux qui m'ont enterré me verront le 9 août (date de la finale du triple saut aux JO, ndlr) comme un vampire. Ma revanche sera indiscutable, brève et totale (...) je dois apporter l'or à tous les Français."

Teddy Tamgho rappe dans "Joyeux Noël" :

Dans ce rap, si Tamgho reconnaît ses torts, il fait peu de cas de sa victime.  "On essaie de me descendre comme si j'étais un terroriste, je n'ai rien fait de grave, juste réglé une petite "story" (histoire en anglais), les médias surfent sur la vague pour me couler", rappe-t-il. "Hier j'étais le rêve bleu, aujourd'hui je suis un cogneur de fille. Zéro bleu, zéro coma alors arrêtez de faire des films."

Cette position jusqu'au-boutiste ne rebute pas plus que ça Bernard Amsallem. "A titre personnel, j'ai trouvé que c'était intelligent, qu'il avait des qualités", estime le président de la FFA. "C'est un aspect de sa personnalité que je ne connaissais pas et j'ai trouvé ça plutôt bien. Si la chanson peut lui permettre peut-être de retrouver un peu de sérénité, je pense que c'est plutôt une bonne chose."

Le soutien de la FFA

Loin d'excuser ce que Tamgho aurait fait  (une plainte au civil a été déposée par la jeune femme et deux autres personnes), Bernard Amsalem apporte un soutien fort à son athlète, l'une des meilleures chances de médaille de l'athlétisme tricolore lors des prochains Jeux de Londres. "Il a admis qu'il avait fait une faute", a-t-il souligné au micro d'Europe 1. "Il a aujourd'hui un rang, il a été champion du monde, il a des performances qui le situe au plus haut niveau de la hiérarchie dans sa discipline, donc il faut aussi qu'il ait une attitude exemplaire." Si Tamgho n'a plus de contrat avec Asics, une chose est sûre : il a toute la confiance de la FFA pour changer mais aussi pour gagner…