Sa Majesté Jason

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Guillaume BARDOU , modifié à
Jason Lamy Chappuis est devenu ce mercredi à Oslo champion du monde de combiné nordique dans l'épreuve du grand tremplin, réalisant un véritable numéro sur les 10 kilomètres de fond. Le Jurassien rejoint Jean-Claude Killy et Edgar Grospiron au panthéon du ski tricolore, devenant le troisième Français à réaliser le triplé Jeux Olympiques, Coupe du monde, Championnats du monde. Magique !

Jason Lamy Chappuis est devenu ce mercredi à Oslo champion du monde de combiné nordique dans l'épreuve du grand tremplin, réalisant un véritable numéro sur les 10 kilomètres de fond. Le Jurassien rejoint Jean-Claude Killy et Edgar Grospiron au panthéon du ski tricolore, devenant le troisième Français à réaliser le triplé Jeux Olympiques, Coupe du monde, Championnats du monde. Magique ! Un grand, un très grand. Ce mercredi à Oslo, dans le temple du ski nordique, Jason Lamy Chappuis est entré un peu plus dans l'histoire de sa discipline. Un an et 15 jours pile après l'or olympique à Whistler, le Jurassien est allé glaner le titre de champion du monde, le seul qui manquait à son palmarès. Oslo avait pour cela tout du jardin taillé sur mesure. La colline d'Holmenkollen avait en effet vu sa première participation à une Coupe du monde (28 février 2004), sa première domination en saut (11 mars 2006) puis le premier succès en Coupe du monde (18 mars 2007 sur le sprint). L'an dernier, il y avait aussi accroché son premier Globe de cristal... Oslo Holmenkollen, terre de premières donc, terre magique surtout ! Tout avait pourtant mal commencé. Dans le flou comme le brouillard posé sur le tremplin depuis le début de semaine, le Jurassien semblait en plein doute depuis plusieurs jours... Lui, le chef de file de l'équipe de France, pliait. A court de jambes, à court de rythme après une coupure d'un mois sans compétition officielle, le Français n'avait pu se livrer pleinement samedi sur les 10 kilomètres suivant le saut sur le petit tremplin. Sa 15e place, son plus mauvais résultat de l'année, pire même que Schonach en Coupe du monde où il était malade (11e), inquiétait. Et le staff technique de remettre en cause le programme de préparation concocté pour les Bleus... Jason part seul à mi-course L'épreuve par équipe lundi (5e) pouvait rassurer, sans plus de certitudes. Certes, Jason disait avoir "retrouvé les jambes". Mais dans quelles proportions alors qu'Autrichiens et Allemands semblaient voler sur les skis ? "Il ne faut pas rêver, on ne va pas devenir meilleurs fondeurs en quatre jours" nous confiait lundi soir le directeur technique, Nicolas Michaud, presque fataliste. C'est oublié l'orgueil, la soif de revanche de son leader qui avait commencé par survoler les entrainements de saut mardi. Ce mercredi matin, Jason ne réalise pourtant pas la meilleure performance, laissant le Norvégien Haavard Klemetsen mener. Voulant en rajouter un peu sur ce tremplin fétiche, taillé pour les meilleurs sauteurs, l'athlète de Bois d'Amont ne se pose "qu'à" 133,5 mètres. Efficace, performant certes mais insuffisant pour s'autoriser le fameux matelas d'une minute espéré sur ses principaux concurrents, Gottwald excepté (109,5 mètres transposés en 2 minutes 30 rédhibitoires de retard). Derrière, l'Allemagne rode, forte du trio Rydszek, Frenzel, Edelmann, tous sous cette fameuse barrière de la minute. Rejoignant rapidement Klemetsen parti avec six secondes d'avance, Lamy Chappuis s'agace quelque peu à ne pas voir le Norvégien prendre le relais, malgré l'absence de son leader Magnus Moan, non partant sur les 10 kilomètres de fond. Alors, pour ne pas voir la meute revenir, Jason accélère, encore et encore. "Je me sentais bien au bout de deux tours, les jambes répondaient aujourd'hui. J'ai essayé de partir tout seul, Haavard (Klemetsen, ndlr) ne voulait pas m'aider. J'ai prié pour que les Allemands ne reviennent pas très vite", détaille à l'arrivée le champion au micro d'Eurosport. Au bout de cette deuxième boucle de 2,5 kilomètres, l'avance est toujours de 30 secondes. Ne lâchant rien au cours du troisième tour, le double médaillé de bronze à Liberec en 2009 poursuit son échappée belle, seul au dessus des fjords, seul toujours au sein du stade surchauffé par un peuple norvégien soufflé par sa réaction. Le rythme se fait plus saccadé au 8e kilomètre, le chrono tourne à l'alerte : plus que 17 secondes d'avance ! "J'ai eu chaud", sourit t'il après coup, toujours au micro d'Eurosport. Mais le Jurassien sort la tunique dorée, celle de Whistler, celle de Chaux-Neuve en janvier pour encore relancer dans la dernière côte et résister à Rydzek et Frenzel. Au bout de cette virée vers l'or, l'histoire l'attend. Française d'abord, rejoignant au panthéon les mythes Killy et Grospiron seuls à avoir, en alpin et en freestyle, glané les trois titres suprêmes. Mondial surtout, puisque Jason devient le cinquième homme, le premier non-Scandinave, à réaliser ce triplé en combiné nordique... Une moisson d'or réalisée en trois saisons à peine et qui consacre un champion de 24 ans. Un petit Jurassien taillé pour voler et qui rêve maintenant un peu plus d'emmener "ses copains" de l'équipe de France (Braud 9e ce mercredi, Laheurte 18e et Lacroix 23e) vers un podium collectif vendredi. L'espoir est désormais permis. Qui l'eut cru samedi au sortir du petit tremplin ? Pas grand monde sauf lui, sûrement. Car ce Jason là est unique...