Le mythe de la "troisième mi-temps"

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RUGBY - Un ouvrage raconte certaines des 3es mi-temps les plus gratinées du rugby hexagonal.
Mathieu Bastareaud (930x620)

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Jeudi matin, le sélectionneur de l'équipe de France de rugby, Philippe Saint-André, a annoncé la composition du XV de départ pour affronter le pays de Galles, samedi, au Stade de France. Le principal changement est l'arrivée au centre de Mathieu Bastareaud, qui avait fait polémique à l'été 2009 lors d'une soirée en Nouvelle-Zélande qui avait tourné au vinaigre, avec la fameuse "affaire de la table de nuit"**. Heureuse coïncidence de l'histoire, c'est également jeudi qu'est paru aux éditions Fetjaine un livre intitulé Secrets de Troisième mi-temps*, qui revient avec force anecdotes sur ces instants de fête et parfois de débauche qui suivent les grands matches hexagonaux ou internationaux.

Même si l'ouvrage d'Alain Gex s'attarde surtout sur l'âge d'or des "Troisièmes mi-temps" (volontairement valorisées avec une majuscule), avec quelques grands noms du rugby français comme Amédée Domenech, Albert Ferrasse ou Jacques Fouroux, la tradition n'a pas totalement disparu. L'actuel sélectionneur des Bleus en personne le précise dans la préface de l'ouvrage : "je tiens cependant à rassurer les dubitatifs et les nostalgiques : les Troisièmes mi- temps perdurent et je suis le premier à m’en féliciter." Divisé en quatre parties, qui sont autant de notions indispensables de chaque Troisième mi-temps - la fraternité, la fantaisie, l'ivresse et le repos du guerrier -, l'ouvrage cuisiné aux petits oignons par un ancien journaliste de l'Agence France-Presse qui a couvert le rugby pendant 36 ans regorge d'anecdotes grivoises - à ne pas mettre entre toutes les mains - mais aussi d'histoires rocambolesques, dont voici quelques savoureux exemples.

Marc Lièvremont, 930

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Lièvremont et l'affaire de la poubelle. A la suite d'une défaite face à l'Ecosse (12-9), en février 1994, à Rennes, certains membres du XV de France, dont son futur sélectionneur Marc Lièvremont, s'amusent d'une bien étrange façon dans les rues bretonnes. Ils placent un "quidam éméché" (selon les termes utilisé a posteriori par Lièvremont ) dans... une poubelle.

"La poubelle dévale la chaussée pavée et maintient tant bien que mal sa course sous les rires des idiots. Elle bringuebale, prend de la gîte, de la proue, pour finir à grand fracas contre un poteau électrique. Le mec à l’intérieur n’a pas eu le temps de crier : il est désintégré puis extirpé de la gaine ayant éclaté, comme un fruit mûr, avec une fracture du crâne." L'histoire fait polémique mais les joueurs responsables ne sont condamnés qu'à un simple "rappel à l'ordre".

Wayne Shelford (930x620)

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Des Blacks en petite culotte. Lors d'un test automnal de 1986, le XV de France écrase (dans tous les sens du terme) la Nouvelle-Zélande et son capitaine néo-zélandais, Wayne Shelford (photo), qui a perdu deux dents et (presque) un testicule dans l'affaire. Après la raclée, il a tenté d'oublier...

"Derrière un rideau, un visage lourdement maquillé avec un rouge à lèvres fluorescent et un épais rimmel. Ses traits ne me sont pas étrangers. "Mais oui, mais c’est bien sûr", comme dirait l’inspecteur Bourrel : il s’agit de Wayne Shelford, l’homme aux bijoux de famille rafistolés, une énième bière à la main qui, en compagnie d’autres joueurs, travestis eux aussi, boit pour oublier..."

Jean-Baptiste Lafond (930x620)

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Lafond dans la piscine. En 1990, le Racing fête son titre à venir face à Agen en débouchant le champagne dès la mi-temps, à l'esbroufe, sur le bord de touche. Mais pour l'arrière francilien, Jean-Baptiste Lafond, la fête suivant la victoire (22-12) allait tourner court, en raison d'une chute.

"Se prenait- il pour Hercule dans la piscine du vestiaire pour papillonner avec le "bout de bois" au bout des bras ? Toujours est-il que Jean-Ba, le nouvel ami du président, a glissé puis vacillé sous les vingt- deux kilos du Bouclier, le vrai et non l’une des deux copies plus tard utilisées, par précaution. Il lui en a coûté trois agrafes sur une dizaine de centimètres, un pansement sur le haut du crâne – ce qui est la pire des punitions pour quelqu’un se revendiquant de symboliser "la lumière" –, des maux de tête et la plus importante des mi- temps, la quatrième, celle "du ring, du plumard et des gonzesses", ruinée."

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Polnareff au piano. Entre le banquet et l'officielle troisième mi-temps, le XV de France s'autorise une petite virée au bar du Royal Monceau lors d'un soir de Tournoi, "à la fin des années 1980". Les joueurs tombent alors nez à nez avec Michel Polnareff, inconnu aux yeux de certains...

"Le père de "La Poupée qui fait non" a finalement dit "oui" et entame "Love me, please love me"… Rémy Roufflard respire un bon coup et prend de la hauteur. Le show- biz, c’est son truc, et il s’en sort plutôt bien sur les cimes de la demande en amour, déclenchant des hourras nourris. Hélas, le deuxième morceau, "Le Bal des Lazes", est par trop délicat pour son timbre déjà secoué. Il perd ainsi pied dans les aigus. Compatissant, le chanteur vole alors à son secours, dirige le micro sur son menton et entreprend un récital." Au bout de vingt chansons, "Polna" stoppe son tour de chant tandis que les tournées continuent...

Le mâle dominant. En 1989, Dominique Bonnot, journaliste à L'Equipe et femme du spécialiste du rugby Pierre-Michel Bonnot, tente de s'inviter à un banquet d'après-match, exclusivement réservé à la gente masculine. Grimée en homme, elle sera rapidement démasquée.

"La journaliste n’aura pas le temps de compter les quarante- huit cariatides, soit quatre-vingt-seize tétons, se prélassant dans le plus beau salon, sans doute, de la capitale : à peine cinq minutes se sont-elles écoulées qu’"un cerbère" - un gentil garçon en fait, du nom de Jean-Claude Gavoux, homme à tout faire de "Tonton" (Albert Ferrasse ndlr) - vient gentiment prier "Victoria" de quitter la salle." Dans les "Troisièmes mi-temps" telles que décrites par Alain Gex, les femmes ne sont pourtant pas toujours "priées de quitter la salle"...

*Après avoir accusé des Néo-Zélandais, Bastareaud, touché à la tête, avait expliqué s'être cogné contre sa table de nuit.

**Secrets de Troisième mi-temps, d'Alain Gex, Ediitons Fetjaine, 315 pages, 18 euros.