Le Qatar, un "scandale humanitaire"

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et Simon Ruben , modifié à
TÉMOIGNAGE - Le footballeur Ouaddou dénonce les conditions de travail sur les chantiers au Qatar.

L’info. Selon des documents récupérés par le quotidien britannique The Guardian, auprès de l’ambassade népalaise à Doha, 44 ouvriers népalais qui travaillent sur les chantiers pour le Mondial 2022 sont morts entre le 4 juin et le 8 août derniers. Dans l’émirat, plus d’un millions de travailleurs immigrés vivent dans des conditions sanitaires alarmantes (pas d’accès à l’eau potable et insalubrité des habitats). L’organisation internationale du travail parle même d’esclavage moderne.

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5.000 à 6.000 morts d’ici 2022. L’article ne surprend absolument pas les responsables de la Confédération Syndicale Internationale (CSI). Cette organisation s’intéresse de près à ce dossier depuis plus de deux ans et a même récemment déposé plainte auprès de l’organisation internationale du travail. "Chaque année, 400 ouvriers meurent. Ces ouvriers n’ont pas de droits, ils n’ont pas de salaire minimum, ils n’ont pas non plus la possibilité de former un syndicat et ne peuvent pas quitter le pays sans l’accord de leur patron", raconte Tim Noonan, un dirigeants de la CSI. "Si rien ne change, 5.000 à 6.000 personnes pourraient mourir avant le Mondial 2022".

"Indigne d’un pays aussi riche". L’ancien footballeur Abdeslam Ouaddou connaît bien le problème. Cet ancien pensionnaire de Ligue 1 (Nancy, Rennes, Valenciennes) a passé deux ans dans un club qatari (Lekhwiya SC). Il a connu lui aussi des conditions de travail déplorables, à s’entraîner sous des chaleurs caniculaires sans pause. Mais pendant deux ans, il habitait en face des gigantesques chantiers. "J’ai vu des gens dormir sous 50°C, d’autres qui mangaient à même le sol", raconte-t-il pour Europe 1. "J’ai vu aussi des camps où les gens s’entassaient par centaines, avec des toilettes que je n’oserai même pas qualifier". Abdeslam Ouaddou s’est associé avec la Confédération Syndicale Internationale pour dénoncer ces pratiques (voir vidéo ci-dessous). "C’est difficilement imaginable pour l’un des pays les plus riches du monde".

Des intérêts financiers gigantesques. Le Qatar a prévu de dépenser des sommes colossales pour organiser la Coupe du monde de football en 2022. Près de 150 milliards d’euros d’investissements sont en jeu. Tous les grands pays veulent forcément leur part du gâteau et refusent dans le même temps de dénoncer ces conditions proches de l’esclavagisme. Même la France a voulu être associé à ce projet. L’entreprise Vinci travaille sur plusieurs chantiers d’envergure au Qatar et emploie près de 3.000 ouvrier, presque tous immigrés.

Réattribuer la Coupe du monde ? "Un pays qui ne respecte pas les droits de l’homme ne peut pas organiser une compétition aussi prestigieuse que la Coupe du monde", estime l’ancien footballeur Abdeslam Ouaddou. "C’est pour ça qu’on demande à la FIFA de réattribuer l’organisation du Mondial 2022". Pour le moment, cette hypothèse est totalement inconcevable. Les dirigeants de la FIFA envisagent seulement d'organiser la compétition en hiver pour épargner les joueurs.

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