Delaigue: "Il y a deux chefs..."

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Propos recueillis par SYLVAIN LABBE , modifié à
Tout au long de ce Tournoi des Six Nations 2011, Yann Delaigue portera pour notre site son oeil d'expert sur les performances et l'actualité du XV de France, lancé dans la défense de son Grand Chelem. Après l'annonce du quinze appelé à défier l'Italie samedi, à Rome, l'ancien ouvreur international estime que Marc Lièvremont évolue déjà dans une logique de Coupe du monde qu'il comprend, même s'il ne cautionne pas la mise en concurrence instaurée au poste de n°9.

Tout au long de ce Tournoi des Six Nations 2011, Yann Delaigue portera pour notre site son oeil d'expert sur les performances et l'actualité du XV de France, lancé dans la défense de son Grand Chelem. Après l'annonce du quinze appelé à défier l'Italie samedi, à Rome, l'ancien ouvreur international estime que Marc Lièvremont évolue déjà dans une logique de Coupe du monde qu'il comprend, même s'il ne cautionne pas la mise en concurrence instaurée au poste de n°9. "Un signe fort pour Chabal" "C'est le quinze de la continuité parce qu'on prend les mêmes 23. On a beaucoup reproché à Marc Lièvremont de beaucoup changer son équipe, là, pour le coup, c'est une stabilité forte qui prime. Sébastien Chabal reconduit après son match de Twickenham, est-ce que c'est légitime ? Je dirai : Oui et non. D'une part, c'est un signe fort pour Chabal que le coach continue à lui accorder sa confiance. C'est important psychologiquement pour le joueur. Quand on sait qu'un Chabal en pleine forme peut nous apporter la puissance dont on a besoin sur un match, ce serait dommage de le laisser en retrait à partir du moment où il l'a choisi, lui, et non pas Picamoles. D'autre part, je pense que Marc a pris en compte le fait que pour la première fois ses joueurs ont été sollicités ce week-end avec leurs clubs. Or, Chabal n'a pas joué avec le Racing (contre Bourgoin) et on peut considérer qu'il disposera de plus de fraîcheur pour l'Italie. Plus en tout cas que les autres, qui ont joué avec leur club... Bonnaire, lui, revient parce qu'il n'avait pas été titulaire face à l'Angleterre. Dusautoir est juste rentré en cours de match avec le Stade Toulousain, alors qu'Imanol est le seul à avoir disputé 80 minutes avec Biarritz. Je pense qu'il y a une gestion du physique de ces joueurs. Donc maintenir la confiance et physiquement faire souffler Imanol. Sans oublier que lorsqu'on reste sur une mauvaise prestation, on a forcément une soif de revanche..." L'exemple de l'Angleterre: "Savoir aller à l'encontre des critiques" "Marc Lièvremont choisit de conserver un groupe resserré et ne s'attarde pas aux performances match par match de ses joueurs, mais il préfère miser sur l'avenir en ne changeant pas son équipe au gré des bons ou des moins bons matches des uns ou des autres... Ça se tient. J'en veux pour exemple l'Angleterre qui, il y a un an, faisait de très mauvais matches jusqu'au dernier du Tournoi contre la France. Ce n'est pas pour ça que Martin Johnson a tout changé. Il a assumé les critiques tout en restant solidaire de ses joueurs et surtout têtu, mais dans le bon sens du terme, par rapport à ses convictions et à ses envies de rugby qu'il voulait pratiquer. Il faut des fois savoir aller à l'encontre des critiques extérieures pour stabiliser son groupe." "Déjà entré complètement dans la Coupe du monde" "On est déjà entré complètement dans la Coupe du monde et encore plus après cette défaite en Angleterre. Marc s'est projeté et recentré sur cet objectif Coupe du monde et sur le groupe auquel il veut donner confiance en leur répétant qu'ils sont les joueurs de la Coupe du monde. Aujourd'hui, il reconduit les mêmes pour bien travailler ensemble parce que du travail, il en faut pour arriver en pleine possession de nos moyens au coup d'envoi de la compétition. Il y aura la dimension physique, à acquérir au cours de la préparation, et puis il y a ces repères de jeu ensemble sur des matches de haut niveau. Or, il en reste très peu d'ici la Coupe du monde avec ces deux derniers matches du Tournoi et deux matches de préparation (face à l'Irlande). De ce point de vue-là, je peux largement comprendre ce souci de continuité." N°9: "Ça paraît normal que Parra soit vexé" "Morgan (Parra) est un compétiteur et ça paraît normal qu'il soit vexé. Maintenant, il a du respect à la fois pour ses coachs et pour Yachvili. C'est la loi du haut niveau d'être en concurrence avec les autres, mais si j'ai bien un point de divergence avec Marc (Lièvremont), c'est bien sur ce non choix. Ça m'inquiète parce qu'un n°9, c'est un leader de jeu, un leader de vestiaire, un leader de vie de groupe, un joueur qui touche peut-être 80 ballons par match, un joueur qui commande. La maîtrise sur ses avants et sur son équipe, on l'a toujours mieux quand on est indiscutable et indiscuté. Or, aujourd'hui, ce n'est pas tranché. Maintenant, ce n'est pas nouveau. Pour les joueurs, il y a deux chefs et il faut sans cesse s'adapter, avec deux styles différents en plus." Le piège italien: "Bien sûr, on doit gagner ce match" "Intrinsèquement, il n'y a aucun joueur italien que je remplacerai contre un joueur de l'équipe de France. De ce point de vue, sur les individualités, oui, bien sûr, on doit gagner ce match et ça ne fait aucun pli. Cela dit, un match de rugby, c'est aussi une dimension collective avec certaines valeurs basées sur la peur, l'envie et l'enthousiasme. Autant d'ingrédients qu'il faudra mettre samedi. Et puis, attention tout de même, si cette équipe d'Italie a lâché contre l'Angleterre, sur ces deux autres matches à domicile, face à l'Irlande et au Pays de Galles, ça n'est pas passé loin du tout. Et si l'équipe de France vient à avoir des passages à vide, ils sauront s'en servir... Alors ce n'est peut-être pas l'Angleterre, on est d'accord, mais il faut prendre ce match à l'endroit pour se faciliter la rencontre et s'éviter un grand pavé dans la mare..."