Bartoli: "J'ai une chance..."

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Propos recueillis par Régis AUMONT , modifié à
Marion Bartoli, tombeuse ce mardi de Svetlana Kuznetsova (7-6, 6-4) en quarts de finale de Roland-Garros, est une jeune fille heureuse. Heureuse car elle réussit cette année à bien jouer à Paris mais aussi parce qu'elle parvient enfin à communier avec son public. Opposée jeudi à Francesca Schiavone dans le dernier carré, la Française, en pleine confiance, estime qu'elle aura ses chances à condition de garder la même attitude.

Marion Bartoli, tombeuse ce mardi de Svetlana Kuznetsova (7-6, 6-4) en quarts de finale de Roland-Garros, est une jeune fille heureuse. Heureuse car elle réussit cette année à bien jouer à Paris mais aussi parce qu'elle parvient enfin à communier avec son public. Opposée jeudi à Francesca Schiavone dans le dernier carré, la Française, en pleine confiance, estime qu'elle aura ses chances à condition de garder la même attitude. Marion, vous aviez l'air tellement excitée avant de jouer le dernier point avant de gagner qu'on avait l'impression que vous alliez avoir une crise cardiaque... Mon battement de coeur est très lent, donc pour une crise cardiaque, il en faudrait plus que cela ! Après le match, je me suis dit : "je ne me suis jamais sentie aussi excitée que cela". J'ai tellement de sensations qui arrivent d'un coup, la foule, les vagues, la holà, ils criaient mon nom, ils me soutenaient. Voilà, quand je me suis dit : "ça y est, je suis là, chez moi, en demi-finale!" Enfin! On a l'impression que vous n'avez jamais été aussi heureuse que cela, aussi excitée, aussi impliquée dans votre tennis, aussi en phase avec le public. Oui, autrefois, ces quelques dernières années, je sentais la pression ici, mais de façon négative car je rentrais sur le court sans confiance. Pour être franche, je ne me sentais pas bien sur le court, ni en dehors des courts d'ailleurs. J'avais peur de la presse, de ce qu'ils allaient dire si je perdais le match, et ceci et cela. Alors que, cette année, je me suis dis : "Essaye d'en profiter, même si c'est difficile, car nous sommes françaises, nous voulons avoir de bons résultats ici, en France" mais je me suis dit : "si tu utilises cette foule justement pour mettre la pression sur l'adversaire ça va peut-être changer." Les trois premiers matchs pour moi ont été difficiles, mais je les ai gagnés en trois sets et à chaque fois c'était à l'arraché. Mais j'ai gagné peu à peu de la confiance et cela se voit aujourd'hui. Le match était très serré, je ne sais pas à combien on a fini mais je crois que la différence était toute petite, non ? "Je dois être très proactive entre chaque balle" Depuis quelques années, des gens se sont dit : "Marion ne devrait pas jouer de cette façon, ne devrait pas travailler avec cette personne. Elle ne réussira jamais si elle fait ceci ou cela." Aujourd'hui que signifie cette réussite d'arriver en demi-finale à Paris ? Vous voulez dire avant 2007 ou après ? Car pensez-vous vraiment que je ne devrais pas m'entraîner avec mon père ? Non mais que des personnes vous ont beaucoup critiquée quant à votre vision sur le tennis et avec qui vous vous entraînez. Franchement, si vous commencez à prendre une décision sur la base de ce que les autres pensent de vous, cela ne marchera pas. Je ne pense pas comme cela. Si vous écoutez tout le monde, vous ne prendrez jamais de décision car vous aurez cent points de vue différents, cent personnes qui vont vous dire "il faut faire ceci cela, jouer comme cela, comme ceci". Mais ça n'est pas eux qui se lèvent le matin et qui vont sur le terrain ! Je fais ce qu'il y a de mieux pour moi et pour l'instant je ne crois pas que vous puissiez dire que je n'ai jamais rien réussi. Entre les points, vous faites de nombreux gestes à vide et vous sautillez un peu avant de servir. Pouvez-vous nous expliquer cette routine ? Pourquoi faites-vous ce rituel ? Ce rituel, c'est pour rester concentrée sur ce que je dois faire. Il est très important pour moi de réussir à me débarrasser de la pression, je ne veux pas trop regarder les résultats, ce que fait l'adversaire. Je veux me concentrer sur moi-même et sur ce que je dois faire. Étant donné que la terre n'est pas ma meilleure surface, je dois être très proactive entre chaque balle. Ça n'est pas pareil sur du gazon ou du dur car je me sens mieux sur ces deux surfaces, alors qu'ici, et notamment à Roland-Garros, il est très important pour moi de rester concentrée sur ce que je dois faire et ne pas trop penser à tout ce qu'il y a à l'extérieur. "La première chose qui a changé, c'est mon attitude" La terre battue n'est pas votre surface favorite alors que pour Schiavone il s'agit de sa surface de prédilection. Pensez-vous que ce sera dur contre elle et si oui, à quel point ? Je crois qu'il faut apprendre de ce qui s'est passé autrefois, que vous soyez la gagnante ou que vous ayez perdu le match. En effet, je dois essayer de me souvenir de la manière dont on a joué ensemble avec Francesca. Je vais essayer d'en tirer quelque chose, de voir comment elle a joué contre moi pour essayer de tourner ceci en ma faveur et gagner le match. Je crois qu'elle me mène 4 à 1 en nombre de victoires. C'est vrai, sur la terre, ce sera différent, mais dans le tennis tous les jours sont différents. Cela fait un bout de temps que l'on n'a pas joué l'une contre l'autre, c'était il y a deux ans, ou peut-être un an (à Wimbledon en 2009, ndlr). Je pense que je me suis améliorée depuis. Je ne m'attends pas à un match facile, ça c'est vrai. Cependant, je crois vraiment que si je garde la même attitude, si je joue de la même façon, j'ai une chance. Cela ne veut pas dire que je vais gagner, mais au moins, j'aurai la possibilité de faire quelque chose. Etes-vous surprise d'arriver en demi-finale à Roland-Garros ? Si j'ai atteint les demi-finales c'est parce que je me suis améliorée sur terre battue. Cela est dû au fait que, depuis deux mois, je m'entraîne énormément sur cette surface. Je prends du temps pour travailler sur mon jeu de jambes, ma condition physique. Cela ne vient pas du jour au lendemain, mais j'ai tellement investi en travail de ce côté que cela m'aide à gagner des matches plus facilement. Vous n'êtes que la quatrième joueuse française à atteindre les demi-finales depuis le début de l'ère Open. Est-ce un aboutissement pour vous ? C'est d'abord beaucoup de fierté, c'est vrai, d'être parmi les quatre meilleures, mais Mary (Pierce) a gagné ici, elle a aussi atteint une autre fois la finale. J'aimerais bien aller en finale aussi. J'ai démarré au tennis club de Retournac avec 300 ou 400 licenciés, atteindre le plus haut niveau du tennis français est une grande fierté, bien sûr. Comment vous sentez-vous avec le public ? Qu'est-ce qui a changé par rapport aux autres années ? La première chose qui a changé, c'est mon attitude. J'ai beaucoup plus confiance en moi que les autres années. Avant, j'arrivais ici avec peu de confiance car j'avais gagné très peu de matches. Je subissais beaucoup plus le tournoi en me disant que ce serait encore terrible, que j'allais perdre très, très vite et en prendre plein la figure. Et puis cette année, je suis arrivée à atteindre la finale à Strasbourg avant d'être ici et cela m'a énormément aidée pour ma confiance. J'avais aussi très bien démarré l'année. Au fur et à mesure j'ai réussi à prendre de plus en plus de plaisir à montrer beaucoup de choses sur le terrain. Ici le public me soutient de façon fantastique et cela m'aide énormément.