Valérie a appris qu'elle était née d'un inceste : "Ça a brisé toute ma vie"

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Léa Beaudufe-Hamelin , modifié à
Depuis son enfance, Valérie avait une intuition : son père n’était pas son père. Il y a quelques années, elle a découvert qu’elle était née d’un inceste. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Valérie raconte comme elle a découvert que son vrai père était son grand-père maternel.
TÉMOIGNAGE

Valérie a toujours eu le sentiment d’être en marge de sa fratrie et que son père n’était pas son père. Pendant des années, elle a couru après la vérité. Un test ADN a finalement prouvé qu’elle avait raison. Puis elle a eu une révélation. Elle a découvert que son vrai père était son grand-père maternel. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Valérie partage son parcours de vie et raconte comment elle est parvenue à découvrir la vérité.    

"On est une fratrie de quatre enfants, je suis la dernière. Ma mère souffrait de maux de tête importants. On lui a découvert une tumeur au cerveau. Elle a été opérée. Elle est restée dans le coma, dans un état végétatif. Quand elle s’est réveillée, elle était tétraplégique. Elle a passé cinq ou six ans à l’hôpital. Mes grands-parents maternels étaient omniprésents pour mes frères et sœurs, mais moi j’avais l’impression que quelque chose ne collait pas.

" J’avais le sentiment que mon père n’était pas mon père "

Les grands-parents exerçaient comme une espèce de manipulation sur leur fille, comme s’ils dictaient sa vie, comme si on étouffait quelque chose. Moi, je me sentais en marge de la fratrie. J’avais le sentiment que mon père n’était pas mon père. Je ne savais pas comment l’expliquer. Personne ne me l’a dit. Ma grand-mère maternelle et mon père de substitution m’ont dit à la volée vers mes huit ou neuf ans : 'Tu n’es pas une bâtarde'.

Moi, je voulais la preuve. J’ai passé des décennies à courir après la preuve. Je n’ai jamais pu renoncer au fait de savoir. Il me fallait la vérité. C’était plus fort que moi. On voulait me faire taire. J’ai tout essayé, la délicatesse, la gentillesse, j’arrivais avec des questions bien précises. Quand j’allais trop loin, mon père m’attrapait par les vêtements et voulait me taper. Les années ont passé. Je n’avais plus aucun espoir.

" Mon père, c’était mon grand-père "

Je voulais faire un test ADN depuis longtemps, mais lui ne voulait pas. Je ne voulais pas que ça parte dans des extrêmes de violence, donc je renonçais. J’appréhendais qu’il meure du jour au lendemain et que ça soit trop tard pour moi. L’âge aidant, je l’ai presque obligé à faire le test. Ce n’est pas quelque chose dont je suis fière. Le test a révélé que je n’avais pas de lien de paternité avec lui. Ça a été un premier soulagement.

J’avais pris l’habitude d’écrire des passages de ma vie. Il y a deux ou trois ans, j’étais en train d’écrire et j’ai eu comme un flash, une révélation : mon père, c’était mon grand-père. J’ai balancé le crayon. J’étais dans un état second. J’ai pris ma voiture, je suis allée voir mon père. Pour la première fois de ma vie, je n’étais pas dans l’interrogation. Quand je lui ai demandé, il n’a pas nié. J’étais en colère, mais je n’avais pas une colère explosive.

" D’autres ne se seraient pas relevés "

Ça a brisé toute ma vie. Je me suis élevée toute seule. Les grands-parents ont élevé les trois autres enfants. Moi, j’ai été mise en foyer jusqu’à mes 18 ans. Ils se sont débarrassés de moi. Je n’ai pas grandi avec eux. Je ne les connais pas, ils ne me connaissent pas. Je n’ai pas de liens avec eux. Je ne les aime pas. Ce sont des étrangers. Je ne veux pas les connaître. Ils sont à l’identique des grands-parents.

Mon père est mort au mois de décembre et je ne l’ai pas intégré. S’il mourait, je ne pouvais plus connaître la vérité. Je courrais après sa vie. J’ai tout fait pour le tenir vivant. Je travaille sur le fait d’intégrer qu’il soit mort. Je n’arrive pas encore à l’acter. Je travaille seule. Je trouve que je ne m’en sors pas trop mal. Je n’ai pas à me plaindre. D’autres ne se seraient pas relevés. Il ne faut pas laisser les choses en suspens, donc je m’y atèle. 

Je me suis construite toute seule. J’ai construit mes croyances et mes idées. Pour moi, elles sont viscérales. Je n’y renoncerai jamais. Il faut rester fidèle à ses principes et ses croyances. Je reste convaincue que l’on est pas obligé d’aimer sa famille, que l’on ne doit rien à personne, même à ses propres parents. On n’est pas tous originaires d’une famille bienveillante et aimante, et l’on doit composer avec tout ça."