"Je crois qu'on ne sortira jamais de cette pièce où on était le 7 janvier, même si on continue de vivre, de faire le journal, de faire plein de choses, on sera toujours dedans", a notamment confié le directeur de "Charlie Hebdo". 3:00
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Dans son nouvel ouvrage, Une minute quarante-neuf secondes, le directeur de Charlie Hebdo livre un récit intime de l’attaque terroriste du 7 janvier 2015. Il était samedi l'invité de Patrick Cohen, sur Europe 1.
INTERVIEW

"Je crois qu'on ne sortira jamais de cette pièce où on était le 7 janvier". Dans son ouvrage Une minute quarante-neuf secondes, qui vient de paraître aux éditions Actes Sud / Les Echappés, Riss, le directeur de Charlie Hebdo, livre un récit intime de l’attaque terroriste du 7 janvier 2015 contre le journal satirique. Invité samedi de C'est arrivé cette semaine, sur Europe 1, il nous a confié sa difficulté, toujours actuelle, de vivre avec le souvenir de l'attaque.

"On n'a pas envie d'abandonner ceux qui étaient là"

"Quand on est tout le temps en train de ressasser les mêmes choses, on se demande si on n'est pas en train de les inventer. Je me suis trouvé dans un hôpital militaire, où il y avait des victimes de troubles post-traumatiques, et je me suis dit que peut-être, ça allait me tomber dessus un jour, que j'allais me réveiller un matin et que je ne saurais plus qui je suis", confie Riss. 

"Je crois qu'on ne sortira jamais de cette pièce où on était le 7 janvier, même si on continue de vivre, de faire le journal, de faire plein de choses, on sera toujours dedans. Peut-être que l'on n'a pas envie d'abandonner ceux qui étaient là autour de nous. C'est difficile de les quitter", explique le directeur de Charlie Hebdo.

"Je les entends toujours, je les vois parler, je les entends rire"

Dans son ouvrage, Riss raconte notamment que le jour de l'attaque, il a détourné le regard pour ne pas voir les cadavres de ses collègues. Il s'en explique. "J'avais compris ce qu'il s'était passé, voir ce spectacle ne m'aurait rien apporté de plus. La mort, c'est un moment d'intimité. Je n'aurais jamais dû être là, à leurs côtés, pour leurs derniers instants. J'avais l'impression de violer une intimité, je ne les ai pas regardés pour préserver cette intimité", développe-t-il sur Europe 1. "Je les entends toujours, je les vois parler, je les entends rire. Ils sont toujours un peu avec nous", poursuit-il.

Dans son livre, Riss raconte aussi comment il a perdu le goût de la fiction, des tentatives de représenter la violence, dans le cinéma notamment. "Je les trouve dérisoire. Toutes ces pétarades" ne représentent pas "les émotions", qui sont "indescriptibles". Raison pour laquelle il préfère les mots aux dessins pour évoquer le drame du 7 janvier. "C'est impossible de dessiner ça", assure-t-il. Et d'enchaîner : "De la même manière que je n'ai pas voulu voir certaines choses, je n'ai pas voulu les dessiner".