REPORTAGE - "Quand j'étais petit, il se passait beaucoup plus de choses à Mourenx", explique Corentin, 20 ans

© Théo Maneval / Europe 1
  • Copié
Théo Maneval, édité par Grégoire Duhourcau , modifié à
EN DIRECT DE MOURENX, JOUR 5 - Si la jeunesse de Mourenx dresse un constat sévère sur sa ville, certains se veulent résolument optimistes et espèrent voir la commune regagner en vitalité. REPORTAGE - "Quand j'étais petit, il se passait beaucoup plus de choses à Mourenx", explique Corentin, 20 ans

>> Toute la semaine, deux reporters d'Europe 1 posent leurs valises à Mourenx, une commune de 7.000 habitants située dans les Pyrénées-Atlantiques. Le but ? Vous donner la parole et entendre vos problématiques quotidiennes. Retrouvez nos reporters en direct de Mourenx tous les jours à 7h12, dans les journaux de la matinale ainsi que ceux de Raphaëlle Duchemin et Pierre de Vilno entre 12h et 14h et de Matthieu Belliard de 17h et 20h.

Comment la jeunesse de Mourenx imagine-t-elle sa vie ? Son avenir ? Son rôle ? Le constat qu'elle dresse sur sa commune est en tout cas sévère. C'est celui d'une ville, comme beaucoup d'autres, qui a perdu de sa vitalité, qui ne donne plus forcément envie de rester.

"Les gens sont devenus tristes." Corentin a 20 ans. Il a grandi ici, joué dans le club de football de Mourenx. Aujourd'hui, il est surveillant au lycée, et il a l'impression que tout le monde est usé. "Quand j'étais petit, il se passait beaucoup plus de choses à Mourenx. Je me souviens, surtout au foot, on avait un club, ça vivait. Le dimanche le terrain était rempli de supporters tout autour. Là, il n'y a plus personne qui suit le club, ils n'ont plus d'argent. Un déplacement c'est une demi-heure ou une heure de route et l'essence aller-retour, ça y fait. Ça ne donne pas envie de sortir. Les gens sont devenus tristes. Je pense que les Français ont pris un coup au moral", confie-t-il sur Europe 1.

>> De 7h à 9h, c’est deux heures d’info avec Nikos Aliagas sur Europe 1. Retrouvez le replay ici

Et même à 15, 16 ans aujourd'hui, on a déjà conscience de ça, conscience des difficultés que peuvent vivre les parents et d'un fossé avec le monde politique. Anaëlle est en première, elle connait les noms d'Emmanuel Macron, Edouard Philippe, Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon... Mais pour elle, ce sont eux qui ne connaissent pas le monde dans lequel elle vit : "Ils ne comprennent pas trop la vraie vie. Mes parents ont une vie qu'ils n'ont jamais eue je pense. Eux, ils ne vont pas travailler tous les jours tout en faisant attention à ne pas trop dépenser. Donc je ne vois pas trop comment ils peuvent faire pour comprendre ce dont on a besoin."

Esteban veut "réussir (sa) vie" en restant à Mourenx. Si beaucoup de jeunes ont effectivement quitté Mourenx, où étaient installés leurs parents, il reste des motifs d'espoir. A commencer par un attachement très fort de certains à cette ville, à son côté familial, la proximité entre les gens. Esteban, élève en seconde, sait qu'il travaillera ici, et pas ailleurs. Il a l'intention de travailler "dans les usines" de chimie, nombreuses à Mourenx. "Il y a beaucoup de travail à trouver", assure-t-il. Et concernant son avenir, il espère "réussir (sa) vie, avoir des enfants, être bien payé, avoir une maison et vivre pas loin de chez (sa) famille". Il y a donc encore des choses à faire à Mourenx, même s'il est vrai que le taux de chômage atteint les 22%.

Il ne manque pas grand chose pour réenchanter la jeunesse de cette ville. Ça commence peut-être par l'élection du Conseil Municipal des Jeunes, qui va bientôt avoir lieu. Il y a plein de candidats et de candidates, comme Maïssa, qui ont dix ou onze ans. D'autres ont terminé leur mandat, comme Lisa 14 ans, et montrent tout leur optimisme, leur envie de s'engager les uns pour les autres : "J'ai l'espoir de faire quelque chose pour tous les habitants de Mourenx." Elle pense notamment à "des concerts, surtout pour les plus jeunes parce qu'il y a surtout des concerts pour les grands". Si Lisa pouvait faire venir un artiste, ce serait "Soprano, parce qu'il fait de bonnes chansons".

"Il faut toujours rester optimiste." "Il faut s'impliquer dans quelque chose. Moi, ça m'a beaucoup apporté. On a fait beaucoup de projets solidaires comme la banque alimentaire, une récolte de jouets pour les personnes en difficultés. On voit la vie autrement que ce qu'on voyait avant d'être impliqué. La solidarité est très importante, il faut toujours rester optimiste", explique-t-elle.

L'optimisme dans la bouche des enfants de dix, onze ans, à Mourenx. On espère que qu'il perdurera au fil des années. Parce que la réalité à 18-20 ans, c'est que l'avenir, pour beaucoup, est souvent ailleurs, dans les grandes villes voisines, à Pau, Bordeaux ou Toulouse. C'est aussi tout l'enjeu des politiques publiques pour ce genre de territoires, sur l'enseignement, les transports, le développement économique. Comment faire pour éviter qu'une ville comme Mourenx ne devienne plus qu'une ville de "seniors" ?