Réforme des retraites : le soutien revendiqué de la mairie de Paris au mouvement social est-il légal ?

Le soutien revendiqué de la mairie de Paris au mouvement contre la réforme des retraites a fait jaser.
Le soutien revendiqué de la mairie de Paris au mouvement contre la réforme des retraites a fait jaser. © Capture d'écran Twitter @Anne_Hidalgo
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Romain Rouillard
En affichant deux banderoles de soutien au mouvement de contestation contre la réforme des retraites, la mairie de Paris a déclenché un tollé dans les rangs de la macronie. Certains juristes pointent même le caractère illégal de ces banderoles qui contreviendraient au principe de neutralité que doivent observer les municipalités. Europe 1 fait le point.

De part et d'autres des anneaux olympiques, qui trônent sur le parvis de la mairie de Paris en attendant les JO de 2024, deux banderoles, d'une dizaine de mètres de haut, ont récemment fait une apparition remarquée. On peut y lire le message "Mairie solidaire avec le mouvement social" en écriture blanche sur fond bleu roi. À travers ces quelques mots, la municipalité parisienne de gauche clame haut et fort son soutien à la contestation populaire contre la réforme des retraites. Si cette prise de position a déclenché l'ire du camp présidentiel, elle est également considérée comme illégale par certains juristes. Mais est-ce vraiment le cas ? 

"Il existe en effet un principe de neutralité qui s'applique au service public. Au point que le Conseil d'État a étendu ce principe aux édifices publics en 2005", rappelle à Europe 1 Thibault Mercier, avocat au barreau de Paris. La plus haute juridiction de l'ordre administratif considère en effet que ce principe "s'oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes symbolisant la revendication d'opinions politiques, religieuses ou philosophiques". 

"On ne voit pas trop quel est l'intérêt local de ces banderoles" 

"On estime que tout signe ou message politique suggère une activité de propagande", reprend Thibault Mercier. Et de rappeler que la moindre décision municipale, y compris celle consistant à hisser une simple banderole, doit répondre d'une volonté des administrés. "Or, dans ce cas précis, on ne voit pas trop quel est l'intérêt local de ces banderoles", estime-t-il. 

Selon cet avocat, ce message de soutien est donc "illégal" sur le plan juridique, bien qu'il n'ait rien d'inédit. "Il n'est pas rare de voir des municipalités afficher leur soutien à la cause LGBT ou aux réfugiés par exemple", note Thibault Mercier. Concrètement, il est donc possible de traduire en justice la mairie de Paris, mais la procédure a peu de chance d'aboutir. "Le temps que la décision de justice soit prise, les banderoles auront été retirées", fait remarquer l'avocat.

La mairie de Paris réagit 

Contacté, Emmanuel Grégoire, Premier adjoint à la Mairie de Paris bat en brèche ces accusations. "La mairie centrale n'est pas une mairie au sens juridique du terme contrairement aux mairies d'arrondissement. De plus, la continuité du service public a été parfaitement assurée à Paris, il n'y a eu aucune fermeture", se défend-il avant de réaffirmer un soutien ferme et définitif au mouvement social. "C'est une position que nous assumons entièrement. Cela révèle de la liberté d'expression. Le sujet des banderoles est un débat absurde qui révèle que le gouvernement est bien moins à l'aise avec ce genre de message lorsqu'ils vont à l'encontre de leurs positions."