Jean-Pierre Ricard 1:33
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avec AFP , modifié à
Une des figures de l'Église de France, le cardinal Jean-Pierre Ricard, 78 ans, est "mis en cause" dans des signalements de violences sexuelles. Ex-archevêque de Bordeaux de 2001 à 2019, cardinal depuis 2006, Mgr Jean-Pierre Ricard avait reconnu une conduite "répréhensible" envers une mineure de 14 ans, il y a 35 ans.

À la tête du diocèse de Bordeaux, Jean-Pierre Ricard avait affronté dans la deuxième moitié des années 2010 la première vague de révélations sur les agressions sexuelles dans l'Eglise en encourageant la haute hiérarchie catholique à dénoncer les faits. Il est aujourd'hui également mis en cause. À nouveau, une figure de l'Eglise est rattrapée par le scandale. Et pas n'importe laquelle. Ex-archevêque de Bordeaux de 2001 à 2019, cardinal depuis 2006, président de la Conférence des évêques de France (CEF) de 2001 à 2007, Mgr Jean-Pierre Ricard, 78 ans, a reconnu une conduite "répréhensible" envers une mineure de 14 ans, il y a 35 ans.

La nature et le détail des faits non dévoilés

L'annonce a été faite par l'actuel président de la CEF Eric de Moulins-Beaufort, qui n'a dévoilé ni la nature, ni le détail des faits dont s'incrimine l'ex-prélat aujourd'hui retiré dans un presbytère des Alpes-de-Haute-Provence, à Peyruis, une région où il a des liens familiaux. Commis il y a 35 ans alors qu'il était en poste à Marseille, les faits sont vraisemblablement prescrits mais leur révélation illustre toutes les ambigüités de la haute hiérarchie du catholicisme français face aux abus sexuels commis dans l'Église.

En 2016, au plus fort de la tempête autour de l'ex-archevêque de Lyon Philippe Barbarin, accusé de ne pas avoir dénoncé à la justice des abus sexuels commis par un prêtre dont il avait pourtant eu connaissance, le cardinal Jean-Pierre Ricard avait eu des mots sans équivoque mais qui résonnent étrangement à la lumière des actuelles révélations. "Quand il y a une accusation, soit il faut que la famille porte plainte, soit il faut inviter le prêtre lui-même à se dénoncer, ou bien l'évêque a un devoir de faire un signalement au procureur de la République", avait-il déclaré à la presse en insistant sur les cas concernant les mineurs.

Depuis "une petite vingtaine d'années nous avons pris conscience de la gravité de ces actes avec cette volonté de prendre véritablement en considération la souffrance des victimes" qui "ont besoin que les choses soient dites et que les responsables soient sanctionnés et condamnés", avait-il ajouté.

Une "bonne personne", un "homme débonnaire"

En 2017, Mgr Ricard avait en outre signalé à la Justice l'ex-évêque de Dax en raison d'"attitudes pastorales inappropriées" envers des jeunes, selon les termes de la CEF. Celui-ci avait été contraint à la démission mais le parquet local avait classé l'affaire sans suite. Mgr Ricard est également membre de la Congrégation pour la doctrine de la foi qui reçoit les signalements d'abus commis par les clercs.

Visage rond et physique à l'avenant, le cardinal Ricard est décrit par un ancien collaborateur du diocèse de Bordeaux comme une "bonne personne", un "homme débonnaire", "ouvert et accueillant" qui aimait sillonner les 593 paroisses dont il avait la charge. À la tête de la CEF, il avait plaidé pour que l'Eglise catholique s'investisse dans les questions de société: bioéthique, protection de l'environnement, défense de la famille ou "déséquilibres" de la mondialisation.

Une carrière essentiellement au diocèse de Marseille

En tant que numéro un des évêques de France et comme archevêque de Bordeaux, il avait eu aussi à gérer les épineuses relations avec le courant intégriste des prêtres lefebvristes qui avaient choisi d'occuper une église de la capitale girondine. Né en 1944 à Marseille, ce fils d'un secrétaire général de la Chambre de commerce et d'industrie locale fait son hypokhâgne dans un grand lycée de la cité phocéenne avant d'entrer au Grand séminaire puis à l'Institut Catholique de Paris.

C'est à Marseille qu'il fera l'essentiel de sa carrière en occupant une dizaine de postes à tous les niveaux du diocèse, de 1970 à 1993, avant d'être nommé évêque de Grenoble de 1993 à 1996 puis évêque de Montpellier jusqu'à ce que le pape Jean Paul II le nomme en 2001 archevêque de Bordeaux-évêque de Bazas. À deux années de sa "retraite" de cardinal, Mgr Ricard est l'un des quatre cardinaux français à pouvoir siéger dans le Collège cardinalice susceptible d'élire un nouveau pape.