Bernard Preynat encourt 10 ans d'emprisonnement. 1:40
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avec AFP , modifié à
Au dernier jour du procès de Bernard Preynat, la procureure de la République a requis vendredi une peine d'emprisonnement "qui ne soit pas inférieure à huit années" pour les multiples agressions sexuelles commises sur de jeunes garçons par l'ex-prêtre de 74 ans. La justice rendra sa décision le 16 mars. 

La procureure de la République a requis vendredi à l'encontre de l'ex-prêtre Bernard Preynat une peine d'emprisonnement "qui ne soit pas inférieure à huit années" pour les multiples agressions sexuelles commises sur de jeunes garçons pendant deux décennies.

Ce dossier "stupéfiant", "grave", "effrayant", "mérite une réponse pénale ferme qui ne peut s'arrêter au bénéfice de l'âge", a lancé Dominique Sauves, au dernier jour du procès de cet homme de 74 ans.

Des victimes âgées de 7 à 15 ans

Bernard Preynat, qui avait déjà été "réduit à l'état laïc" (déchu de sa qualité de prêtre) l'été dernier à l'issue de son procès canonique, encourt 10 ans d'emprisonnement.

Ses victimes étaient âgées de 7 à 15 ans à l'époque des faits, en grande majorité prescrits. Seulement dix d'entre elles ont pu se constituer parties civiles. Lors du procès, elles ont fait le récit, glaçant et poignant, des attouchements, baisers sur la bouche et masturbations que le prêtre leur imposait.

Ces agressions sexuelles ont eu lieu entre 1971 et 1991 dans la paroisse de Sainte-Foy-Les-Lyon, près de Lyon, et lors de camps à l'étranger, au sein d'un groupe de scouts indépendant dont le prévenu était le vicaire-aumônier. Le religieux, très dynamique et charismatique, faisait alors l'admiration des parents du diocèse qui lui confiaient leurs enfants.

Ce procès "a une vertu pour la justice, la société, l'Église"

Une famille avait dénoncé ses abus en 1991 au cardinal Decourtray, l'archevêque de Lyon à l'époque, et Preynat avait été déplacé dans la Loire après une mise à l'écart de six mois. Il a pu y poursuivre son ministère pendant 24 ans, y compris au contact d'enfants. Aucune autre agression n'a été mise au jour par la suite, le prévenu assurant n'en avoir commis aucune.

Ce n'est qu'en 2015 que plusieurs anciens scouts ont brisé l'omerta de l'Église en portant plainte contre Preynat, permettant la tenue de ce procès des dizaines d'années après les faits.

Co-fondateur de l'association de victimes La Parole libérée, François Devaux n'a pas voulu commenter les réquisitions du procureur - "ce n'est pas mon rôle" - mais a jugé devant la presse ce procès "brillant par l'esprit de communion et la dignité qui s'en est dégagée". Il a permis, selon lui, de montrer "la reconstruction des victimes, même trente ans après". A ce titre, le procès "a une vertu pour la justice, la société, l'Église", a-t-il dit devant la presse.

La décision sera rendue le 16 mars

Le tribunal correctionnel rendra son jugement le 16 mars. Assurant que l'ancien curé, défroqué l'été dernier à l'issue de son procès canonique, "a conscience du mal qu'il a fait", Me Frédéric Doyez, l'avocat de la défense, a appelé le tribunal à prendre une décision qui le remette "dans la communauté des hommes, à une place qui est celle que l'on occupe quand on a 74 ans et qu'on est malade".

Les derniers mots de l'audience ont été pour le mis en cause qui a lu un texte à la barre. "Je suis venu devant le tribunal avec le désir d'être loyal dans la reconnaissance des agressions dont j'ai été l'auteur", celles qui ont pu être jugées et "toutes les autres" tombées sous le coup de la prescription, a dit Bernard Preynat. "Je n'ai pas menti. J'ai été sincère dans les réserves que j'ai exprimées" sur certaines accusations. "Ma demande de pardon, je la réitère du fond du coeur car je regrette sincèrement ma recherche de plaisir sexuel dans des gestes condamnables", a-t-il ajouté.

"Je m'excuse auprès des victimes, de leurs familles, des autres prêtres, du diocèse et de toute l'Église que j'ai salie par mes agissements", a poursuivi le prévenu en réaffirmant que "depuis 1991", il a été "fidèle à la promesse faite à Mgr Decourtray", l'archevêque de l'époque, en ne touchant plus aucun enfant.