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Au procès de Charlie Hebdo, l'émotion des premiers témoignages de rescapés

Chloé Triomphe et Justin Morin, édité par Ugo Pascolo avec AFP . 2 min

Au cinquième jour du procès des attentats de "Charlie Hebdo", certains rescapés de cette tuerie ont été appelés à la barre pour livrer leurs témoignages ce mardi. C'est notamment le cas de Corinne Rey, alias "Coco", dessinatrice pour l'hebdomadaire. 

"J'ai pensé mourir exécutée." Après avoir revu la veille les images de la tuerie de Charlie Hebdo , la Cour d'assises spéciale de Paris a replongé ce mardi dans la "barbarie" avec les premiers témoignages des survivants, "marqués à jamais" par ce drame, au cinquième jour du procès des attentats de janvier 2015. Parmi les témoins appelés à la barre, Corinne Rey, alias "Coco", dessinatrice pour le journal. D'une voix posée mais délicate, toute en émotion retenue, mains jointes sur le pupitre, elle est revenue sur cette matinée du 7 janvier.

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"Après les tirs, un silence de mort"

Tout en cherchant ses mots, elle décrit la montée dans l'escalier de la rédaction sous la menace des deux terroristes, le digicode de la porte d'entrée tapé dans une détresse absolue, la détermination et l’excitation perceptible des frères Kouachi alors qu'ils touchaient au but. "On veut Charb", répétaient-ils, "armés jusqu'aux dents". Dès l'entrée dans les bureaux, les terroristes tirent sur Simon Fieschi, webmaster de l'hebdomadaire. L'aîné, Saïd, monte la garde dans l'entrée, quand le cadet, Chérif, se rue vers la salle de réunion. Corinne Rey court, elle, se cacher sous un bureau.

"Je tremblais, on entendait les tirs", explique la dessinatrice, comme tétanisée. "Après les tirs, il y a eu le silence, un silence de mort. J'avais l'impression qu'ils allaient finir le travail avec tous ceux qu'ils n'avaient pas eu dans la salle" de rédaction. À la barre, "Coco" décrit ensuite les images, comme des instantanés gravés dans son esprit. "J'ai vu les jambes de Cabu. Wolinski ne bougeait plus. J'ai vu Charb : le côté de son visage était d'une pâleur extrême. Riss était blessé, il m'a dit : 't'inquiètes pas Coco'", relate-t-elle.

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"Je me suis sentie coupable"

Sur les bancs de la salle d'audience comme dans les box vitrés où se trouvent une partie des 14 accusés, jugés pour leur soutien aux frères Kouachi et à Amédy Coulibaly, tueur de l'Hyper Cacher, un lourd silence s'est abattu. Corinne Rey, en larmes, reprend son souffle. "Je me suis sentie impuissante. C'est l'impuissance qui est le plus dur à porter dans ce qui s'est passé. Et je me suis sentie coupable", livre-t-elle, expliquant avoir parfois eu l'impression de "ramener un monstre à la maison".

"J'ai mis du temps à comprendre que ce n'est pas moi la coupable là-dedans. Les seuls coupables, ce sont les terroristes islamistes. Les Kouachi, ceux qui les ont aidés, et tout ceux qui baissent leur froc devant l'islamisme", lâche-t-elle finalement. 

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Des récits comme des étapes de la "reconstruction psychologique" 

Outre Coco, deux autres rescapés ont livré leur témoignage à la barre, avec la même émotion. "Nous venons d'entendre trois personnes qui ont été absolument admirables de dignité", juge au micro d'Europe 1 Me Jean Chevrais, avocat de la défense. "C'étaient des récits absolument émouvants, ça fait partie de la reconstruction psychologique et la justice va les reconnaître comme des victimes à part entière. Ça, ça fait partie de la guérison." Le reste des auditions des survivants de l'attentat contre Charlie Hebdo se poursuivra mercredi.