Pourquoi nous ne sommes pas égaux face à la sensation de froid

© PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP
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C'est un constat que l'on peut faire tous les jours, et plus encore en cette période de froid glacial : certaines personnes sont plus frileuses que d'autres !

Tandis que certains refusent de quitter leur écharpe alors qu’ils travaillent à côté du radiateur, d’autres ne ressentent même pas le besoin d’en enfiler une à l’extérieur. Tout le monde peut faire le constat autour de soi : nous ne sommes pas tous égaux face au froid ! Ou plutôt, face à la sensation de froid. Mais pourquoi de telles différences ? 

Les femmes désavantagées par rapport aux hommes

Deux des principaux facteurs sont la masse musculaire et les hormones. Les muscles produisent de la chaleur lorsqu’ils se contractent et cela entraîne mécaniquement une baisse de la sensation de froid. Les hormones peuvent perturber la manière dont le système nerveux perçoit la température extérieure. La testostérone, tout particulièrement, inhibe la sensation de froid, en bloquant certains récepteurs dans le cerveau.

Ces deux raisons expliquent, en partie, pourquoi les femmes, moins pourvues en testostérone et majoritairement moins dotées en masse musculaire, apparaissent souvent plus sensibles au froid. En 1998, par exemple, des chercheurs de l’université de l’Utah (États-Unis) constataient que la température moyenne des mains des femmes était inférieure à celle des hommes d’environ deux degrés. "Les hommes ont aussi un métabolisme de base plus élevé – c’est-à-dire qu’ils dépensent davantage d’énergie quand leur corps est au repos", complète le chercheur en anatomie clinique Adam Taylor, dans un article sur The Conversation.

Des différences de métabolisme

Il n’empêche, certains hommes sont plus frileux que certaines femmes. Et deux personnes aux taux d’hormones identiques et possédant la même masse musculaire n’ont pas nécessairement le même ressenti face au froid. Car notre capacité de résistance au froid dépend également de notre métabolisme, qui dépend lui-même, en partie, de notre patrimoine génétique.

"Nos cellules vont utiliser en permanence toute sorte de molécules carbonées pour faire différentes transformations. Quand nos cellules fonctionnent, elles oxydent des substrats à partir de l’oxygène que nous inhalons. Et quand on oxyde des substrats, il y a inévitablement une partie de l’énergie d’oxydation qui est perdue sous forme de chaleur", explique dans Sud Ouest Daniel Ricquier, professeur de biochimie au sein de la faculté de médecine de l’université Paris-Descartes.

" Ça dépend de l’activité intrinsèque de nos enzymes. C’est le patrimoine de chacun qui détermine ça "

"Donc des gens peuvent oxyder plus ou moins rapidement telle ou telle molécule et cela explique les différences de production de chaleur dans une situation normale. […] Ça dépend de l’activité intrinsèque de nos enzymes. C’est le patrimoine de chacun qui détermine ça", poursuit le chercheur au CNRS.

Une hypothèse qui peut s’expliquer par la capacité d’adaptation de notre corps… et de nos gènes. Ainsi, plus on est habitué à vivre dans le froid, plus notre corps s’habitue. Et le constat semble se transmettre entre les générations : le corps des Inuits, par exemple, génère naturellement trois fois plus de graisse sous-cutanée que la moyenne, ce qui leur permet de hausser leur température corporelle.

À noter que plus l’on vieillit, plus notre corps élimine de la graisse "brune", celle que l’on a à la naissance et qui compense notre faible masse musculaire. Ainsi, les personnes âgées, qui perdent souvent en masse musculaire, ont bien plus froid que les nourrissons.

Quel rôle pour le mental ?

La fameuse phrase "c’est dans la tête" est-elle donc dénuée de sens ? Pas totalement. L’être humain dispose de récepteurs de froid dans la moelle épinière mais aussi dans l’hypothalamus cérébral, au cœur du cerveau. Et ce dernier ne fonctionne pas pareil chez tout le monde : chez certaines personnes, le cerveau ne transmet pas la bonne information que lui envoie le corps, lui donnant l’impression que la température monte ou baisse alors que ce n’est pas le cas. Le manque de sommeil, la fatigue en général, le stress ou même la tristesse peuvent accentuer ce phénomène.

Peut-on changer la donne ?

Difficile de changer son métabolisme ou même son taux d’hormone. Si vous êtes plus frileux que les autres, le meilleur conseil est donc de rester en mouvement autant que possible. Un muscle inactif ne créera pas de chaleur. Et une simple marche permet de transformer votre masse musculaire en source de chaleur.

Selon Dimitra Gkika, du laboratoire de physiologie cellulaire de l'université de Lille (Nord), interrogée par France 2, certains aliments sont aussi susceptibles "d’augmenter la thermogénèse", de compenser votre déficit de production d’énergie : le gingembre, le poivre, le café ou le thé par exemple. Si ce n’est pas tout à fait de votre goût, vous pouvez vous consoler en regardant la météo : dès jeudi, les températures devraient drastiquement se remettre à grimper dans l’Hexagone.