Pourquoi les reconduites à la frontière sont-elles en chute libre ?

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G.S. , modifié à
Les reconduites à la frontière ont diminué de 19,8% sur les six premiers mois de l'année. 

La pression migratoire s'accentue mais le nombre de reconduites est en baisse. Depuis janvier, les expulsions de clandestins ont en effet concerné 2.000 individus de moins que sur la même période l'an dernier, selon un document du Département des statistiques, des études et de la documentation (DSED), rattachée au ministère de l'Intérieur. Les reconduites à la frontière ont ainsi diminué de 19,8% sur les six premiers mois de l'année, selon des chiffres révélés par le Figaro vendredi. Une baisse qui s'explique, selon le ministère, par un durcissement des contrôles aux frontières.

Moins 13% de retours forcés. "Le cumul 2016 des 'retours' (un étranger est reconduit dans son pays d'origine), 'réadmissions' (il est reconduit dans son pays d'entrée dans l'espace Schengen) et autres 'renvois' (un ressortissant d'un pays de l'espace Schengen est reconduit chez lui) a concerné 8.660 illégaux du 1er janvier au 30 juin 2016, contre 10.800 étrangers en situation irrégulière éloignés durant la même période" l'an dernier, écrit le quotidien. Une tendance qui tranche avec celle de l'année précédente : plus de 17.000 reconduites à la frontière avaient été effectuées en 2015, contre 15.253 en 2014, avait annoncé en octobre dernier le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve.

Dans le détail, toujours selon les chiffres du Figaro, les "retours" ont concerné 4.849 personnes (- 16,8%), les "réadmissions" 1.862 (- 35,4%) et les renvois 1.949 (- 6,9%). "Les retours forcés, qui traduisent en principe le mieux la volonté du gouvernement de faire respecter la législation, ont décliné de plus de 13%", précise encore le quotidien.

Comment expliquer ces chiffres ? Pour le journal, "les forces de l'ordre, déjà très sollicitées en cette période d'état d'urgence, sont littéralement submergées par l'afflux de clandestin".Les policiers étant moins mobilisés pour reconduire les clandestins, cela entraînerait un diminution des retours, selon le quotidien. "La pression migratoire aux frontières a en revanche explosé, principalement celle avec l'Italie (+ 287% de 'non-admissions' depuis janvier)", note en effet Le Figaro.

Le ministère de l'Intérieur, qui ne conteste pas ces chiffres, offre cependant une grille de lecture différente. Selon Place Beauvau, c'est parce que le contrôle aux frontières s'est renforcé que le nombre de retours diminue, mécaniquement. Ceux qui sont directement refoulés à la frontière n'ont, en effet, pas besoin d'être reconduits. "Cette action permet de refuser l'entrée sur notre territoire à des personnes qui ne disposent pas du droit d'y séjourner" "et qui, si elles avaient pu parvenir à le rejoindre, auraient pu faire l'objet de mesures d'éloignement", détaille le ministère à l'AFP.

La police a ainsi refoulé 23.900 migrants qui voulaient entrer en France au premier semestre 2016, contre 6.189 durant les six premiers mois de l'année 2015, selon DSED. "La hausse du nombre de non admissions est ainsi beaucoup plus significative que le tassement du nombre d'éloignements", affirme-t-on Place Beauvau, assurant que "la lutte contre l'immigration clandestine, bien loin d'être en recul, s'intensifie".