Jour du dépassement : les ressources fournies par la Terre en un an déjà englouties

C’est la première fois depuis des décennies qu’un recul de la date du jour du dépassement de la Terre est observé.
C’est la première fois depuis des décennies qu’un recul de la date du jour du dépassement de la Terre est observé. © FREELANCEIMAGES / UNIVERSAL IMAGES / UIG / SCIENCE PHOTO LIBRARY VIA AFP
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Alexandre Dalifard et Caroline Baudry / Crédit photo : FREELANCEIMAGES / UNIVERSAL IMAGES / UIG / SCIENCE PHOTO LIBRARY VIA AFP
En ce mercredi 2 août 2023, le monde a atteint le jour du dépassement. Cet indicateur, calculé chaque année par l'ONG Global Footprint Network et l’Université de York à Toronto au Canada, informe la date à laquelle l'humanité a consommé l'ensemble des ressources que la nature est capable de produire en l'espace d'un an.

Le jour du dépassement de la terre, c’est ce mercredi 2 août selon le calcul réalisé par l’ONG Global Footprint Network et l’Université de York à Toronto au Canada. Cela signifie que l’humanité a consommé l’ensemble des ressources que la terre est capable de générer en une année. Les humains consomment donc l’équivalent d’1,7 planète par an et vivent à crédit à partir de ce mercredi. L’année dernière, ce jour tombait un peu plus tôt, le 28 juillet. C’est la première fois depuis des décennies qu’un recul de la date est observé. Une lueur d’espoir.

Une amélioration en trompe l'œil

Sur ces cinq jours de gagnés, quatre sont liés aux données affinées pour réaliser le calcul titanesque. Par exemple le CO2 émis par rapport à ce que la terre peut absorber, le poisson pêché comparé à ce que la mer est capable d'offrir. Mais l’humanité gagne tout de même 24 heures dans cette estimation symbolique. "On est dans une stagnation depuis une dizaine d’années, ce qui est plutôt une bonne nouvelle, oui. On a grignoté une planète au cours de ces 40 années, et là on la grignote moins. Il y a quand-même une augmentation assez forte au niveau mondial de la consommation d’énergie renouvelable", indique Jean-Louis Bergey, expert à l’ADEME, l’agence publique de transition écologique.

En revanche, selon François Gemenne, professeur et membre du GIEC, groupe d'experts indépendants sur le climat, cette amélioration n'est qu'un trompe-l'œil. "En réalité, sur ces cinq jours, quatre jours sont dus au changement de méthodologie. Donc en réalité nous avons gagné un jour. Mais c'est quand même une bonne nouvelle puisque depuis quelques années, nous parvenons à stabiliser cette date du jour du dépassement alors qu'au cours de notre année, nous avions tendance à l'avancer de plus en plus", souligne le spécialiste au micro d'Europe 1. Mais pour lui, seul un jour de dépassement daté au 31 décembre permettrait de voir le verre à moitié-plein.

Le jour du dépassement au Qatar est à la mi-février

Concrètement, ce jour du dépassement est un indicateur relativement arbitraire qui prend en compte l'ensemble des ressources, sans faire véritablement de différence entre elles, mais qui a néanmoins une double utilité. D'une part, cela permet de voir l'évolution dans le temps. Ensuite, l'indicateur offre la possibilité de comparer les différents pays entre eux. "On constate que si le 2 août, c'est la date globale du jour du dépassement selon les différents pays, cela reste très varié. Au Qatar, c'était mi-février et en France, c'est autour du 5 mai. Et donc, grâce aux pays plus pauvres, qui ont une date aux alentours de novembre ou de décembre, la moyenne au niveau mondial se fixe au-dessus", explique François Gemenne.

Comme tous les pays industrialisés, la France a construit son développement sur l'exploitation des ressources naturelles et des énergies fossiles en particulier. Donc, malheureusement, comme tous les pays industrialisés, l'Hexagone a une date du dépassement qui se trouve dans le premier semestre de l'année.

Réformer le bâtiment en France

Mais pour tenir la feuille de route fixée par les experts du GIEC, il faudrait gagner 19 jours par an sur les sept prochaines années. Cela n'est pas impossible selon Melinda Rolo de l’ONG France Nature Environnement, seulement si les décisionnaires politiques se fixent des objectifs concrets, notamment dans le bâtiment en France. "Avoir une véritable plan de rénovation énergétique du bâti, et notamment du bâti ancien, qui est celui qui consomme le plus où on a de véritables passoires énergétiques", souligne-t-elle au micro d'Europe 1. L'autre piste selon elle serait d'abandonner les dizaines de projets routiers du pays, qui détruiraient des terres naturelles ou agricoles.