Le 25 juillet 1995, l'attentat de Saint-Michel a fait 8 morts et 117 blessés, dont Noëlle Szczepanski. (Photo d'illustration) 1:46
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Marion Dubreuil, édité par Ugo Pascolo , modifié à
Alors que se tient ce mercredi la première Journée national d'hommage aux victimes du terrorisme en France, Noëlle Szczepanski, victime de l'attentat de Saint-Michel en 1995, a accepté de témoigner au micro d'Europe 1. De ses souvenirs de l'événement à un quotidien marqué par le traumatisme, elle se livre et donne son avis sur le regard que la société lui porte. 
TÉMOIGNAGE

Le 11 mars sera désormais une Journée nationale d'hommage. Ce mercredi, Emmanuel Macron va présider à Paris, aux côtés du roi d'Espagne, la cérémonie de la première Journée nationale d'hommage aux victimes du terrorisme en France ainsi qu'aux Français frappés à l'étranger. Désormais, chaque année, cette même date verra se tenir cette cérémonie au Trocadéro, afin de ne pas heurter des victimes en mettant l'accent sur un attentat plutôt qu'un autre. Une date qui est loin d'être choisie au hasard, puisque le 11 mars voit déjà se tenir Journée européenne des victimes du terrorisme.

>> Au cours de cet hommage, des médailles seront remise à 99 personnes, une forme de reconnaissance pour les victimes. "La cérémonie a été co-construite avec neuf associations de victimes", précise l'Elysée, qui veut "n'oublier aucune victime depuis 1974", date de l'attentat de Carlos au Drugstore Publicis. Même si cette Journée nationale ne fait l'unanimité auprès de toutes les victimes, une association de l'attentat de Nice ayant annoncé un boycott, elle est plébiscitée par une large majorité. C'est notamment le cas de Noëlle Szczepanski, blessée comme 116 autres personnes dans l’attentat du RER B de Saint Michel, le 25 juillet 1995, qui a également fait 8 morts, a accepté de se confier au micro d'Europe 1. 

"Comme toutes les victimes qui sont en vie, je suis culpabilisée"

"J'étais à quelques mètres de la bombe, j'ai failli brûler vive dans cet attentat, j'ai un stress post-traumatique important. Malheureusement, je dois le dire, j'en suis ressortie vivante. Comme toutes les victimes qui sont en vie, je suis culpabilisée. Et 25 ans plus tard, c'est toujours la même chose : quand il y a une difficulté, vous revenez au point zéro, c'est-à-dire l'attentat, c'est impossible d'oublier. 

Alors oui, cette Journée nationale est quelque chose d'important. C'est une reconnaissance, parce qu'il faut savoir que lorsqu'on est victime du terrorisme, on s'en va dans l'oubli par la suite. L'attentat de Saint-Michel a d’ailleurs été totalement oublié alors qu'il a fait 8 morts et 200 blessés [117 blessés, ndlr], il y a 25 ans. Là, on va nous remettre une médaille, parfait, je ne critique pas. Quand on fait quelque chose, j'applaudis des deux mains, le débat n'est pas là. Mais il ne faut pas oublier le quotidien, c'est-à-dire l'handicap qui suit cet acte de terrorisme. Et je trouve qu'il y a là un grand manquement de la part de l'État. 

J'espère que les victimes n'auront plus maintenant à vivre ce parcours du combattant, j'ai mis 10 ans pour m'en sortir. D'autant qu'à chaque nouvel attentat, c'est comme si j'étais dedans, les deux pieds pataugent dans le sang, c'est instinctif. Vous revivez tout, vous revoyez tout, on ne peut pas lutter. 

En France on est sensible sur le coup, mais après on n'en a plus rien à faire

J'espère qu'il n'y aura plus jamais d'attentat, c'est un poison violent pour la société, et l'un n'efface pas l'autre. Qu'il ait eu lieu il y a 15 jours ou il y a 10-20-30 ans, ça reste un attentat. En France on est sensible sur le coup, mais après on n'en a plus rien à faire. On regarde les victimes comme un fardeau, et d'un seul coup, vous gênez la société. Que les Français respectent au moins décemment les victimes, n'oubliez pas et ne nous oubliez pas."