"Grand débat national" : que vont devenir les cahiers de doléances ?

cahier de doléances
Tous les cahiers de doléances vont être remontés en préfecture d'ici vendredi. © VALERY HACHE / AFP
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Mathilde Belin , modifié à
Les cahiers de doléances mis à disposition après la crise des "gilets jaunes" ont été remis en préfecture. L’État devrait les recevoir en version numérisée d’ici un mois.
ON DÉCRYPTE

Un chapitre du "grand débat national" s'est fermé mercredi : les Français ne peuvent plus déposer en mairie leurs contributions libres dans les cahiers de doléances mis à disposition. Que va-t-il advenir désormais de ces contributions ?

Les cahiers remis en préfecture

Les 10.000 mairies qui avaient mis à disposition depuis mi-janvier un cahier de doléances ont désormais jusqu’à vendredi pour les remettre aux préfets. Les préfectures vont ensuite faire une copie de chacun de ces cahiers, et transmettre les copies d’ici le 25 février à la Bibliothèque nationale de France (BNF). Toutefois, les cahiers ne seront pas physiquement envoyés à la BNF : "Les cahiers de doléances resteront en préfecture le temps du grand débat", souligne la Mission du "grand débat national" à Europe 1.

Numérisation et classement à la BNF

La BNF va effectuer, avec des prestataires, un travail de numérisation et de classement des cahiers de doléances. "On va numériser une partie des documents liés au 'grand débat national', dont tous les cahiers de doléances" à partir des copies faites en préfecture, explique à Europe 1 Patrick Belaubre, délégué à la communication à la BNF. Selon un ordre de grandeur donné par le gouvernement à la BNF, celle-ci devrait traiter environ 500.000 pages, issues des cahiers de doléances mais aussi des courriers et des contributions d’institutions, de syndicats, etc.

Les pages écrites de façon manuscrite seront transcrites par la BNF, et celles dactylographiées seront océrisées, c’est-à-dire transformées en fichier texte. "Le but est d’harmoniser tous les documents. Avec un plan de nommage, un classement, par date et par département, afin qu’il y ait une certaine organisation, pour s’y repérer", détaille Patrick Belaubre.

L’ensemble des documents numérisés sera ensuite transmis à l’État, mais ils seront également conservés par la BNF. "En revanche, ils ne seront pas consultables (à la BNF), car ils ne seront pas rentrés dans notre base de données. On a un rôle de conservation simplement", insiste Patrick Belaubre. La BNF s’est donnée un délai de quatre semaines pour traiter les 500.000 pages attendues. 

Un travail d'analyse et de synthèse

Une fois ce travail de numérisation achevé, une phase de remontée et d’analyse va s’ouvrir. Les documents seront transmis à l’État qui les donnera pour analyse à un consortium de trois prestataires, spécialisés dans le traitement des données de masse. "Plusieurs synthèses seront faites à partir des contributions libres, mais aussi des contributions en ligne", explique la Mission du grand débat.

L’analyse des doléances est attendue pour la fin du "grand débat", mais une première analyse intermédiaire devrait être réalisée par l’entreprise de sondages Opinion Way, à partir des données issues de la plateforme en ligne.

Quid de l’archivage ?

À terme, l’ensemble des contributions au "grand débat" - cahiers de doléances, courriers postaux, courriels, contributions en ligne, etc. - seront consultables sur Internet. "D’ici la fin du grand débat, les documents numérisés seront consultables en ligne", de même que les contributions en ligne, précise la Mission du "grand débat". Un nouveau site web dédié à ces contributions, distinct de celui qui les recueille, pourrait alors être créé.

Mais des représentants des Archives nationales ont plaidé dans la presse pour conserver les cahiers de doléances dans leurs archives. "L’ensemble des contributions citoyennes au 'grand débat', qu’elles soient sur support papier ou numérique, constituent bien des archives publiques. Elles ont donc vocation à être archivées, pour conservation pérenne, par le réseau des services publics d’archives", a déclaré au magazine professionnel Archimag Françoise Banat-Berger, cheffe du service interministériel des archives de France (Siaf), la plus haute autorité archivistique française. L’Association des archivistes français estime également que les cahiers de doléances devront être conservés dans les archives publiques, comme cela a été fait pour ceux de 1789

Selon Françoise Banat-Berger, les cahiers de doléances pourraient être archivés dans les archives départementales, et les contributions numériques versées aux Archives nationales. Mais de l’aveu même de la Mission du "grand débat national", on reconnaît que la question de l’archivage des cahiers de doléances n’a pas encore été tranchée.

Si les cahiers de doléances sont désormais clos en mairie, il reste encore la possibilité de déposer sa contribution en ligne, sur le site officiel du grand débat, jusqu’au 15 mars. Selon la Mission, la plateforme a franchi mardi le cap du million de contributions.