Lors des différentes nuits de violences urbaines, plusieurs écoles ont été incendiées. (Illustration) 1:51
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Louise Sallé / Crédit photo : GAUTHIER BEDRIGNANS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
Depuis le début des émeutes, près d’une centaine d’établissements scolaires ont connu des dégradations dans le pays. Dans la nuit de jeudi à vendredi, au plus fort des violences, une soixantaine d’écoles ont ainsi été incendiées, vandalisées, saccagées ou pillées. Lundi, une dizaine d’établissements ont gardé leurs portes closes.
REPORTAGE

Des souvenirs calcinés… C’est le cas dans deux écoles à la Verrière dans les Yvelines, près de Trappes. Une école élémentaire a intégralement brûlé mercredi soir, ainsi qu’une bonne partie de l’école maternelle voisine. En tout, 200 élèves se retrouvent sur le carreau. D’après la mairie, une vingtaine de classes à remettre sur pied, cela représente près de 20 millions d’euros d’investissements. En attendant, les élèves sont accueillis dans un établissement scolaire voisin et dans une salle municipale.

Des tas de cendre à ciel ouvert, seuls restes des salles de classes

Sous un ciel radieux, deux pans de mur noircis se font face. Le plafond a disparu. Des restes de tables et de chaises calcinées jonchent le sol à ciel ouvert. Des trousses et des cahiers réduits en cendre surgissent parmi les décombres, tandis que flotte toujours, près d’une semaine après le drame, une forte odeur de brûlé.

"On distingue encore le bureau du professeur, et le tableau numérique qui a quasiment fondu", constate Nicolas Dainville, maire de La Verrière. "J'ai ramassé quelques dessins d'enfants que j’ai affiché dans mon bureau, pour ne jamais oublier ce qui s'est passé", confie-t-il. Les élèves sont répartis dans deux établissements voisins, comme le fils de Mustapha, en classe de CM2. "J'ai préféré ne pas montrer à mon fils son école brûlée", déclare amèrement ce parent d’élève. "J'ai vu des mamans pleurer, et des enfants pleurer", ajoute-t-il.

"Mon cartable, ma trousse…"

"J'étais là toute la soirée de l'incendie", poursuit Mustapha. "J'ai appelé les pompiers qui m'ont dit : 'on est coincé, on ne peut pas accéder, il y a des barricades partout'", raconte-t-il. "Une jeune fille, scolarisée en CM1, m’a répété dix fois "mon cartable, mon cartable…". Je lui ai dit "ne t'inquiète pas", mais elle a continué "mon cartable, ma trousse…", décrit le père de famille.

À quelques pas de là, une école maternelle a connu le même sort même si davantage de murs sont restés debout. À l’intérieur, dans la salle de motricité où sont installés des tapis et des jeux d’équilibres couverts de suie, Kader, animateur de la ville, est ému jusqu’aux larmes. "On dirait que le temps s’est arrêté, il y a encore un parcours de mobilité", s’exclame-t-il interloqué. "On voit qu'ils ont essayé de fouiller… Pour voler quoi ? Des jouets de bébé ? C'est une vision d'horreur", lâche Kader. "Quand je vois ça, je n'ai pas de mots… J'ai travaillé dans cette école, c'est barbare".

"Ils m'ont fait vriller"

"C'est ma classe qui a malheureusement cramé", déplore une assistante maternelle qui récupère ce qu’il reste de carnets à dessin. "Je suis en arrêt de travail, je suis en dépression", complète-t-elle. "Ils m'ont fait vriller, ils n’auraient pas dû toucher aux écoles, car on ne touche pas aux écoles".

Face au choc, une cellule psychologique à la mairie accompagne le personnel et les familles. À la rentrée, les 200 écoliers devraient être accueillis dans une "École régionale de premier degré", un internat qui accueille des enfants issus de familles en difficulté, également située à la Verrière, mais pas dans le même quartier… Une navette devrait être mise à disposition pour assurer le transport des enfants matin et soir.