Pourquoi le dôme de chaleur au Canada est "une surprise, y compris pour les spécialistes"

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Pauline Rouquette , modifié à
Alors que la Colombie-Britannique a battu plusieurs records de chaleur au Canada, le climatologue Jean Jouzel, invité d'Europe 1 samedi, a affirmé que le phénomène est survenu de manière plus rapide et plus intense que prévu. L'expert estime qu'il faut commencer à s'habituer à ces phénomènes, le réchauffement climatique étant "inéluctable".

"Ça dépasse ce que les spécialistes attendaient en termes de températures aussi rapidement", affirme Jean Jouzel. Invité d'Europe 1, samedi, le climatologue et ancien vice-président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) a expliqué que les chaleurs extrêmes ressenties en Amérique du Nord font partie de ce que les scientifiques "anticipaient il y a une trentaine d'années, en termes d'événements climatiques extrêmes, plus fréquents, plus intenses, en termes d'accélération, de l'élévation du niveau des mers, de rythme, et de réchauffement climatique".

Néanmoins, précise l'expert, "ça va plus vite, c'est plus intense, et ça couvre géographiquement une zone très étendue. Donc oui, c'est une surprise, y compris pour les spécialistes."

Faut-il s'attendre à de telles températures en Europe ?

Si la zone géographique impactée par ce réchauffement climatique est plus étendue que ce que les scientifiques avaient prévu, la France, et plus largement l'Europe de l'Ouest, pourraient-elles être bientôt sujettes à de telles températures ? "Il y a deux ou trois ans, un article de mes collègues de Météo France évoquait des températures au delà de 50°C en France", répond le climatologue, évoquant des températures allant jusqu'à 52-53°C, mais de façon ponctuelle, et "plutôt pour l'après 2050".

Toutefois, pour l'instant, "on n'évoque pas du tout ces températures dans le contexte actuel en Europe de l'Ouest", précise-t-il. "Cela devrait néanmoins nous faire saisir l'urgence de lutter contre le réchauffement climatique."

"Il faut commencer à s'habituer"

Dans tous les cas, ajoute Jean Jouzel, "le réchauffement climatique est inéluctable" et "il faut commencer à s'y habituer". Alors que le monde a les yeux rivés sur l'objectif de limitation du réchauffement planétaire à 1,5 °C, fixé depuis l'Accord de Paris en 2015, le climatologue affirme, samedi, que l'"on va forcément prendre au moins un degré, et battre, assez fortement et de façon assez régulière, les records de chaleur". Une mise en garde qui rejoint celle formulée par l'ONU, en mai dernier, qui prévoit que cette limite de 1,5°C sera atteinte d'ici 2025. "Les extrêmes climatiques, les vagues de chaleur continueront à devenir plus intenses, plus fréquentes", poursuit Jean Jouzel.

Alors que le commandant Cousteau parlait à l'époque d'une action pour la planète en faveur des futures générations, l'ex vice-président du Giec, lui, précise que l'échéance est dépassée. Ceux qui vont souffrir du réchauffement climatique, en 2050, ce ne sont pas les futures générations, "ce sont les jeunes d'aujourd'hui. Ils seront là."