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Comment l'intelligence artificielle bouleverse-t-elle la production des smartphones et ordinateurs ?

Raphaël Fernandez-Lopez . 3 min
Pourquoi le prix des smartphones va-t-il augmenter ?
Pourquoi le prix des smartphones va-t-il augmenter ? © Firdous Nazir / NurPhoto / NurPhoto via AFP

Les prix de la RAM et du SSD explosent sous la pression de l’IA, qui accapare une part massive de la production. Les fabricants priorisent ces clients très rentables, créant une pénurie pour le grand public. Résultat : hausse des prix ou produits moins performants, avec une pénurie attendue en 2026.

Le marché de la téléphonie mobile, déjà soumis à une forte concurrence et à des cycles d'innovation rapides, se prépare à une nouvelle secousse majeure. La hausse inéluctable des prix des smartphones et des PC prévue pour 2026. Cette augmentation, loin d'être un simple ajustement conjoncturel, trouve sa source dans la flambée du coût d'un composant essentiel, la mémoire vive (RAM). 

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La RAM : d'un coût marginal à un facteur d'explosion

Historiquement, le coût des composants de mémoire (RAM, SSD) dans la fabrication d'un smartphone représentait une part gérable, oscillant entre 5 et 15% de sa valeur totale (un peu plus pour un PC). Cependant, cette proportion a déjà bondi pour atteindre 10 à 20% et, selon les estimations, pourrait connaître une croissance supplémentaire de 50% dans les mois à venir.

Comme nous l'explique Renaud Kayanakis, associé du cabinet 2023 Conseil, cette envolée aura un impact direct sur les stratégies des fabricants : "Quand je m'appelle Xiaomi et que j'ai des marges faibles, je n'ai qu'une chose à faire, c'est augmenter mes prix". Pour les géants de la tech comme Apple, la réponse sera plus stratégique. "Les produits qui étaient plutôt 'low cost', je vais arrêter de les produire, au profit des produits plus chers". La pénurie et la hausse des prix de la RAM obligent ainsi les constructeurs à revoir leur catalogue et leur grille tarifaire.

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L'IA : le nouveau client gourmand en mémoire

Mais pourquoi cette mémoire, dont la demande semblait relativement stable, voit-elle ses prix exploser ? La réponse réside dans la loi de l'offre et de la demande, exacerbée par l'émergence de nouveaux acteurs aux besoins colossaux, les mastodontes de l'IA.

La production de ces composants critiques est entre les mains de seulement trois acteurs majeurs à l'échelle mondiale : Samsung, SK Hynix et Micron. Cette faible concentration rend le marché très sensible aux variations de la demande.

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En phase 2 de cette dynamique, on trouve des géants comme NVIDIA et OpenAI qui ont d'ores et déjà "signé pour plus de 400 milliards de dollars d'acquisition d'éléments de mémoire, donc de RAM et SSD". Les besoins en puissance de calcul et en stockage de l'IA sont tels qu'ils surpassent et absorbent une part croissante de la production.

Face à cette nouvelle donne, la stratégie des producteurs de mémoire est claire et guidée par la rentabilité. Samsung, par exemple, réorganise ses lignes de production. Cette réaffectation des ressources au profit des clients de l'IA, plus rentables, crée mécaniquement une pénurie des composants destinés aux appareils traditionnels. "C'est-à-dire que Samsung délaisse des lignes de production de la RAM à destination des tablettes PC et mobiles pour aller servir ces nouveaux clients qui ont des besoins exponentiels et qui sont plus rentables", souligne Renaud Kayanakis.

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Les conséquences pour le consommateur final

Tous les segments du marché, des smartphones d'entrée de gamme aux ordinateurs haut de gamme, seront touchés. Pour le consommateur, l'impact pourrait se manifester de deux manières. Soit par l'augmentation directe des prix. Pour maintenir la marge ou simplement compenser le coût du composant. Soit par la dégradation du produit à prix égal. Pour éviter une hausse de prix trop visible, les fabricants pourraient être tentés de réduire la quantité de mémoire intégrée. 

Renaud Kayanakis prévient que l'on risque de se retrouver avec des PC équipés de "barres de mémoire juste suffisantes pour faire tourner un Windows 11". L'impact n'est alors pas sur le prix payé, mais sur la performance et l'obsolescence potentielle du produit. "Du point de vue du consommateur, je ne vois pas d'impact prix, mais je n’ai pas le même produit.", résume notre expert.

Vers une stabilisation du marché ?

Cette crise de la mémoire est le reflet d'une stratégie de constructeurs en faible concentration face à une demande explosive. L'espoir d'une stabilisation du marché repose sur deux scénarios principaux : le plafond de l'IA dont le marché énergivore devra, à un moment donné, heurter un plafond, ses besoins en mémoire ne croissant plus de manière exponentielle. Ou bien, l'émergence de nouveaux acteurs. Avec une telle croissance de la demande et un oligopole de trois fournisseurs, la question de l'entrée de nouveaux compétiteurs se pose. Si les barrières techniques sont immenses, de nouveaux acteurs pourraient potentiellement émerger pour aller absorber la demande.

Ce qui est certain, en revanche, c'est que "sur 2026, on va assister à une pénurie", selon Renaud Kayanakis. Le cycle de l'offre et de la demande est déséquilibré, et en attendant que la courbe exponentielle trouve sa stabilité ou qu'une nouvelle concurrence se manifeste, la hausse des prix des appareils électroniques grand public est désormais un scénario hautement probable.