Comment la #NuitDebout tient-elle… debout ?

Nuit Debout
© C.Cieslinski
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Charlotte Cieslinski , modifié à
Pas de leader, pas de structures, et pourtant, le succès ne s'essouffle pas. Comment les "Nuit debout" s'organisent-elles ? 
REPORTAGE

Depuis le 31 mars, ils sont des centaines de rêveurs, chaque soir à se retrouver pour une "Nuit debout" place de la République, pour imaginer collectivement une révolution citoyenne. Dénués de leader, ces rassemblements débutent à 18 heure par une assemblée générale géante puis se prolongent tard dans la nuit, sans débordement. En coulisses, des bénévoles veillent à maintenir cette atmosphère pacifique et joyeuse. Europe 1 est allé passer la nuit avec ce mouvement naissant qui s'inspire du fonctionnement des Indignés espagnols. 

Combler les petits creux. Il est minuit, un fumet d’oignons frits embaume la place de la République. Sous une tente, une immense gamelle aimante les badauds et fait tenir debout ceux qui en sont à leur cinquième nuit blanche. Un peu plus tôt à 18 heures, heure des assemblées générales quotidiennes, la "cantine" des "Nuit debout" était prise d’assaut. Tenue par des bénévoles, elle comble les petits creux, monnayant un sourire ou quelques pièces. Maya est l’une de ces volontaires. Depuis le début du rassemblement, cette chercheuse franco-libanaise est venue d'elle même prêter main-forte pour que ces nuits insolites se déroulent sans débordements.


Les visages de la Nuit Deboutpar Europe1fr

Assurer la sécurité de tous. Le mouvement met un point d’honneur à ne pas se choisir de leader. Mais en coulisses, des bénévoles dépensent leur énergie pour faire survivre le mouvement. Sans se connaître au préalable, ces anonymes de toutes sensibilités se sont spontanément rassemblés en comités dès les premiers jours. Le comité restauration est celui qui a le plus de visibilité sur la place, mais d’autres tout aussi utiles, œuvrent plus discrètement. Camille - le surnom que s’attribuent beaucoup de ces bénévoles, en hommage aux zadistes - appartient par exemple au comité Sérénité. Il veille à ce que des casseurs ou des groupuscules violents ne viennent pas perturber les échanges et les rencontres. "Pas toujours évident, mais on se défend", sourit ce grand brun de 32 ans, éducateur spécialisé.

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Permettre de réellement débattre. A l'infirmerie, des étudiants infirmiers mais aussi un médecin ou un kiné se succèdent. "On a eu une jeune femme qui a eu les cotes cassées, ce week-end, pendant les évacuations", nous confie une énième Camille. Mais le noyau de toutes ces commissions, c’est celle qui s'appelle commission "démocratie". Modestement installé au pied d’un petit poteau au pied de la statue de la République, il est le premier visible à la sortie du métro. Ici, on discute Constitution, on s'invective et on imagine le futur. Camille, 25 ans, porte un sarouel beige et un pull rayé. Elle s’occupe parfois des débats pendant les "AG", surveille les temps de parole de chacun - 2 minutes pas plus !-, et indique inlassablement comment fonctionne le micro à ceux qui s'adressent à l’assistance. Face à elle, quelques nouveaux venus révisent les codes pour s’exprimer en assemblée : mains en l’air pour approuver, en croix pour dire non etc.


Les visages de la Nuit Deboutpar Europe1fr

Periscope, le rassembleur virtuel et réel. Lundi soir, ils étaient encore des dizaines de milliers sur Internet à rêver d’une révolution citoyenne en suivant la "Nuit debout" en direct sur Periscope. 80.000 personnes dimanche soir, 36.000 lundi soir : cette vidéo tournée en direct depuis un smartphone suscite un engouement fou, et fait venir chaque soir de nouvelles personnes place de la République. En quelques jours, Remy Buisine qui tient ce live, est devenu un rassembleur virtuel et réel. Sur son direct, il reçoit chaque soir des centaines de messages d'encouragement de la part d'internautes de toute la France. Encore une autre façon, de maintenir le mouvement debout.