Trois semaines après, Chanteloup-les-Vignes a retrouvé un calme précaire

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Justin Morin, édité par Maxime Dewilder , modifié à

REPORTAGE - Il y a trois semaines, l'incendie du chapiteau de Chanteloup-les-Vignes avait mis en lumière les difficultés de cette ville des Yvelines. Après le choc et l'émotion, Europe 1 est retournée sur place pour prendre le temps de se plonger dans le quotidien des habitants de la Cité de la Noé.

C'était il y a trois semaines. Le chapiteau de Chanteloup-les-Vignes, dans les Yvelines, était détruit lors d'un incendie. Europe 1 est retournée sur place, après le choc et l'émotion, pour prendre le temps de se plonger dans le quotidien des habitants de la Cité de la Noé et comprendre comment on a pu en arriver là.

Il est 17h30, place du Pas, au cœur de la cité. La nuit tombe mais l'éclairage public ne fonctionne plus, régulièrement cassé par les dealers. Pour les habitants, l'atmosphère du quartier change alors radicalement. "On est totalement dans le noir, on ne voit rien. On ne sait pas s'il y a des jeunes cachés dans un coin, on ne voit strictement rien. C'est un problème de sécurité de ne pas avoir de lumière en hiver. Il y a un danger ! A 17h30, je suis chez moi et je ne sors plus", confit une riveraine.

"Une petite partie impose sa liberté par la violence"

Cette habitante n'est pas la seule. Près de la gare RER, les habitants qui reviennent du travail marchent à tâtons, obligés de s’éclairer au téléphone pour rentrer chez eux. Et une fois qu'ils y sont, ils y restent car à la tombée de la nuit, le trafic de drogue commence. L'enjeu pour les dealers, c'est de maintenir cette obscurité pour opérer tranquillement. A chaque fois que l'éclairage a été réparé, il a été cassé à nouveau. Des techniciens en intervention se sont même fait agresser. Depuis, le prestataire ne veut plus intervenir. 

Les autorités décrivent un trafic essentiellement local. On est loin de ce qu'on appelle "une plaque tournante" mais c'est suffisant pour perturber la vie de toute la cité, précise la maire Les Républicains Catherine Arenou : "Il y a une population qui souffre au quotidien d'une petite partie qui impose sa liberté par la violence et les exactions. Ce n'est pas tolérable".

Plus inquiétant encore pour la ville de Chanteloup-les-Vignes, ce sentiment très ancré que les vrais délinquants, hors système, peuvent mobiliser les plus jeunes et les faire basculer, lors d'une nuit de violence comme lors de l'incendie du chapiteau, un centre des arts de la scène et du cirque inauguré en 2018. Avec les réseaux sociaux, tout va très vite, le moindre incident peut prendre des proportions énormes, témoignent plusieurs interlocuteurs sur place.

"Il faut venir nous parler, on n'est pas des sauvages"

Mais dans le même temps, quand vous parlez à ces jeunes du cauchemar que vivent les riverains, eux n'en ont pas du tout conscience. Ils font valoir qu'ils ne sont pas du tout écoutés par la municipalité : "Les gens de Chanteloup s'en foutent du cirque, il y a d'autres problèmes. La maire aurait dû faire quelque chose de plus constructif pour les jeunes comme créer de l'emploi. Avant, il y avait des moyens, on voyageait tout le temps, tout le monde pouvait s'évader".

Plusieurs appellent même au dialogue : "Il faut venir nous parler, on n'est pas des sauvages. L'ancien maire descendait de sa mairie et venait parler aux jeunes". Ces arguments, la maire les entend régulièrement et elle se dit affectée parce qu'elle assure donner tout ce qu'elle peut pour sa ville.

L'ancien maire, Pierre Cardo, 70 ans, ancien élu à la retraite, lui aussi de droite est une figure encore très appréciée. Au lendemain de l’incendie, il est allé lui-même dans la cité à la rencontre des jeunes, en présence de la maire actuelle. Il y a alors eu un vrai dialogue. Mais ce lien reste très fragile et les habitants de Chanteloup-les-Vignes attendent beaucoup plus.