Un logiciel contre les téléphones bloqués

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avec Pierre de Cossette
Des gérants de magasins contournent le blocage des téléphones volés grâce à un programme.

La faille dans le système s'appelle "Z3X". La police parisienne a récemment découvert dans une trentaine magasins, principalement autour de la Gare du Nord à Paris, un logiciel capable de débloquer et réactiver les téléphones portables volés, obligeant les autorités à réfléchir avec les opérateurs à de nouvelles mesures à mettre en place.

Ce logiciel permet de remettre sur le circuit des appareils censés être inutilisables, en reprogrammant le numéro d'identification du téléphone (Imei). Ce délit est passible de deux ans d'emprisonnement et 37.500 euros d'amende, rappelle une source policière.

"Il permet de le rendre vierge"

Ce sont les gérants peu scrupuleux de ces magasins qui acceptent de débloquer les téléphones, pourtant neutralisés à distance par les opérateurs. "Quand le client entre dans la boutique, il demande, après quelques minutes de discussion, à obtenir un déblocage. Et donc le gérant de la boutique, grâce à un logiciel spécifique, effectue une manipulation sur la mémoire interne de l'appareil, sur son processeur et permet ainsi de le rendre vierge", explique le commissaire Eric Moyse de la police d'agglomération.

"L'idée du logiciel est de revenir à la situation de l'acheteur quand il déballe son paquet. Le portable est utilisable. Il suffit de remettre une carte Sim classique et puis de le re-paramétrer et de l'utiliser comme si de rien n'était", ajoute-t-il.

Une mesure présente dans Loppsi 2

L'idée de bloquer les téléphones portables volés était déjà une mesure contenue dans la loi sur la sécurité intérieure (Loppsi 2) votée en mars 2011. Elle était censée enrayer la hausse des vols pendant un moment.

Avec cette mesure, les opérateurs ont en effet l'obligation de bloquer sous quatre jours les mobiles volés après le dépôt de plainte au commissariat. L'opérateur transmet le numéro Imei à une banque européenne implantée à Dublin en Irlande. C'est ensuite cette banque qui bloque le téléphone, censé le rendre inutilisable. "Cette mesure a clairement porté ses fruits", rappelle un enquêteur. Dans Paris et sa couronne, les vols de téléphones portables ont en effet baissé de près de 14% entre avril 2011 et avril 2012.

Un accès plus simple au numéro Imei

Mais à cause de ce logiciel, la police craint une nouvelle recrudescence de vols de téléphones. Depuis maintenant plusieurs semaines, le ministère de l'Intérieur cherche la riposte. Des réunions ont été organisées avec la Fédération française des télécoms, regroupant les différents opérateurs.

Parmi les pistes évoquées : une meilleure traçabilité du téléphone et un accès plus simple au numéro Imei. Celui-ci est en effet rarement connu des utilisateurs lorsqu'ils viennent déposer plainte, ce qui peut freiner l'enquête. Ce numéro est visible sur la facture de téléphone ou bien récupérable sur Internet, sur le site mobilevole-mobilebloque.fr, explique une source policière. "Nous souhaiterions qu'il y ait un gravage synthétique sur le portable du numéro Imei directement sur le téléphone", explique Franck Carabin, porte-parole de la direction de la sécurité de la proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP).

La réflexion porte également sur la mise en place de signaux silencieux, qui indiqueraient de manière régulière dans la journée la borne la plus proche. "Nous souhaiterions in fine que les constructeurs puissent mettre en place un dispositif qui permette de rendre totalement inutilisable le téléphone portable à distance lorsqu'il est volé", ajoute Franck Carabin. Une chose est en tout cas certaine selon une source policière, "il va falloir vite trouver quelque chose".