Salon de l'alimentation : tout est-il bon dans le végétal ?

Aliments au quinoa (1280x640) MARTIN BUREAU / AFP
Le quinoa est l'une des stars de l’alimentation dite "végétale". © MARTIN BUREAU / AFP
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Le salon de l'alimentation qui se tient à Paris jusqu'à mercredi confirme le succès actuel du végétal. Mais est-il si bon qu'on le dit pour la santé ?
ON DÉCRYPTE

"Une déferlante continue du végétal". Voilà comment Nicolas Trentesaux, organisateur du Salon international de l'alimentation Sial, qui s'est ouvert dimanche à Paris, qualifie la tendance actuelle. Une tendance qui ne concerne plus seulement quelques start-up. Le Sial témoigne d'une '"explosion" de l'offre de légumineuses, super-fruits, super-légumes, super-graines, micro-algues, "permettant de manger des protéines de manière gourmande", selon Xavier Terlet, président du cabinet d'analyse XTC World innovation. Mais le végétal, qui a tant la cote, est-il si bon pour la santé ? Éclairage avec Laurence Plumey, médecin nutritionniste, et Tasnime Akbaraly, épidémiologiste et chercheuse à l'Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale).

" Le végétal a ses limites, comme toutes les familles d'aliments "

Si le végétal a tant de succès aujourd'hui, c'est qu'il répond à un double mouvement, de rejet et d'attirance, analyse Laurence Plumey, auteure notamment de Sucre, gras et salé (édition Eyrolles). Le rejet, c'est celui dont sont victimes les produits de l'exploitation et de la consommation animale, "souvent considérés, parfois à tort, comme mauvais pour la santé", et l'attirance, c'est celle portée aujourd'hui vers "la naturalité, la santé, le naturel, le produit sain". "Comme le produit végétal incarne cette dimension, il semblait logique que les gens aillent vers cet univers", précise encore la médecin. "Je trouve ça salutaire car les gens en France ne consomment pas assez de végétaux. On est largement en-dessous des cinq fruits et légumes recommandés par jour, donc je trouve que c'est une très bonne idée d'inviter les gens à consommer davantage de végétaux à travers des recettes gourmandes, créatives, pleines de surprises, qui changent un peu des haricots verts, des épinards, des choux-fleurs, des brocolis, qui sont un peu classiques."

Par ailleurs, adopter un régime 100% végétal n'est pas forcément une solution pour Laurence Plumey. "Oui, pour cet élan vers le végétal, oui, pour cette découverte culinaire, gustative et gourmande, mais non à des positions extrêmes qui laissent croire qu'on ne peut que se nourrir que de végétal", souligne-t-elle. "Nous avons besoin des autres familles d'aliments aussi, parce que le corps humain a des exigences nutritionnelles qui sont fortes et que le végétal a ses limites, comme toutes les familles d'aliments."

Et, comme toutes les familles d'aliments, un aliment végétal, bon par nature, peut perdre toutes ses vertus dans… la cuisine. "Les végétaux apportent des fibres, des anti-oxydants, des vitamines, mais tout dépend de la façon dont ils sont cuisinés", insiste Laurence Plumey. "Si vous prenez un légume et que vous le cuisez trop longtemps, il n'aura plus beaucoup de vitamines. Si vous pressez un légume, vous n'aurez plus de fibres. Il y a un potentiel institutionnel très important à la base mais tout dépend de la façon dont c'est cuisiné."

" L'important, c'est plutôt l'équilibre alimentaire "

Le végétal a aujourd'hui plutôt bonne presse, mais ça n'a pas toujours été le cas. "Pendant des années, on avait une image plutôt négative des régimes végétariens ou vegans qui pouvaient conduire à des déficiences nutritionnelles potentielles", explique Tasnime Akbaraly, épidémiologiste et chercheuse à l'Inserm. "Cette perception a changé, notamment car il y a maintenant des études qui montrent les effets potentiellement bénéfiques de ces régimes qui consistent à remplacer des protéines animales par des protéines végétales. Les régimes méditerranéen (consommation en abondance de fruits et légumes, limitée de poisson et faible de viande), végétarien (consommation qui exclut toute chair animale) ont des effets bénéfiques sur un certain nombre de paramètres de santé. Ça peut être l'obésité, le diabète de type 2, les maladies cardio-vasculaires mais aussi certains cancers." À l'inverse, des études ont montré qu'une surconsommation de viande rouge et de charcuterie, notamment, pouvaient avoir un impact négatif et favoriser certaines maladies cardiovasculaires, l'apparition de diabète ou de cancer.

Pour autant, l'association viande/malbouffe et végétal/sain est évidemment abusive.  "On peut avoir une alimentation qui inclut des protéines animales mais extrêmement équilibrée, comme tout l'inverse", relève Tasnime Akbaraly. "Le problème n'est pas de savoir si on prend des protéines végétales exclusivement ou pas. L'important, c'est plutôt l'équilibre alimentaire qui va y être associé." Une étude, contestée par certaines associations, du mensuel 60 millions de consommateurs, montrait ainsi en janvier dernier une utilisation abusive de colorants ou d'additifs et un déséquilibre en faveur des sucres dans certains produits estampillés vegan.

"Si on remplace un steak de viande bio ou un poulet fermier par un steak de soja plein d'additifs et plein de conservateurs, ça n'a pas d'intérêt écologique ou nutritif, au contraire", insiste l'épidémiologiste. Acheter et manger "végétal" ne dispense donc pas de vérifier les étiquettes sur les emballages et les apports nutritifs des produits. Une étude de l'Inserm publiée en mars dernier a par ailleurs montré qu'une surconsommation de produits ultra-transformés, parmi lesquels figurent des produits aux effets déjà contestés (soda, nuggets, saucisses, etc.) mais aussi la plupart des steaks végétaux, entraînait une augmentation du risque de développer un cancer.

"Qu'on soit végétarien, vegan ou non, c'est une alimentation raisonnée qui compte", souligne Tsnime Akbaraly. "Pour chaque aliment ou type d'aliment, il faut avoir une réflexion sur ce qu'il vous apporte, comment ils sont produits et ce qu'ils peuvent contenir en termes de nutriments bénéfiques et de substances qui peuvent être potentiellement toxiques."