"Les dossiers de l'Hadopi sont bidons"

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et Pierrick Fay , modifié à
RÉACTIONS - Les internautes accueillent mal la phase judiciaire engagée par la Hadopi.

"Tout ça pour ça". C'est un peu en résumé l'état d'esprit des internautes après que la Hadopi ai transmis pour la première fois les dossiers des gens soupçonnés d'avoir téléchargé illégalement. La Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet n'a pas donné le nombre exact de dossiers concernés.

Mais il s'agit d'une partie des 165 dossiers d'internautes qu'elle recensait le 30 décembre dernier comme entrés dans la dernière phase. Cette troisième phase est l'ultime étape avant un possible appel à la justice, si la Commission de protection des droits - qui examine les dossiers - le décide. Selon des informations du Point, seule une dizaine d'internautes auraient refusé d'"obtempérer" et auraient vu leur dossier transmis au Parquet. Pour les internautes, c'est un peu une montagne qui accouche d'une souris.

"12 millions d'euros pour ça ?"

"Ça fait deux ans que la Hadopi est en route. Je crois qu'ils ont envoyé près d'un million de 'premiers avertissements' et qu'on se retrouve avec une dizaine d'internautes qui voient leur dossier aboutir sur le bureau du procureur", raille Renaud Veeckman, responsable du service d'assistance juridique et technique SOS-Hadopi. "On est frappé par le petit nombre de gens concernés par rapport au caractère massif du partage de fichiers sur Internet et on se dit que le danger n'est pas si grand que ça", renchérit Jérémie Zimmermann, porte-parole de l'association la Quadrature du Net, interrogé par Europe 1.

Renaud Veeckman ne manque pas de mettre en relief le budget de l'instance et les résultats fournis. "Pour un budget avoisinant les 12 millions d'euros, je trouve que ca fait cher le dossier sur le bureau du procureur de la République", ironise-t-il au micro d'Europe 1. Même son de cloche pour Maxime Rouquet, président du Parti pirate français, interrogé par Europe1.fr, pour qui cette annonce constitue "le dernier baroud d'honneur d'une instance qui coûte une fortune". Selon lui, il y a de fortes chances que la Hadopi "ne se présente plus sous cette forme dans quelques mois".

Une accélération du timing en période de campagne

L'objectif d'une telle annonce serait donc purement électoraliste. "Nicolas Sarkozy ne pouvait pas imaginer qu'aucun résultat n'aboutisse avant l'élection présidentielle, ça aurait été franchement disconvenant pour lui, qui est à l'origine de cette instance. Il y a sans doute une accélération du timing en même temps que celui de la campagne, pour montrer que la Hadopi aboutit à attraper des personnes", estime Renaud Veeckman de SOS-Hadopi.

Sauf que le nombre de personnes concernées par une convocation chez le procureur de la République est tout relatif.  "C'est une très bonne nouvelle, puisque ca va enfin donner l'occasion de prouver devant le juge que les dossiers de la Hadopi sont bidons, que la Hadopi instruit sans preuve, et que cette usine à gaz ne fait que brasser du vent", estime Jérémie Zimmermann de la Quadrature du Net.

"Les neuneus de l'informatique" concernés ?

Plusieurs internautes déplorent ainsi cette démarche électoraliste et soulignent que les personnes convoquées devant la justice ne sont pas celles qui téléchargent le plus. "Hadopi a et aura toujours plusieurs 'guerres de retard' et ce ne seront pas les pirates traditionnels qui seront pris mais des occasionnels, les neuneus de l'informatique", commente un internaute sur le site d'Europe1.fr.

Un point de vue partagé par Maxime Rouquet du Parti pirate. "Un ou deux malchanceux seront condamnés car ils auront fourni les preuves nécessaires de leur culpabilité", assure-t-il. La Hadopi condamne en effet les internautes pour défaut de sécurité de leur ligne, un grief très dur à prouver, donc difficilement condamnable. Le président du parti pirate conseille donc aux personnes convoquées devant la justice de ne pas répondre aux questions du procureur de la République. "Le droit de garder le silence est le seul moyen de se protéger contre les sanctions de la Hadopi", estime Maxime Rouquet.

Si les internautes sont convaincus de piratage par la justice, ils risquent une amende maximum de 1.500 euros, assortie éventuellement d'une suspension d'accès à Internet d'une durée maximum d'un mois.