Le retour des farines animales inquiète

Dès le 1er juin 2013, les poissons d'élevage pourront être nourris avec des farines animales. Ainsi en a décidé la Commission européenne.
Dès le 1er juin 2013, les poissons d'élevage pourront être nourris avec des farines animales. Ainsi en a décidé la Commission européenne. © MAXPPP
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Les poissons d’élevage pourront en re-consommer. Une décision de Bruxelles qui fait polémique.

Les farines animales, 12 ans après. Mine de rien, c’est une page de près de 12 ans ans que l’Union européenne a refermé jeudi soir. La Commission européen a en effet autorisé le retour des farines animales pour nourrir le poisson d’élevage, et ce dès le 1er juin 2013. La pratique était interdite depuis 2001, alors que l’Europe était en pleine crise de la vache folle. Approuvée par les experts des Etats membres en juillet 2012, la mesure autorise le recours aux protéines animales transformées (PAT) dans l'alimentation des poissons d'élevage et des autres animaux de l'aquaculture.

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Et dans un an, le porc et les volailles… La Commission européenne ne s'arrête pas là. En 2014, le recours aux PAT devrait être étendu aux volailles et aux porcs. Seule restriction : le cannibalisme restera évidemment proscrit. Les volailles ne pourront pas être nourries avec de la farine de volailles, mais en l'occurrence de porc, et inversement. Les farines animales resteront en revanche interdites dans l'alimentation des ruminants (bovins, ovins et caprins).

>>> En France, les réactions (outrées) sont nombreuses

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Sur la forme : "ça tombe mal". On a connu des timings plus adaptés. L’annonce de la réintroduction des farines animales dans la pisciculture est en effet tombée en plein scandale de la viande de cheval dans les plats préparés. "Oui, ça tombe mal", a estimé vendredi matin Guillaume Garot sur France Info. "La France s'était prononcée contre cette disposition européenne", a rappelé le ministre de l’Agroalimentaire, qui a précisé que la disposition de Bruxelles ne rendait "heureusement" pas obligatoire l'utilisation des farines animales.

Sur le fond, un choix "au détriment du consommateur". A l’UMP, on semble sur la même longueur d’ondes.  Bruno Le Maire, ancien ministre de l’Agriculture, estime ainsi que cette décision ne répond qu’à des considérations économiques, les farines animales étant largement moins chères que celles d’origine végétales. "En réalité, la logique de rentabilité économique a pris le pas sur la protection du consommateur", déplore le député UMP dans l’Express. "L'Union européenne donne le sentiment de privilégier l'économie au détriment du consommateur. Or, la logique dominante du prix le plus bas met en danger ce dernier. "

"Irresponsables". Ancienne ministre de l'Environnement, Corinne Lepage, présidente du parti écologiste Cap21, a elle aussi fait part de son indignation :

Un risque supplémentaire. Outre le retour des farines animales elles-mêmes, "Il y a des énormes difficultés à suivre les farines dans toute l’Europe", explique à Europe1.fr Dominique Damblé, chargé des questions d’agriculture et de ruralité à Cap 21. "Il y a des pays qui sont moins regardants, les farines animales risquent d’être mélangées." L’écologiste craint désormais pour l’avenir. "Il y a trois ans, on disait ‘pas de farines animales’, et maintenant on les réintroduit pour le poisson. L’année prochaine, elles vont être réintroduites pour le porc et pour la volaille. Dans cinq ans, on dira qu’il n’y a plus de danger pour les bovins. Et dans 10 ans, on aura une catastrophe sanitaire", prophétise Dominique Damblé.  

Que peut faire la France ? Pour Dominique Damblé, une seule solution après cette annone européenne "La France doit appliquer le principe de précaution". Le leader écologiste José Bové prône lui une solution plus radicale : arrêter de manger du poisson d’élevage. "Si dans la mer la chaine alimentaire voit les gros poissons manger les petits, on n’a encore jamais vu des poissons s’attaquer à des porcs ou des volailles", écrit-il dans un billet de blog. "Les poissons, comme demain les porcs et les volailles doivent être étiquetés ‘NOURRIS AVEC OU SANS FARINES ANIMALES’, pour que nous puissions choisir en connaissance de cause. Je doute que les consommateurs se bousculent pour acheter des poissons étiquetés ‘Nourris avec des farines d’origine animale’."