Jeune éborgné : le policier relaxé

Pierre Douillard avait perdu un oeil lors d'une manifestation, touché à la tête par un tir de flash-ball. Le policier qui lui a tiré dessus a été relaxé.
Pierre Douillard avait perdu un oeil lors d'une manifestation, touché à la tête par un tir de flash-ball. Le policier qui lui a tiré dessus a été relaxé. © MAXPPP
  • Copié
avec AFP , modifié à
Le fonctionnaire qui avait tiré au flash-ball sur un lycéen exécutait un ordre, a estimé le tribunal.

Oui, le policier a bien tiré au flash-ball sur un jeune lycéen de 16 ans lors d'une manifestation à Nantes en novembre 2007, causant une blessure qui coûtera un oeil à l'adolescent. Mais non, sa responsabilité pénale ne peut pas être engagée, dans la mesure où il exécutait un ordre qui n'était pas illégal. Ainsi en a décidé le tribunal correctionnel de Nantes mardi. Le policier accusé, qui risquait tout de même jusqu'à sept ans de prison, a donc été relaxé.

La victime, Pierre Douillard, a pour sa part indiqué qu'il entendait engager une procédure devant la justice administrative. "On ne lâchera jamais contre ce policier et sa hiérarchie", laquelle n'avait d'ailleurs pas été citée à comparaître au procès, a-t-il déclaré.

L'incident remonte au 27 novembre 2007, devant le rectorat de Nantes, lors d'une manifestation de lycéens opposés à la loi Pécresse sur l'autonomie des universités. Pierre Douillard, alors âgée de 16 ans, avait perdu l'usage d'un oeil après avoir été touché à un moment où les forces de l'ordre étaient séparées des manifestants par les grilles du rectorat. La victime y voyait une preuve de la dangerosité des flash-ball, ce que contestait le policier mis en cause.

Un lien direct mais accidentel ?

Lors de l'audience du 7 mars, le substitut du procureur, Yann Richard, n'avait pas vraiment départagé les deux parties. Il avait certes établi un "lien de causalité certaine et directe entre le tir du prévenu et les blessures causées à Pierre Douillard", mais a jugé que la responsabilité pénale du policier ne pouvait être engagée en l'espèce.

A ses yeux, le policier n'avait fait qu'exécuter les ordres de tir de sa hiérarchie, ordres dont le caractère "manifestement illégal" n'était pas constitué, ce qui exonère le fonctionnaire de sa responsabilité pénale. Avocat du policier, Me Laurent-Franck Lienard avait lui aussi plaidé la relaxe, soulignant que son client avait agi dans le cadre légal. Il a été entendu.

Le procès "d'armes puissantes et dangereuses"

Pour l'avocat de la victime, que le tir de flash-ball ait été intentionnel ou pas n'était pas au coeur du débat. Pour Me Catherine Glon, il s'agissait d'avantage de s'interroger sur "le recours à des armes puissantes et dangereuses face à des enfants, quelles que soient les circonstances et en particulier dans une manifestation sans violence".

Dans son réquisitoire, le substitut du procureur avait d'ailleurs relevé la "gravité des faits" et celle de la blessure occasionnée par l'arme à balles souples. "Je renvoie à l'avis de la Commission nationale de déontologie et de sécurité qui s'interroge sur l'opportunité, dans le cadre du maintien de l'ordre, d'utiliser ce type d'arme dans des manifestations. Je ne saurais mieux dire. Mais c'est ici une affaire pénale et non administrative", avait-il déclaré.