Gaz : que s'est-il (vraiment) passé ?

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avec Mathieu Charrier et agences , modifié à
Une réaction chimique "inattendue". Une cinquantaine d'incidents similaires ont été déjà répertoriés.

Que s'est-il passé sur le site de l'entreprise Lubrizol de Rouen ? Après plus de 24 heures de tests, les chimistes ont identifié l'incident à l'origine de la forte émanation d'odeur de gaz de ville lundi à Rouen. C'est en effet un mélange chimique en décomposition qui a formé ce nuage à l'odeur de boule puante et qui a traversé près de huit départements, terminant sa course en région parisienne.

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D'où vient le problème ?  L'incident qui a conduit lundi à un dégagement de mercaptan, un gaz malodorant mais pas toxique, à l'usine de production d'additifs pour lubrifiants Lubrizol de Rouen, a pour origine une réaction chimique "inattendue" dans un bac de fabrication, a-t-on appris auprès de la direction. L'incident s'est produit dans un bac de 35 m3 qui fabriquait du dithiophosphate de zinc, un produit chimique qui entre dans la composition de plusieurs additifs pour lubrifiants. "C'est une étape intermédiaire dans nos fabrications", a indiqué Nathalie Bakaev, une porte-parole de la direction de l'usine qui emploie près de 300 personnes.

A la suite d'une réaction chimique "inattendue", du mercaptan, "un marqueur très olfactif (...) qui ne présente pas de risques pour la santé", selon la préfecture, s'est formé et s'est échappé de ce bac.

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Comment stopper l'incident ? Pour remédier au problème, la direction veut transférer le contenu de ce bac dans un autre bac contenant de l'eau sodée. "L'idée est de neutraliser ainsi la réaction chimique de manière à ce que les émanations de mercaptan s'arrêtent d'elles-même", a précisé la porte parole. L'Etat a demandé à l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (Ineris) de procéder à des "modélisations" pour évaluer le schéma retenu par l'exploitant. "Ce procédé a rarement été mis en oeuvre pour neutraliser une telle émission de gaz et comme pour tout procédé expérimental, nous voulons nous entourer de toutes les garanties", a précisé Florence Gouache, directrice de cabinet du préfet de Seine-Maritime.

"Il y a 30.000 litres de mélange à neutraliser. On va y aller très doucement", expliquait en milieu de journée le directeur des opérations de l'usine, Lubrizol, qui fournit des additifs pour les huiles pour moteurs, interrogé par Europe 1. Confirmation de ces précautions quelques heures plus tard : les opérations de neutralisation du mercaptan devraient finalement commencer mardi vers 22 heures.

A-t-on déjà vu des incidents similaires ? Au total, une cinquantaine incidents de fuite de mercaptan ont été répertoriés en France depuis 1988, selon la base de données Aria du ministère de l'Ecologie. En 1989, une fuite similaire à celle de la nuit de lundi à mardi avait déjà eu lieu dans l'usine Lubrizol de Rouen.

Depuis 1988, ces fuites se sont produites essentiellement à l'occasion de transport ferroviaire de fret, dans des centres de traitement de déchets, lors de fabrication d'autres produits chimiques, dans des raffineries, ou encore lors du démantèlement d'épaves.

Le dernier cas remonte à juin 2012 à Saint Vulbas, dans l'Ain, où un fût métallique contenant des déchets liquides à base de mercaptan, déchargé sur un site d'élimination de déchets dangereux, a été endommagé, libérant quelques litres de produit. En juin 2011, un incident similaire avait eu lieu dans l'agglomération lyonnaise, où de "fortes odeurs de gaz" avaient "généré une inquiétude importante" avec de très nombreux appels aux secours, à la police, les mairies et les services du gaz, selon le ministère. Les émissions de mercaptan provenaient d'une raffinerie pétrolière à Feyzin, dans la banlieue sud de Lyon.