Antonio Ferrara acquitté en appel

Avec déjà 41 ans de prison au compteur, Antonia Ferrera attend son dernier verdict .
Avec déjà 41 ans de prison au compteur, Antonia Ferrera attend son dernier verdict . © MAXPPP
  • Copié
avec AFP , modifié à
"C'est d'abord une victoire de la justice", a réagi l'avocat de la défense, Me Eric Dupond-Moretti.

Après une semaine d'audiences, la défense d'Antonio Ferrara est finalement parvenue à convaincre la cour d'assises que s'il y avait des éléments à charge contre l'accusé, ils étaient trop ténus pour démontrer sa culpabilité. Le roi de la belle a en effet été acquitté mercredi dans le procès du braquage d'un bureau de poste du Val-de-Marne en juillet 1999. La Cour d'assises de Paris a ainsi suivi la ligne de la défense du Roi de la belle qui avait demandé d'acquitter, "au bénéfice du doute" un homme déjà comptable de 41 années de prison.

C'est d'abord une victoire de la justice", a réagi auprès de l'AFP l'avocat de Ferrara, Me Eric Dupond-Moretti, en rappelant que la loi prévoit que "le doute doit profiter à l'accusé".

Mardi, l'avocat général Jean-Paul Content avait cependant requis "entre 10 et 12 ans" contre le "roi de la belle" et huit ans contre son co-accusé, Issa Traoré. Seule cette réquisition a été suivie puisque Issa Traoré a été reconnu coupable et condamné à huit ans de prison.

"Une enquête bâclée"

L'un des quatre conseils d'Antonio Ferrara, Me Frédéric Trovato avait alors rétorqué : "On condamne sur des certitudes, sur des preuves, (...) pas sur un faisceau d'indices", car "le doute doit profiter à l'accusé". Mercredi, Me Lionel Moroni a pris la relève, dénonçant une enquête bâclée: "pas d'album photo, pas de reconstitution, pas d'analyse balistique: l'instruction a été néant".

Après s'être livré à un pointilleux cours de droit mâtiné d'arithmétique sur la confusion des peines, son confrère, Me Eric Dupond-Moretti, a rappelé aux jurés l'état du compteur pénitentiaire de Ferrara: "on en est à 41 ans et six mois d'emprisonnement pour un homme de 38 ans qui n'a pas de sang sur les mains, c'est une peine monstrueuse".

Il a ensuite pilonné une à une les charges soulevées par l'accusation : la téléphonie, la reconnaissance de Ferrara par deux policiers sept ans après les faits et la présence de son ADN.

La controversée présence d'ADN

C'est  sur ce point que les avocats d'Antonio Ferrara ont centré leur défense.  L'ADN, "avant, tout le monde s'inclinait, c'était la reine des preuves", a plaidé l'avocat lillois, en s'attaquant à la charge la plus gênante.

Mais "on ne peut pas dire quand cet ADN a été laissé sur le gant", peut-être l'a-t-il prêté à un ami braqueur... Car, a-t-il rappelé, "dans sa vie, Antonio n'a pas fréquenté que des archevêques et des avocats généraux, il a fréquenté des gens qui avaient le même profil que lui." "Vous savez, ce n'est pas extraordinaire d'acquitter Ferrara dans un dossier comme celui-là", a-t-il rassuré les jurés. "Ce n'est pas une faveur que je vous demande", mais "c'est pour moi la moindre des choses, une évidence absolue."

"Bien sûr, a poursuivi Me Dupond-Moretti, vous pouvez vous dire, il y a quand même 80 chances sur 100 que ce soit lui: au café du commerce, vous avez le droit de faire ça, mais pas ici! (...) C'est dans votre serment: le doute profite à l'accusé et ce serment il vous engage."

L'avocat a conclu par une déclaration d'amour au si souriant accusé: "on est là, parce qu'on l'aime bien". "Quelles que soient les erreurs qu'il a commises, il restera pétri d'humanité", s'était ému plus tôt Me Moroni.

Les derniers mots de Ferrara

Leur client s'est alors levé pour prendre une dernière fois la parole: "ce n'est pas en m'accusant à tort que cela va soulager" les peines des parties civiles, a-t-il dit, regrettant de n'avoir "pas eu de chance" dans cette affaire qui a traîné 13 ans. Si on avait présenté sa photo aux employés de la poste à cette époque là, a-t-il promis, "je ne serais pas dans ce box".

Antonio Ferrara a enfin appelé les jurés à se mettre "à la place des victimes", "pour qu'en victimes, vous réfléchissiez à la façon dont vous auriez réagi en voyant ma tête en 2003".

L'accusé s'était alors évadé à grand fracas de la prison de Fresnes et sa photo avait été placardée partout. Pourtant, aucun des deux policiers qui l'ont formellement identifié en 2006 lors de son procès en première instance, ne l'a mis en cause pour Joinville.