120 services d'urgences sur 500 étaient encore en grève jeudi. 3:55
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Mélanie Gomez avec Stéphane Place, édité par Clémence Olivier , modifié à
ENQUÊTE - Malgré les annonces d’Agnès Buzyn, 120 services d'urgences étaient encore en grève jeudi. Canicule, médecins en vacances, fermetures de lit... comment les médecins vont-ils s'organiser cet été dans ce contexte tendu ? 
ENQUÊTE

Après des semaines de grève des services d'urgence, les soignants de plus de 120 services sur 500 jeudi continuaient à dénoncer le manque de moyens et l'épuisement des troupes, certains portant un brassard noir au travail, d'autres s'étant mis en arrêt maladie. Mais que se passera-t-il cet été, quand les médecins et les infirmiers vont logiquement prendre des vacances ?

Les généralistes et les hôpitaux se sont organisés à l'avance

La ministre de la Santé a prévu le coup. Elle a demandé aux médecins généralistes de ne pas fermer leurs cabinets en même temps. Comme chaque année, les hôpitaux ont également essayé de s'organiser à l'avance. Comme dans n'importe quelle entreprise, des roulements de vacances ont été établis, pour les médecins, les infirmières… Les soignants seront donc présents, mais en effectifs réduits. Des lits - voire des services entiers - seront fermés, comme chaque été.

Mais la situation s'annonce beaucoup plus inédite aux urgences. Cette unité doit rester ouverte 24h sur 24 et 7 jours sur 7 : or c'est là où les grévistes sont les plus nombreux. En Île-de-France, l'Agence régionale de santé assure avoir anticipé les besoins de l'été. "L'objectif est qu'il n'y ait aucun lit de réanimation de fermé. Idem pour tout ce qui est médecine polyvalente, services d'urgence…", explique Didier Jaffre, le directeur de l'offre de soins de l'ARS Île-de-France. "Dans l'ensemble des services que l'on a identifié où il y a des plages vacantes ou des nécessités de recourir à l'intérim, nous allons allouer les moyens qui ont été délégués par la ministre, tout de suite. Il n'y a pas de réelle baisse d'activité pendant les périodes estivales dans l'ensemble de la région", assure-t-il.

Une situation plus complexe dans les stations balnéaires

C'est bien différent dans les stations balnéaires. Dans le bassin d'Arcachon par exemple, la population est multipliée par quatre en juillet et en août. Alors dès le mois de janvier, l'hôpital d'Arcachon a commencé à chercher les profils qui pourraient renforcer ses équipes médicales, et particulièrement les urgences qui, depuis le début de l'année, connaissent une augmentation d'activité mensuelle de 10 %. "L'impact de l'été, c'est une grosse claque", précise Vincent Vardelle, cadre supérieur de santé. "On monte jusqu'à 180 passages par jour rien qu'aux urgences. On a même des coups de soleil qui arrivent aux urgences. En été, de jour comme de nuit, les urgences sont pleines. Psychologiquement, on s'y prépare".

Dans son budget annuel, le directeur de l'hôpital d'Arcachon, Julien Rossignol, prévoit une enveloppe spécifique autour de 100.000 euros pour ces renforts indispensables de l'été : "Ces médecins urgentistes ne viennent pas chez nous seulement pour la plage à proximité. C'est l'offre et la demande. On rentre dans des négociations", pointe le directeur. "Aujourd'hui, un urgentiste reçoit en moyenne une rémunération de 600 euros pour une plage de 12h".

En cas de canicule, se responsabiliser 

Reste une interrogation : que va-t-il se passer dans les 120 services d'urgences en grève si une canicule survient cet été, comme le prévoit Météo-France ? Pour éviter des défaillances majeures, la ministre de la Santé a débloqué 15 millions d'euros. Une enveloppe que les urgentistes en grève jugent ridicule. Selon eux, il en faudrait dix fois plus pour passer l'été.

Pour éviter que les urgences ne soient engorgées en juillet et en août, Agnès Buzyn veut en tout cas croire que les patients feront preuve de bon sens. "Il faut aller aux urgences seulement si l'on estime que c'est nécessaire. Certains sont impatients d'avoir des diagnostics et des remèdes, mais de temps en temps certains symptômes comme la fièvre peuvent attendre 24h ou 12h", rappelle la ministre. "Dans tous les cas, je demande à chacun de prendre ses responsabilités, notamment vis à vis de la canicule. Cela touche majoritairement des personnes âgées de plus de 75 ans, mais ça touche aussi tous les milieux, tous les âges et donc il faut prendre au sérieux les messages de prévention qui vont être diffusés".

Eviter le footing au soleil, boire beaucoup, se mouiller le corps ou fermer ses volets... Suivre ces recommandations est en effet crucial car le nombre de morts augmente généralement en cas de canicule. L'an dernier, la situation a été en partie maîtrisée mais 1.500 décès de plus que lors d'un été normal ont été tout de même comptabilisés.