Propos d'Emmanuel Macron sur l'hôpital : "Le problème n'est pas le diagnostic, mais le traitement", estime le professeur Grimaldi

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Ugo Pascolo , modifié à
Au micro de Nathalie Levy, le professeur émérite de diabétologie André Grimaldi a réagi aux propos d'Emmanuel Macron, qui a promis l'annonce de "décisions fortes" pour mercredi prochain concernant les moyens donnés à l'hôpital public.
INTERVIEW

"Le problème n'est pas le diagnostic, mais le traitement." André Grimaldi, professeur émérite de diabétologie à la Pitié-Salpêtrière, a accueilli avec autant de satisfaction que de circonspection les propos d'Emmanuel Macron, jeudi, lors de la journée d'"hôpital mort". Alors que plusieurs milliers de personnels soignants ont manifesté partout en France, jeudi, le président de la République, en déplacement à Épernay, dans la Marne, a indiqué que des "décisions fortes" allaient être annoncées mercredi prochain. Invité du Grand journal du soir, André Grimaldi, par ailleurs membre du collectif inter-hôpitaux, a reconnu que le chef de l'État avait "entendu la colère", mais il reste méfiant et demande qu'il n'y ait "pas de nouvelles économies demandées à l'hôpital d'ici la fin du quinquennat". 

"Si l'hôpital s'effondre, ça va coûter très cher à la société"

"On veut que l'hôpital ait les moyens d'assurer les soins qui sont en tain de s'effondrer", résume au micro d'Europe 1 André Grimaldi, qui écrivait déjà il y a quinze ans un livre intitulé Réinventer l'hôpital public, contre l'hôpital entreprise. "On ne dit pas 'ça y est', parce que l'Assemblée nationale a été avertie mais a voté le budget demandant à l'hôpital un milliard d'économies, alors on est inquiets. Les gens doivent bien comprendre que si l'hôpital s'effondre, ça va coûter très cher à la société", poursuit le médecin. Pour éviter qu'une telle chose n'arrive, "pour maintenir l'activité et répondre aux charges programmées", "il faut une augmentation du budget autour des 4%, soit 1,5 milliard d'euros", indique-t-il.

Des "patients en danger"

Symbole de l'urgence de la situation, André Grimaldi rappelle que cette semaine, tout comme l'avait fait la veille au même micro le chef du service pédiatrie de l'hôpital Necker, des enfants atteints de bronchiolite en Île-de-France ont dû être transférés en province, faute de place pour les soigner. De là à dire que la crise que traverse l'hôpital "depuis des années" peut mettre les patients en danger ?

"Carrément", lance André Grimaldi. "Quand vous mettez une personne âgée des heures sur un brancard, ça augmente le taux de complications et de mortalité. Et pour ces enfants, oui, il y a un risque de pépin", développe-t-il. Avant de conclure : "Lorsqu'une personne âgée meurt sur un brancard à Paris, ça fait une enquête, une intervention dans les médias, mais la société le tolère. Lorsque ce sera un enfant, la société ne va pas le tolérer ! Donc, il faut comprendre où on en est."

Le salaire "indigne" des infirmières 

André Grimaldi s'est également insurgé du salaire des soignants de l'hôpital public, qui pousse d'ailleurs bon nombre d'entre eux à fuir vers le privé. Ainsi, la France est "28ème du classement de l'OCDE [sur 32 pays, ndlr] en ce qui concerne le salaire des infirmières", une situation "indigne" pour le diabétologue. A contrario, André Grimaldi pointe que sur les "126 milliards d'euros dépensés chaque année dans la gestion du système de santé, 78,5 milliards sont alloués aux mutuelles et complémentaires". Un chiffre qui est "très au-dessus de ceux de l'OCDE".