Selon cette étude, les patients ne pouvaient pas passer d'une ancienne à une nouvelle. 4:50
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Pierre-Louis Toutain, pharmacologue et co-auteur d'une étude sur le Levothyrox, explique jeudi sur Europe 1 pourquoi les deux formules de l'ancien et du nouveau médicament ne pouvaient pas se substituer. 
INTERVIEW

À en croire une nouvelle étude, les patients avaient raison : le Levothyrox nouvelle formule peut provoquer, chez certains, un effet différent de l'ancien. L'évaluation faite par le laboratoire Merck pour mettre sur le marché en 2017 la nouvelle version du Levothyrox ne prenait pas suffisamment en compte les variations possibles des effets du médicament d'un patient à un autre, selon une étude franco-britannique parue jeudi. Et pour son co-auteur, Pierre-Louis Toutain, pharmacologue, les deux formules ne pouvaient donc pas être interchangeables.

"Le principale message de cette étude c’est que, quand on impose une substitution, c’est-à-dire un changement de formulation à près de 3 millions de patients (en France, ndlr), on doit mener des études qui précisément démontrent que c’est possible, c’est ce qu’on appelle de la bioéquivalence individuelle. Or ça n’a pas été fait", explique-t-il sur Europe 1 jeudi.  

"60% des patients ne sont pas dans la fourchette"

"On a fait exactement comme pour un générique : on a mis sur le marché un nouveau médicament qui va être donné à des nouveaux patients et on s'est dit que si ça ne va pas, on pourra toujours retourner à l’ancien produit, qu’il y a toujours une roue de secours. Mais dans le cas du Levothyrox, il n’y a pas de roue de secours", poursuit le pharmacologue et professeur émérite à l’école vétérinaire de Toulouse, au micro de Matthieu Belliard.

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Dans cet "article d'opinion" publié dans la revue Clinical Pharmacokinetics, les auteurs ont repris l'analyse des essais de bioéquivalence moyenne réalisés par le laboratoire allemand Merck et mis en ligne par l'Agence du médicament en 2017 par souci de transparence. "La bioéquivalence moyenne, telle que la ligne directrice européenne l’exige, est bien démontrée. Par contre, on observe que près de 60% de patients eux ne sont pas dans la fourchette imposée par la ligne directrice. En moyenne, ça passe, mais individuellement, les gens ne sont pas dedans", résume Pierre-Louis Toutain.

Les chercheurs observent en effet que "plus de 50% des 204 volontaires" sains qui ont participé à cet essai réglementaire se situaient en réalité en dehors de la plage de bioéquivalence. Ces variations individuelles pourraient expliquer les effets indésirables ressentis avec la nouvelle formule de ce traitement pour la thyroïde dont se sont plaints plusieurs dizaines de milliers de patients.