obésité poids 4:17
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Romain David , modifié à
Invitée de sans Rendez-vous, l'émission santé d'Europe 1, la professeure Karine Clément, directrice de l’Institut de cardiométabolisme et nutrition à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, nous parle de la "fibrose du tissu adipeux". Un phénomène de durcissement des graisses chez les personnes obèses, qui explique la difficulté à perdre du poids.
INTERVIEW

La France est l'une des championnes de la chirurgie bariatrique. Chaque année, environ 50.000 Français ont recours à ce type d'opération pour restreindre l'absorption des aliments dans leur organisme et lutter contre l'obésité. Mais cette intervention ne s'adresse qu'aux patients dont la situation médicale est la plus précaire, généralement avec un indice de masse corporelle supérieur à 35, et associé à plusieurs comorbidités, comme du diabète ou des problèmes cardiaques. Nécessitant un important suivi, la chirurgie bariatrique apporte également une solution radicale à ceux qui ont lutté en vain pendant des années contre la prise de poids.

Mais comment expliquer qu'elles ne parviennent pas à perdre du poids malgré leurs efforts et un encadrement médical ? Un phénomène mis en lumière ces dernières années, la "fibrose du tissu adipeux", concentre désormais l'attention de la recherche médicale.

Un phénomène de durcissement des graisses

"Le tissu adipeux n'est pas qu'un paquet qui se remplit de gras, c'est un organe qui dialogue avec les autres organes", explique au micro de Sans Rendez-vous, l'émission santé d'Europe 1, la professeure Karine Clément, directrice de l’Institut de cardiométabolisme et nutrition à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière. Situé sous la peau, le tissu adipeux est un organe endocrine, c'est-à-dire qu'il fabrique des hormones qui agissent notamment sur l'activité cardiovasculaire. 

"On s'est aperçu que ce tissu devenait malade au cours de l'obésité et perdait sa fonction essentielle, qui est de stocker des graisses quand on en a besoin, et à l'inverse de les libérer quand elles deviennent inutiles", poursuit notre spécialiste. Avec la prise de poids, la taille des cellules graisseuses augmente, l'organe adipeux s'enflamme, ce qui favorise l'apparition de la fibrose, c'est-à-dire de cellules munies de fibres rigides.

Or, la multiplication de ces fibres rend la masse graisseuse plus dure, et donc plus difficile à déloger. "Ce qui a des conséquences sur les capacités de stockage et la perte de poids", pointe Karine Clément. "L'idéal serait de maintenir un tissu graisseux très plastique. Perdre cette plasticité est un problème", explique encore cette chercheuse. 

Un traitement contre la fibrose du tissu adipeux "d'ici 5 à 10 ans"

Comprendre les mécanismes qui interviennent dans l'apparition de la fibrose permettrait éventuellement de limiter cette dernière, voire de la prévenir. "On a trouvé dans le tissu graisseux les cellules spécialisées dans la fabrication de la fibrose, on essaye d'agir sur ces cellules avec des médicaments qui interviennent sur l'apparition des fibres et sur l'inflammation du tissu graisseux. Mais pour l'instant, nous n'en sommes qu'au stade de la recherche sur l'animal", précise Karine Clément. Elle garde toutefois bon espoir de voir des traitements à destination des humains arriver rapidement sur le marché. "Je dirai d'ici 5 à 10 ans. C'est un domaine dans lequel nous progressons très vite."