L'Iran a connu de nombreux mouvements de contestation sociale. 1:40
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Jean-Sébastien Soldaïni, édité par Lucie de Perthuis
Les élections législatives ont lieu vendredi en Iran, dans un contexte politique et économique très tendu. A Téhéran, certains souhaitent manifester leur mécontentement et leur désir de changement par une forte abstention. C'est le cas d'un père et sa fille, rencontrés par Europe 1 dans un café de la capitale. 
REPORTAGE

Vendredi à 5h30 se sont ouverts les bureaux de vote iraniens, pour élire les députés. Alors que le pays connait de fortes tensions avec Washington, notamment après la mort du général Soleimani, mais aussi des tensions internes après des épisodes de violente répression populaire, l'abstention risque d'être élevée. Europe 1 a rencontré une famille iranienne dans un café de Téhéran.

L'Iran a connu un début d'année très mouvementé : l'escalade de tension avec les Etats-Unis, le crash de l'avion ukrainien, mais aussi le contexte économique et politique interne marqué par une rupture entre conservateurs et réformistes. A la fin du mois de novembre, les manifestations populaires ont été violemment réprimées, et aujourd'hui l'élection apparaît verrouillée par le pouvoir, avec une très probable victoire du camp conservateur

"Depuis 40 ans, rien ne s'est amélioré"

En réajustant timidement son voile au fond d'un café, Sara confie qu'elle vient tout juste d'avoir l'âge de voter. Il y a encore quelques mois, elle espérait pouvoir s'en réjouir. Mais cette fois, elle ne saisira pas la première occasion de glisser un bulletin dans une urne. Les récents événements l'ont découragée.

"Je pense à ceux qui sont morts dans l'avion qui a été abattu. Je ne veux pas les trahir. Je ne veux pas non plus avoir ce sale tampon du bureau de vote sur ma carte d'identité parce que j'ai l'impression que depuis 40 ans rien ne s'est amélioré dans ce pays. C'est même de pire en pire", confie la jeune iranienne. 

"Tous les candidats ont été passés au travers d'un filtre" 

Beyrouz écoute sa fille avec fierté mais son regard traduit une forme de culpabilité. Sa génération n'a pas permis de changer le pays. Ses précédents votes non plus alors cette fois, lui aussi s'abstiendra. "Voter, ce serait approuver ce système. Tous les candidats ont été passés au travers d'un filtre. Ce filtrage a soigneusement été organisé par le pouvoir donc ça ne laisse pas entendre que ceux qui seront élus amélioreront notre pays. Ils ont été choisis pour le statu quo", s'indigne le père de Sara, désespéré. 

Certains Iraniens, comme Beyrouz et sa fille, veulent une abstention massive pour marquer le mécontentement du peuple. Mais ils sont conscients que les chances qu'un tel message soit entendu sont aussi minces que leurs espoirs de changement.