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Alexis Patri
Yamina Benguigui présente mercredi dans l'émission "Ça fait du bien" son nouveau film "Sœurs". Elle revient également au micro d'Anne Roumanoff sur son expérience de ministre déléguée à la Francophonie. Un poste qu'elle a occupé sous la présidence de François Hollande, du 16 mai 2012 au 31 mars 2014.
INTERVIEW

"Les choses commencent à bouger, mais c'est très lent. Surtout, elles peuvent toujours changer dans l'autre sens." C'est avec le combat féministe au cœur que Yamina Benguigui revient mercredi dans Ça fait du bien sur son expérience de ministre déléguée à la Francophonie. Un "passage politique", comme elle le décrit, marqué par le sexisme et une volonté de lutter contre les violences faites aux femmes partout dans le monde. La réalisatrice explique par exemple avoir été marquée par le comportement de certains députés d'alors durant les questions d'actualité à l'Assemblée nationale.

"Dès que les femmes bougent, c'est des moqueries", se souvient-elle. "Le trajet au micro est très long. Nous savons que sur les quelques mètres que nous allons traverser, nous allons entendre des histoires possibles : 'Bouge ton cul !', "Petit cul !', etc." Un discours sexiste auquel Yasmina Benguigui assure qu'elle se confrontait directement.

"Le viol des femmes est une technique de guerre très organisée"

"Dans la rue, tu ne me parles pas comme ça. On s'explique. Tu prends une gifle. Sauf que là, toi, tu es assis tranquille", rétorquait-elle aux députés indélicats. "Je ne l'ai pas supporté", estime-t-elle aujourd'hui. "Ça a été très violent, parce que ça va à l'encontre de ce que vous êtes."

Mais c'est surtout son premier déplacement de ministre en République démocratique du Congo qui l'a le plus choquée sur le sujet des violences sexistes et sexuelles. "À Goma, j'ai vu de mes yeux un camp de 60.000 femmes violées. C'est une ville entière", se désole-t-elle avec colère.

"Le viol des femmes est un viol de guerre très organisé", analyse l'ancienne ministre. "On donne aux miliciens une double dose de produits, on leur donne aussi un double salaire. Ils doivent violer, parce que lorsqu'on viole les femmes, elles quittent la terre. Donc, c'est une technique de guerre qui continue de perdurer avec des nouveaux moyens."

Yamina Benguigui se souvient alors avoir mobilisé ses collègues ministres pour aider le petit hôpital local où travaillait le docteur Mukwege, qui a reçu depuis le prix Nobel de la paix. "Ça ne se faisait pas du tout dans un gouvernement", indique-t-elle. "Mais il fallait ramener des besoins à cet hôpital. Ma plus grande mission dans cette fonction a été de trouver deux millions d'euros et des médicaments, de revenir là-bas plusieurs fois, et peut-être d'avoir sauvé quelques femmes, quelques fillettes qui vivaient encore."

Et sa mission ne s'est, selon elle, pas arrêtée là. "Je me suis battue aussi à l'ONU pour avoir des bataillons armés de casques bleus pour garder le camp", indique-t-elle. "Sinon, ils n'ont pas d'armes et ils laissent rentrer ces troupes de fous."