Benjamin Morel, docteur en science-politique et maître de conférence à Paris II, estime qu'une "violence latente" s'est installée dans notre société. 2:34
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Séverine Mermilliod
Benjamin Morel, Docteur en science-politique, analyse sur Europe 1 l'incident survenu vendredi soir aux abords du théâtre des Bouffes du Nord, où était présent Emmanuel Macron pour une représentation de "La Mouche". Le lieu a failli être envahi par des militants venus manifester devant. Pour le spécialiste, "cela témoigne d’une violence latente dans une partie de notre société".
INTERVIEW

Après l'intrusion d'une trentaine de manifestants vendredi à la mi-journée au siège de la CFDT à Paris, c'est le théâtre des Bouffes du Nord à Paris, où Emmanuel Macron assistait à une représentation, qui a fait l'objet d'une tentative d'intrusion vendredi soir. Benjamin Morel, Docteur en science-politique et maître de conférence à Paris II, considère que cette montée de violence est inquiétante, même si elle n'est pas spécifique à la France. 

"Une violence latente" qui vise "les représentants et les institutions"

"L'invasion du siège de la CFDT" poursuivait "un objectif propre à la réforme des retraites", rappelle-t-il. Tandis que le rassemblement devant le théâtre témoigne selon lui "beaucoup plus d’une violence latente dans une partie de notre société, et dans l'ensemble des sociétés occidentales, qui vise avant tout les représentants et les institutions".

Dans un régime politique présidentiel comme celui de la France, "où l’incarnation de ces institutions est hyperconcentrée autour de la figure du président de la République, le toucher, même indirectement, c’est s’attaquer à ces institutions et leur légitimité", analyse le docteur en science politique.

Pas de violence aussi grande face à un chef de l'Etat depuis la guerre d'Algérie

À ses yeux, le pays n'a pas connu "de montée aux extrêmes, en termes de violence face à un chef de l’Etat, aussi grande depuis le début de la Ve république - excepté la période de la guerre d'Algérie". "On est face à quelque chose de particulier qui montre une forme d’ébullition de la société, d’acceptation d’une partie de l’opinion – je fais référence aux enquêtes d’opinion qui étaient parues au moment des gilets jaunes - face à des méthodes qui sont violentes", décortique Benjamin Morel. "Et là y a un vrai danger. Il y a un aspect groupusculaire, parce qu’on parle d’une poignée d’individus, mais il y a également un public pour ça. Et là, c'est plus inquiétant."

Ce n’est toutefois pas une singularité française d'après lui. En Italie aussi, ou "dans une moindre mesure en Grande-Bretagne et en Allemagne", la représentation des institutions devient "des cibles pour une partie plus ou moins importante de la population".