Tensions et divisions autour du rassemblement pro-Fillon au Trocadéro

François Fillon veut remobiliser ses troupes lors du rassemblement du Trocadéro, prévu dimanche. Eric FEFERBERG / AFP
François Fillon veut remobiliser ses troupes lors du rassemblement du Trocadéro, prévu dimanche.
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Thibaud Le Meneec , modifié à
La manifestation organisée dimanche après-midi par les équipes de François Fillon pour relancer sa campagne suscite l’inquiétude jusque dans son propre camp.

L’équipe Fillon voit grand : entre 50.000 personnes (la jauge annoncée à la préfecture), et 200.000 personnes, ce qu’espère le candidat, doivent se rassembler dimanche au Trocadéro, à Paris, pour manifester leur soutien au candidat de la droite, plus que jamais dans la tourmente après les derniers jours marqués par la dislocation d’une partie de son camp. Un défi en termes de sécurité, alors que se tiendront au même moment trois autres événements d’ampleur à gérer pour les autorités publiques : le semi-marathon de Paris, la course cycliste Paris-Nice et la piétonisation des Champs-Élysées. Des contre-manifestations sont aussi prévues. La préfecture de police ne va gérer que les alentours de la manifestation, mais elle prévoit aussi de recourir à des troupes mobiles en cas de troubles.

"Coup d'État des juges". Mais politiquement, pour certains, c’est la nature-même du rassemblement qui pose problème, jusque dans les rangs des Républicains. Mercredi, Valeurs Actuelles révèle que le défilé a pour but de protester contre le "coup d’État des juges". Aussitôt, les proches de François Fillon tentent de déminer le terrain en se défendant d’organiser un événement hostile au monde de la justice : "Dimanche, c'est un rassemblement de soutien à François Fillon, ce n'est pas un rassemblement contre les juges, mais un rassemblement pour sa candidature", a avancé Jérôme Chartier, mercredi soir, rejoint par Bruno Retailleau jeudi matin.

Pour plusieurs figures LR, à commencer par le sarkozyste Georges Fenech, qui se dit "inquiet" avant un rassemblement "irresponsable". Depuis la confirmation de cette manifestation par Jérôme Chartier, un proche de François Fillon, des cadres LR ont fait part de leurs craintes devant ce qu’ils considèrent comme une "maladresse", selon Jean-Frédéric Poisson, ou un événement qui va "faire le jeu du populisme et de Marine Le Pen", d’après Pierre-Yves Bournazel.

"Ça va mal finir". Le député Philippe Gosselin, qui n’ira pas au rassemblement, dénonce lui "une stratégie extrêmement dangereuse" : les juges et la justice "sont des institutions nécessaires à l'État de droit et nos démocraties sont plus fragiles qu'on ne le pense", estime-t-il. Si elle n’a pas pris publiquement position contre la manifestation, Valérie Pécresse n’approuverait pas l’initiative, à en croire Paris-Match. Des ténors aux membres plus discrets de la campagne, le rassemblement irrite toute la famille LR.

François Hollande prend la parole jeudi pour réaffirmer "qu’il ne peut pas y avoir de manifestation qui puisse mettre en cause les institutions et la justice". Au Parti socialiste, on estime que "ça va mal finir", dixit Jean-Christophe Cambadélis, ou que l’initiative est "très grave pour la démocratie", selon David Assouline. Soutien d’Emmanuel Macron, Corinne Lepage va plus loin en comparant le rassemblement de dimanche à la journée du 6 février 1934, quand plusieurs ligues d’extrême-droite ont défilé dans Paris.

Présenté un temps comme l’organisateur du rassemblement, le mouvement Sens commun a démenti être aux manettes de l’événement. Le raout sera en réalité géré par "La société civile avec François Fillon", présidé par Pierre Danon, proche de l’ancien Premier ministre. Malgré cette clarification et l’évacuation de toute référence aux juges et à la justice, le succès de la manifestation reste suspendu à l’affluence au nombre de cadres LR qui soutiendront encore François Fillon.