Taxe d'habitation : l'exécutif en terrain glissant pour sa première Conférence des territoires

© LIONEL BONAVENTURE / AFP
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David Doukhan et Charles Carrasco

Les objectifs réclamés en matière de budget aux collectivités locales doivent être définis lundi par la première Conférence des territoires, avec un sujet sensible : la suppression de la taxe d'habitation.

Ce sera désormais un rendez-vous semestriel au Sénat. Le palais du Luxembourg accueille à partir de lundi la première Conférence nationale des Territoires qui réunit les élus locaux des communes, départements, et régions. Au menu de ce rendez-vous voulu par le nouveau pouvoir : la suppression de la taxe d'habitation et le serrage de ceinture annoncé pour les collectivités locales.

10 milliards d'économies. La Conférence s'ouvrira par un discours du Premier ministre, et sera clôturée dans l'après-midi par une intervention du chef de l’État. Emmanuel Macron arrivera devant les élus avec un chiffre en tête, celui des économies dont les collectivités locales devront s'acquitter pour participer à l'effort global de maîtrise budgétaire. Pendant la campagne, le candidat avait évoqué un montant avoisinant les 10 milliards d'euros. Il devrait aujourd'hui en préciser la méthode, afin de conclure un "pacte" entre l'Etat et les collectivités. Et pour y parvenir, une "instance de dialogue" réunissant Edouard Philippe et seize représentants des collectivités va être mise en place. Le président de la République devrait notamment déjeuner avec eux.

Épargner les investissements. Les baisses de dépenses devront être effectuées d'ici 2022, c'est à dire sur l'ensemble du quinquennat. Pour y parvenir, les collectivités seront libres de s'organiser comme elles le souhaitent. Dans l'esprit des hommes du président, l'étalement de l'effort demandé devrait permettre aux élus d'anticiper les choses, en tablant, par exemple, sur des économies de fonctionnement plutôt qu'en renonçant aux investissements.

La taxe d'habitation, un terrain miné. "Notre philosophie est davantage girondine que jacobine", répètent à l'envi les conseillers d'Emmanuel Macron. En attendant, les maires veulent déjà savoir si le manque à gagner sur la taxe d'habitation, qui doit être supprimée pour 80% des ménages, sera bien compensé par l’État comme promis. Une exonération largement décriée par l'opposition, et qui avait même valu au chef de l’État, pendant la campagne, les sifflets de l'Association des maires de France.

"La fiscalité locale représente 60%, en moyenne, des recettes des collectivités, et la taxe d'habitation largement la moitié de ce chiffre", rappelle au micro d'Europe 1 le député PS de l'Ardèche Olivier Dussopt, qui vient de renoncer à son fauteuil de maire d'Annonay, conformément à la loi sur le non-cumul des mandats. "On ne peut pas dire, du jour au lendemain, que les communes perdent la taxe d'habitation et donc n'ont plus rien pour assurer le fonctionnement des services, des écoles, de l'état civil ou encore le nettoyage des rues", martèle-t-il.

Garantir l'autonomie fiscale des collectivités. Pour ce responsable local, la marge de manœuvre de l'exécutif est limitée. "Le président a dit pendant sa campagne que cette suppression serait compensée pour les communes. La question est de savoir comment, et comment on garantit l'autonomie fiscale car une dotation qui remplace une taxe ça n'est ni de l'autonomie ni de la décentralisation. Et si, malgré tout, ce sera remplacé par une dotation, quelle en seront les modalités technique ? Sera-t-elle dynamique ou gelée ? À chaque fois que l’État a remplacé une taxe par une dotation, cette dotation, au mieux, a stagné, au pire, a baissé. Ça s'est traduit par une perte de moyen pour les collectivités", déplore le socialiste.

D'autres thématique pourraient également être posées sur la table lors de cette conférence, entre autres la réforme des rythmes scolaires, la couverture numérique des territoires ou bien le financement du RSA.