Jean-Louis Debré 4:20
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Gauthier Delomez , modifié à
L'ancien président du Conseil constitutionnel Jean-Louis Debré évoque les décisions que l'institution va rendre le 14 avril sur la réforme des retraites. Dans l'émission "Le Grand Rendez-vous" en partenariat avec Europe 1, CNews et "Les Échos", l'ex-ministre de l'Intérieur sous Jacques Chirac estime que les Sages devront "dire le droit".
INTERVIEW

Au tour des Sages d'entrer en scène dans la réforme des retraites. Le Conseil constitutionnel rendra deux décisions le vendredi 14 avril : l'une sur la constitutionnalité du projet de loi adopté au Parlement après un recours au 49.3, et l'autre sur la recevabilité de la demande de référendum d'initiative partagée (RIP) lancée par la gauche. Invité dans l'émission Le Grand Rendez-vous en partenariat avec Europe 1, CNews et Les Échos, Jean-Louis Debré, ancien président de l'institution entre 2007 et 2016, évoque le rôle que s'apprêtent à jouer les Sages.

Les Sages ne jugent pas "en opportunité"

D'abord, l'ancien président de l'Assemblée nationale remet "les choses au point : le Conseil constitutionnel n'est pas là pour rendre des services. Il ne juge pas en opportunité, il doit dire le droit". Face à Sonia Mabrouk, Mathieu Bock-Côté et Stéphane Dupont, Jean-Louis Debré rappelle que "toute grande saisine du Conseil" s'est faite dans un contexte particulier, à l'image de celui particulièrement tendu sur cette réforme, "parce que s'il est saisi, c'est qu'il y a des oppositions", souligne-t-il.

Si Jean-Louis Debré ne sait pas ce que va trancher l'institution, présidée par son successeur Laurent Fabius, pour lui, le Conseil "doit fonder ses décisions en droit, et son rôle est de dire si la Constitution a été (respectée)", martelant qu'une chose qui "tient encore en France, c'est l'état de droit".

Deux interrogations juridiques sur le projet de loi

L'ex-ministre de l'Intérieur sous Jacques Chirac accepte de partager ses expertises de juriste sur la constitutionnalité du projet de loi. Et parmi les questions qui se posent, il y a "la question du véhicule législatif". "Peut-on faire une réforme des retraites en utilisant une loi de finances rectificative de la Sécurité sociale, c'est-à-dire une loi qui modifie ? Alors, il paraît que dans la loi, il y a des dispositions qui pourraient s'appliquer", analyse Jean-Louis Debré.

"Deuxièmement, il y a ce qu'on appelle les cavaliers", enchaîne l'ancien président du Conseil constitutionnel, remarquant qu'il s'agit d'une jurisprudence qu'il connaît bien. "Est-ce que, oui ou non, un certain nombre de dispositions trouvent leur place dans cette loi de financement ?", s'interroge l'homme issu de la droite. Toutefois selon lui, l'utilisation des articles 47.2 et 49.3 durant les débats ne devrait pas être remise en cause.

La décision du Conseil constitutionnel "doit être l'occasion de retendre la main"

Au-delà de ces différentes interrogations, Jean-Louis Debré considère que "l'important, c'est l'interprétation que l'on va donner" à ces décisions, même s'il n'exclut pas un texte jugé entièrement anticonstitutionnel par les Sages. "Au point où j'en suis, j'imagine tout. Il y a une fois dans l'histoire du Conseil constitutionnel où l'on a annulé toute une loi (la loi de finances le 24 décembre 1979, ndlr), mais je pense qu'il est plus vraisemblable que le Conseil va répondre point par point" aux observations, détaille-t-il.

Jean-Louis Debré évoque enfin les répercussions politiques des décisions de l'institution. "Je pense que quand on est au pouvoir, cela doit être l'occasion de retendre la main, de se remettre autour de la table et de rediscuter".