Autour de François Fillon, l'hémorragie des cadres LR se poursuit

Bussereau Solère Morano
Dominique Bussereau, Thierry Solère et Nadine Morano ont fait défection vendredi. © AFP
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Le camp du candidat de la droite se fissure de toutes parts. Des membres actifs de sa campagne, parfois des gros poissons, quittent le navire. Jusqu’au naufrage ?

François Fillon voulait reprendre (encore une fois) la main en prononçant un discours très ferme mercredi midi. Mais sa position est de plus en plus jugée intenable, jusque dans son camp. L’ancien Premier ministre est désormais lâché de toutes parts. Des soutiens, qui avaient parfois un rôle actif dans sa campagne présidentielle, quittent le navire, affaiblissant un peu plus le candidat empêtré dans les affaires. La première vague de départ a eu lieu dès mercredi après-midi. Une deuxième est attendue jeudi, et elle pourrait prendre des allures de tsunami.

  • Les poids lourds de la campagne

Bruno Le Maire. Il est le premier à avoir pris ses responsabilités. Bruno Le Maire a quitté dès 14 heures l’équipe de François Fillon, où il était chargé des affaires européennes et internationales. "Je crois au respect de la parole donnée. Elle est indispensable à la crédibilité de la politique", écrit l’ancien ministre de l’Agriculture, qui fait référence à la promesse réaffirmé le 26 septembre sur TF1 par François Fillon de ne pas se présenter s’il était mis en examen. Celui qui fut l’adversaire de l’ancien Premier ministre lors de la primaire de la droite assure aussi qu’il "poursuit le combat politique au service de la France et des Français".

Thierry Solère. C'était le premier porte-parole de François Fillon, mais aussi le "monsieur primaire" de la droite. Ce proche de Bruno Le Maire a annoncé qu'il jetait l'éponge vendredi matin, sur Twitter. Dans un message laconique, Thierry Solère a simplement expliqué qu'il avait "décidé de mettre fin à [ses] fonctions".

Sébastien Lecornu. Ce "lemairiste" a pris une nuit de réflexion. Mais jeudi matin, il a aussi annoncé sa démission du poste de directeur adjoint de la campagne de François Fillon. N’étant plus à même de remplir mes fonctions, j’ai présenté aujourd’hui ma démission (…) afin de me consacrer pleinement à mon département de l’Eure et à ma ville de Vernon", écrit le président du Conseil départemental de l’Eure dans un communiqué.

Virginie Calmels. C'était l'une des dernières juppéistes présente dans la campagne, comme membre du Comité politique. La première adjointe au maire de Bordeaux a appelé vendredi François Fillon à "prendre ses responsabilités". "Il n'est plus le candidat du rassemblement et la manifestation de dimanche ne peut que confirmer cet état de fait", a-t-elle expliqué. "Si François Fillon ne peut plus poursuivre ce combat, c'est Alain juppé qui en aura la légitimité."

Vincent Le Roux. Patrick Stéfanini, directeur de campagne de François Fillon, perd un autre proche. Car après Sébastien Lecornu, c’est Vincent Le Roux, conseiller auprès du directeur de campagne, qui a annoncé qu’il quittait le navire en perdition. "Je pense que je n'étais plus en capacité d'être efficace", a expliqué ce juppéiste au Point. "Une campagne électorale et notamment présidentielle est un engagement, un partage total et une osmose avec l'homme et les idées que vous servez. Si vous estimez que vous ne pouvez plus être efficace, vous devez partir."

Gilles Boyer. L'hémorragie est notable chez les juppéistes. Gilles Boyer, ex-directeur de campagne du maire de Bordeaux, qui avait été nommé trésorier de la campagne de François Fillon après la primaire de la droite, a annoncé en fin d'après-midi sur Twitter sa démission. 

Dominique Bussereau. Le député LR, membre de l'équipe rapprochée de François Fillon, a annoncé vendredi qu'il se mettait "en retrait de la campagne" et "démissionnait de [ses] fonctions dans son équipe". 

  • Les têtes d’affiche

Franck Riester. Très proche de Bruno Le Maire, Franck Riester reprend ses mots pour expliquer qu’il ne mènera plus la campagne de François Fillon. "Je me mets en retrait de la campagne car en politique, le respect de la parole donnée est pour moi essentiel", écrit le député LR de Seine-et-Marne, qui s’était fait connaître en défendant, contre son camp, le mariage gay.

Gérald Darmanin. "Jusqu'à présent ce sont les socialistes qui faisaient monter le Front National, maintenant c’est nous. J'ai honte de ma droite." Ce tweet, envoyé jeudi par Gérald Darmanin, maire de Tourcoing, annonçait la couleur. Dans La Voix du Nord, le vice-président du conseil régional des Hauts-de-France a expliqué que François Fillon "doit prendre conscience que les Français ne l’écoutent plus, ne l’entendent plus". "Si on continue la confusion de la campagne électorale, il n’y aura pas de débat de fond."

Yves Jégo. Vice-président de l’UDI, Yves Jégo avait soutenu Bruno Le Maire pendant la campagne de la primaire de la droite. Lui aussi suit son ancien champion en se retirant de la campagne. Il va ainsi plus loin que son parti, qui s’est borné, pour l’instant, à annoncer la "suspension" de sa participation à la campagne de François Fillon.

Christine Boutin. L’ancienne ministre du Logement et ex-présidente du Parti Chrétien-démocrate a réclamé dans un tweet à François Fillon de retirer sa candidature. Là aussi "au nom de la parole donnée".

Nadine Morano. Elle avait pourtant assuré la défense de François Fillon mercredi, mais l'ancienne ministre a expliqué vendredi matin sur France Info qu'"à sa place, [elle] arrêterait". "Je fais partie de ceux qui mettent leur énergie à convaincre François Fillon de se retirer", a-t-elle assuré.

Pierre Lellouche. Ancien filloniste rallié à Nicolas Sarkozy pendant la primaire de la droite, le député de Paris a critiqué très durement François Fillon jeudi matin. "Il me paraît impossible d'être (mis) en examen et président de la République. Il est compliqué d'être garant de l'autorité judiciaire quand on est soi-même sous le coup d'une inculpation, avec un système d'immunité qui n'a pas été conçu pour ça", a jugé l’ancien secrétaire d’Etat au Commerce extérieur sur France info. "Je ne trouve pas très sain de mettre en cause la justice. C'est un jeu inutile et dangereux".

Benoist Apparu. Jeudi après-midi, C'est Benoist Apparu qui a jeté l'éponge. Soutien de Juppé pendant la primaire, le député de la Marne avait été nommé porte-parole de François Fillon après sa victoire. Son désistement est donc notable. "La tournure que prend aujourd’hui la campagne nous parait incompatible avec notre façon d’envisager l’engagement politique. Ne pouvant plus soutenir le candidat, nous nous retirons de sa campagne", écrit le maire de Châlon-en-Champagne dans un communiqué coécrit avec Christophe Béchu, sénateur-maire d'Angers, et Edouard Philippe, député-maire du Havre. 

Gilles Bourdouleix. Jeudi en fin d'après-midi, le député du Maine-et-Loire s'est fendu de deux tweets pour appeler François Fillon à céder la place à Alain Juppé. "La situation n'est plus tenable pour une campagne sereine", a argué celui qui avait apporté son soutien au Sarthois entre les deux tours de la primaire.

  • Les parlementaires

Ils sont nombreux, et venus de tout bord. Chez les sarkozystes, outre Pierre Lellouche, Catherine Vautrin, vice-président de l’Assemblée nationale, Georges Fenech, qui le premier avait appelé à un plan B après les révélations du Canard Enchaîné fin janvier, ou encore Sébastien Huygues ont fait défection.

Chez les juppéistes, Fabienne Keller, Michel Piron et Jean-Pierre Grand ne sont officiellement plus de la partie. Ce dernier, sénateur de l’Hérault, appelle même les maires et élus potentiels à envoyer leur signature à Alain Juppé, histoire de pousser un peu plus François Fillon vers la sortie. Et, au passage, d’en appeler à la candidature du maire de Bordeaux.

Enfin du côté des ex-soutiens de Bruno Le Maire, Laure de La Raudière et Gérard Cornu ont annoncé eux aussi qu’ils ne prendraient plus part à la campagne. Ils ont été imités par Pascal Coste, président du Conseil départemental de la Corrèze, Karl Olive, maire de Poissy ou Pierre-Yves Bournazel, élu de la région Île-de-France.

  • Les maires et élus locaux

Une vingtaine d'édiles de communes petites moyennes, ainsi que des élus locaux, ont signé, jeudi soir, dans L'Opinion, un appel solennel au retrait de François Fillon. Parmi eux, Gaël Perdriau, maire de Saint-Etienne, Valérie Debord, vice-présidente du conseil régional du Grand Est, Brigitte Barèges, maire de Montauban, Bernard Bonne, président du conseil départemental de la Loire ou Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône. "Un pacte moral a été rompu", ont-ils estimé. "Dans ce contexte et ce climat délétère, nous, élus de la droite et du centre, demandons solennellement à François Fillon de prendre ses responsabilités et de tenir sa parole face aux Français en retirant sa candidature en cas de mise en examen."

  • Les petites mains

Ils ne sont pas connus, mais leur départ est tout de même embarrassant pour François Fillon. Car nombres de petites mains de la campagne pourraient annoncer leur retrait. Citons Dimitri Lucas, du service de presse, Maxime Costilhes, chargé des déplacements du candidat ou Hugues Anselin, membre de l’équipe de campagne. 

L’Opinion a annoncé que les neuf permanents juppéistes de la campagne du candidat de droite ont démissionné.

De leur côté, les Jeunes avec Juppé ont annoncé sur leur page Facebook qu'ils se retiraient de la campagne, et appelé François Fillon à respecter "la parole donnée" en se retirant. Au sein des Jeunes avec Fillon, c'est encore plus compliqué. Un communiqué appelant "au retrait de François Fillon" a été diffusé vendredi. "Sa crédibilité est atteinte et ses propos sur l'instrumentalisation de la justice ne correspondent pas à ceux d'un Président de la République, garant de nos institutions", ont écrit plusieurs membres du bureau. Dans la foulée, le président des Jeunes avec Fillon a émis un autre communiqué pour contester la pertinence du premier, expliquant qu'il avait été signé par "d'anciens membres du bureau national" alors qu'ils "ne font plus partie" de l'organisation "à la suite de leur démission ou exclusion".