Présidentielle : Zemmour, Mélenchon, les deux faces d'une même pièce

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Philippe Val
La gauche est responsable de l'avènement politique d'Eric Zemmour. C'est l'opinion de notre éditorialiste Philippe Val, pour qui la gauche, en faisant l'autruche sur des sujets comme l'islamisme, le terrorisme et l'antisémitisme a laissé un boulevard permettant à Eric Zemmour de s'imposer médiatiquement.
EDITO

Il faut reconnaître quand même un mérite à Jean-Luc Mélenchon. Il est celui qui a su imposer à la gauche française toutes les idées, les thèses et les pratiques de l'extrême gauche. Un réussite indéniable, doublée d'un léger inconvénient parce que la gauche dite de gouvernement est désormais un groupuscule qui plafonne à 5% dans les sondages par temps clair.

"Zemmour est l'enfant de cette gauche d'opérette"

Quand des femmes et des hommes politiques de gauche ont tenté d'ouvrir le débat sur le séparatisme, la question de l'antisémitisme et le danger terroriste lié à l'islam politique, ils se sont fait traiter de racistes, de néo-colonialistes et de néoconservateurs américains. C'est ainsi que d'estimables personnalités comme Manuel Valls ou Bernard Cazeneuve se sont vus marginalisées, accablées de critiques insultantes et finalement chassées du jardin d'Éden de la gauche idéale.

Toutes les voix qui se sont aventurées à rappeler les bases émancipatrices de la laïcité ont été réduites au silence par les intellectuels et les journalistes créatifs inventeurs de cette licorne - la gauche anti laïque. Pendant 25 ans, cette nouvelle gauche est restée solidement assise sur le couvercle de la cocotte minute, le cul bien au chaud, indifférente à la pression qui montait. Au bout d'un certain temps, la marmite finit par lâcher un gros jet de vapeur. Et comme dans les contes des Mille et une nuits, de la nuée tourbillonnante a surgi Eric Zemmour.

La gauche radicale renie ses enfants

Qu'Eric Zemmour mélange tout : les femmes, les immigrés, le maréchal Pétain, le couscous et l'affaire Dreyfus, c'est la nature même des jets de vapeur. On sait d'où ça part, on ne sait pas où ça va. En revanche, il ne fait aucun doute que Zemmour est l'enfant de cette gauche d'opérette qui a enfumé la vie politique pendant 25 ans au lieu de s'intéresser à la réalité.

Mais un peu comme Jean-Jacques Rousseau, qui a écrit un traité sur l'éducation après avoir abandonné successivement ses cinq enfants sur les marches des églises, l'extrême gauche refuse de reconnaître sa progéniture. Elle ne veut pas entendre brailler son bébé Zemmour. Elle organise des manifestations avec les antifas, la CGT, Sud et toute la galaxie indigéniste pour empêcher Zemmour de s'exprimer. Ils rameutent tout le monde pour s'asseoir sur le couvercle de la cocotte minute, ce qui a pour conséquence de donner une puissance décuplée aux jets de vapeur zemmouriens. Ce n'est pas un hasard si Jean-Jacques Rousseau est le père de cette gauche radicale dont la caractéristique est de renier ses enfants.

Le revers de la même médaille

Mais il est trop tard, comme le dit Henri Salvador, et Zemmour est arrivé. Si la gauche radicale préfère manifester son indignation plutôt que d'argumenter contre lui, c'est parce que Zemmour lui offre l'opportunité de sortir de la naphtaline son vieux déguisement antifasciste et de s'inventer un nouveau destin. Zemmour et Mélenchon sont le revers de la même médaille, ils se donnent de la valeur l'un l'autre. Vous avez un côté pile : les martyrs de la censure. Côté face : les hérauts de l'antifascisme.

D'ailleurs, dimanche dernier, en début d'après-midi, à Villepinte, les organisateurs du meeting de Zemmour ont fait un point presse. Ils ont informé les journalistes que le staff de Zemmour et le staff de Mélenchon s'étaient mis d'accord pour que le premier, pour commencer son discours, attende que le second ait fini le sien. Le porte-parole de Zemmour a dit qu'il s'agissait d'un accord de courtoisie démocratique avec Jean-Luc Mélenchon. Ainsi, chacun des deux compères a pu bénéficier de sa retransmission en direct sur les chaînes d'info sans se chevaucher, tandis que leurs troupes se tapaient dessus avec enthousiasme.