Prélèvement à la source : cafouillage au sommet de l'État

Gérald Darmanin affirme, contrairement à Emmanuel Macron, que tout est prêt pour la mise en oeuvre du prélèvement à la source. © FRANCOIS LO PRESTI / POOL / AFP
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Anne-Laure Jumet, édité par , modifié à

Alors que tout semblait prêt pour la mise en place du prélèvement à la source en janvier, le président a émis des doutes, jeudi, en Finlande. Doutes qui sèment la pagaille, à quatre mois de l'échéance.

Le prélèvement à la source va t-il vraiment être mis en oeuvre au 1er janvier 2019 ? Théoriquement, c'est ce que prévoit le calendrier de la réforme, initiée par François Hollande puis poursuivie par Emmanuel Macron, avec un report d'un an. Sauf que le chef de l'État semble avoir des doutes. "J'ai plutôt l'intention de conduire cette réforme à son terme mais j'ai demandé aux ministres compétents de répondre à toutes les questions qui se posent encore, avant de donner une directive finale", a indiqué mardi, depuis la Finlande, le président de la République.

L'administration est prête et le fait savoir. Emmanuel Macron n'est pas le seul à émettre des réserves sur le prélèvement à la source. Le premier ministre Édouard Philippe avait déjà eu, dans le Journal du dimanche, une formulation ambiguë à ce sujet : "nous ferons le point sur la préparation de cette réforme dans les prochaines semaines", avait-il déclaré. Résultat, les doutes formulés au plus haut sommet de l'État semblent enfoncer un coin dans cette réforme lancée sous le quinquennat de François Hollande. Une inquiétude qui irrite Bercy…

Une heure après la déclaration d'Emmanuel Macron à Helsinki, la direction des finances publiques s'est fendue, sur Twitter, d'un message peu diplomatique à l'adresse du chef de l'État : "Nous sommes confiants sur le fait que toutes les réponses à ses questions lui seront apportées et que le calendrier sera tenu #gauloispasrefractaire". Un tweet, supprimé dans la foulée, qui fait grincer des dents. "Une erreur de boite d'envoi", ironise ainsi un proche d'Emmanuel Macron.

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Darmanin reste serein. Reste que ce message montre bien l'incompréhension du côté de Bercy. "Tout est prêt techniquement et je le démontrerai", a fait savoir le ministre en charge du dossier Gérald Darmanin. "Je serai le ministre qui fera l'impôt à la source", déclarait-il mercredi, sur Europe 1. Au moment même des déclarations du chef de l'État, il était d'ailleurs en déplacement à Pau aux côtés des agents des impôts sur cette question du prélèvement à la source.

Incompréhension dans la majorité. Chez les députés En Marche de la commission des finances, on tombe aussi des nues. "C'est la surprise de la journée", nous dit-on. Dans les rangs de la majorité, on ne voit qu'une explication rationnelle : le président craint les répercussions négatives dans l'opinion. Avec le prélèvement à la source, le salaire sera en effet amputé de l'impôt sur la fiche de paie dès le mois de janvier et certains pourraient y voir une perte de pouvoir d'achat, même si dans les faits ce ne sera pas le cas.

À l'Élysée, on assure juste mettre la pression sur tout le monde pour que tout se passe sans heurts. "On n'a pas une confiance aveugle en l'administration", renchérit-on à Matignon. Gérald Darmanin a rendez-vous la semaine prochaine avec Emmanuel Macron et Édouard Philippe pour les convaincre...