La visite d'Emmanuel Macron au Salon de l'Agriculture : un déplacement sous tension et millimétré

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© GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
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William Galibert, édité par R.Da. , modifié à
Protection rapprochée, poignées de main aux syndicats, échanges avec les agriculteurs... l'Elysée prépare non sans angoisse le déplacement du président de la République samedi, alors que le monde agricole reste au bord de l'implosion.
L'ENQUÊTE DU 8H

C'est un thermomètre politique sans équivalent, et ça sera une première en tant que président pour Emmanuel Macron. Le Salon de l'Agriculture, qui ouvre ses portes samedi, est un passage obligé pour la classe politique, mais aussi un terrain miné avec un monde agricole en crise perpétuelle. Le chef de l'Etat et ses équipes se préparent à en déjouer tous les pièges.

Opération charme. En effet, le président de la République a déjà commencé à déminer le terrain avec les agriculteurs. Ils seront un millier de jeunes agriculteurs à débarquer jeudi à midi à l'Elysée, pour une sorte de mini salon avant l'heure. Emmanuel Macron va leur confirmer un plan de 5 milliards d'euros d'investissements. Cependant, il n'y aura pas d'annonces nouvelles, le chef de l'Etat les a toutes faites il y a un mois, lors de ses vœux au monde agricole. Désormais, il s'agit d'expliquer, de cajoler, de charmer le monde paysan à coups de chéquier et de selfies. "On essaye de crever tous les abcès avant samedi", résume un conseiller.

Le risque d'un dérapage. Parce que samedi, la visite présidentielle au Salon de l'agriculture pourrait bien ressembler à une véritable épreuve du feu. L'Elysée veut à tout prix éviter les dérapages, de type sifflets ou manifestations, comme en février 2016, lors de la visite de François Hollande en pleine crise du lait. "L'un de mes pires souvenirs du quinquennat", décrit son conseiller en communication de l'époque, Gaspard Gantzer. Ce spécialiste est aussi un ami d'Emmanuel Macron, et il le met en garde : "Ce qui était vrai pour François Hollande le sera aussi pour Emmanuel Macron, d'autant plus que ces derniers mois, il a eu des moments où il marchait sur l'eau. Là, il va se retrouver confronté à des gens qui souffrent, qui sont en colère. Le connaissant très bien, je ne pense pas que ce sera nécessairement agréable pour lui parce qu'il verra aussi toute la difficulté de la tâche, et tout ce qui lui reste à accomplir pour convaincre les Français que ce qu'il fait est bon pour eux", explique-t-il.

Diplomatie agricole. Un proche du président résume ainsi l'enjeu : "S'il se fait huer ou insulter sur les premiers stands, ce sera irrattrapable". Sur place, porte de Versailles, la visite sera donc très codifiée. Emmanuel Macron commencera par une rencontre avec les syndicats et non pas par la traditionnelle traite des vaches - "trop cliché", dit-on au palais. Viendra ensuite le temps de la diplomatie agricole, avec le souci de ne vexer personne. "Si jamais on oublie, par exemple, le stand des Outre-mer, cela peut devenir une affaire d'Etat", sourit un conseiller.

Plus de 10 heures sur place. Enfin, en matière de sécurité, trois cercles de protection doivent être mis en place autour d'Emmanuel Macron, une véritable "bulle", selon la formule de sa garde rapprochée. L'angoisse des officiers de sécurité, ce sont moins les sifflets que l'agression physique. "Pendant tout le salon, il est à portée de couteau", s'inquiète son entourage. Et d'autant plus que cette visite risque bien de s'éterniser : Emmanuel Macron a l'intention de battre le record présidentiel en arrivant avant l'ouverture, et en quittant les lieux après la fermeture, soit plus de 10 heures sur place.