Emmanuel Macron, expert en sorties fracassantes... et en rétropédalage

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S’il surprend, comme sur la déchéance de nationalité, avec ses petites phrases qui font le buzz, le ministre de l’Economie nuance toujours ses propos après coup, pour ne jamais franchir la ligne rouge.

Ses propos ont surpris tout le monde. Une fois de plus, Emmanuel Macron a pris à revers les commentateurs de la vie politique en exprimant son malaise sur la déchéance de nationalité. Avec un sens du timing particulièrement choisi, puisque le ministre de l’Economie s’est exprimé le jour même du vote de l’article 2, celui qui fâche. Mais celui que l’on a surnommé "le chouchou" du président de la République n'a pour l'instant jamais franchi la ligne rouge. Il s'en sort la plupart du temps en nuançant ses propos ou en se faisant recadrer par le Premier ministre. 

  • Déchéance de nationalité

Les faits. Lors d’une conférence devant la fondation France-Isrël mardi, Emmanuel Macron exprime publiquement son malaise concernant la déchéance de nationalité. Selon Le Figaro qui rapporte ses propos, il explique ressentir un "inconfort philosophique avec la place que (ce débat) a pris". "Je pense qu’on ne traite pas le mal en l’expulsant de la communauté nationale", poursuit-il. Avant d’ajouter : "déchoir de la nationalité est une solution dans certains cas, mais à la fin des fins, la responsabilité des gouvernants est de prévenir et de punir implacablement le mal et les actes terroristes. Il ne faut surtout pas le prendre comme un débat sur la binationalité (ou) sur le rapport à la nationalité française".

La nuance. Évidemment, cette sortie est âprement commentée. Christiane Taubira était jusqu’alors la seule ministre à s’être opposée publiquement à la déchéance de nationalité avant de finalement quitter le gouvernement sur ce "désaccord politique majeur". Une voix que n’emprunte pas le ministre de l’Economie qui revient le lendemain sur ses propos. A iTélé, il nuance : "pour nombre de nos concitoyens, ce n’est pas une priorité et je pense qu’on a accordé trop de place à ce débat. Mon souhait le plus profond, c’est que cette réforme puisse se faire comme le président de la République l’a voulue, parce que je suis loyal au président de la République". En clair, c’est bien plus la forme, la tournure des débats, que le fond qui gêne Emmanuel Macron même si ses premiers propos peuvent prêter à confusion.

  • Le statut des fonctionnaires

Les faits. Nous sommes en septembre 2015. Lors d’un débat public au think tank "En temps réel", Emmanuel Macron estime que le statut de fonctionnaires n’est "plus adéquat" et "plus justifiable compte tenu des missions". "On va progressivement entrer dans une zone - on y est déjà d’ailleurs- où la justification d’avoir un emploi à vie garanti sur des missions qui ne le justifient plus sera de moins en défendable", déclare-t-il selon Les Echos.

Le rétropédalage. Sans surprise, ces déclarations enflamment le débat public. Le président de la République est contraint d’y faire une référence implicite lors d’un déplacement en Corrèze où il se dit "attaché" au "statut" des fonctionnaires. Emmanuel Macron n’a d’autre choix que de rétropédaler dans une déclaration. Il souligne que ce "statut n’est pas remis en cause" et ajoute "les propos partiels rapportés donnent une vision déformée de ma pensée. Il ne peut y avoir aucune polémique à ce sujet".

  • Les 35 heures

Les faits. Macron et les 35 heures, c’est une histoire qui dure. En août 2015, l’une de ses sorties met le feu à la majorité. En clôture de l’université d’été du Medef, le ministre tacle la "fausse idée" selon laquelle "la France pourrait aller mieux en travaillant moins". Une nouvelle pique contre les 35 heures contre laquelle le banquier d’affaires s’est déjà montré hostile à plusieurs reprises.

Le recadrage. La réponse, cinglante, de Manuel Valls, qui suggérait pourtant en 2011 de "déverrouiller les 35 heures", ne se fait pas attendre. "Il n’y aura pas de remise en cause du temps de travail des 35 heures", affirme-t-il. "Les Français n’ont rien à faire avec les polémiques qui tirent vers le passé". Avant de lancer : "les petites phrases font mal à la vie publique". Un recadrage qui a poussé le principal intéressé à retropédaler là aussi. "Je ne parlais pas des 35 heures mais du rapport au travail. Il en faut plus, pas moins. C’est le beau combat de la gauche, car le travail, c’est le moteur de l’émancipation individuelle", déclare-t-il à l’AFP.

  • Gad et les illettrés

Les faits. C’était sa première intervention dans les médias en tant que ministre de l’Economie. Sur Europe 1 en septembre 2014, Emmanuel Macron déclare : "dans mes dossiers, il y a la société Gad : il y a dans cet abattoir une majorité de femmes, il y en a qui sont pour beaucoup illettrées !"

Les excuses. Ces propos provoquent un véritable tollé. On reproche à l’ex-banquier son mépris. Face à l’émoi provoqué, notamment en Bretagne, le cabinet d’Emmanuel Macron contacte la rédaction du quotidien régional Le Télégramme pour concéder que le ministre avait utilisé un terme "extrêmement blessant". Et qu’il n’avait "aucun mépris envers les salariés" de Gad. Le ministre avait ensuite présenté ses "excuses les plus plates" qu’il avait réitérées au mois de janvier 2015 en se rendant dans l’usine Gad.